Ce serait bien de pouvoir aimer les 22 pages écrites par ce papi de la Résistance, parce qu'on se dit qu'on tient entre les mains un petit livre qui a pour vocation de créer un monde meilleur, un monde sans racisme, sans injustices, sans inégalités, sans pauvreté, sans chômage –sans tout ce qui est mauvais, en gros-, mais même en mobilisant toute la meilleure volonté que j'ai pu trouver dans ma petite tête, je n'ai pas réussi à être emballée par
Indignez-vous !.
Premièrement, je n'aime pas qu'on me donne des ordres. Ici, c'est d'autant plus énervant que l'ordre en question désigne l'accomplissement d'un acte aussi abstrait que le commandement de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres ». S'indigner seulement parce que papi Hessel me l'a demandé a-t-il une quelconque valeur ? C'est aussi creux que l'amour feint pour son prochain. Et c'est un peu contradictoire de s'indigner parce que quelqu'un me l'ordonne…
Mais imaginons que j'obéisse et que j'essaie de m'indigner. Bon, maintenant, il faut que je trouve ce contre quoi je peux diriger ma colère. Heureusement, papi Hessel est là pour me donner des indices ! Car pas question de s'indigner pour des causes personnelles ou individuelles ; l'indignation doit viser des motifs nobles qui auront des répercussions à l'échelle nationale voire internationale, rien que ça ! Et pour persuader son lecteur, papi Hessel prend pour exemple… son propre passé ! Certes, on ne peut rien reprocher à ce qu'il a fait de son existence, mais tout de même, un peu d'honnêteté : si le véritable but d'
Indignez-vous était de vanter les mérites de
Stéphane Hessel, mieux aurait-il valu intituler ce livre Admirez-moi.
Le regard paternaliste de
Stéphane Hessel sur son jeune lectorat est extrêmement agaçant. Il nous désigne comme des victimes, individus amorphes et sans convictions, individus bouffés par les moyens de communication et submergés par les informations dont nous bombardent les médias (et qui ont permis à son bouquin de sortir du lot). Ainsi, selon lui, si le monde va si mal aujourd'hui, tout serait de la faute aux jeunes et à leur manque de convictions politiques ? Allez, 22 pages d'indignation enquillées dans le bourricot et tout repart, le monde devient rose et meilleur, meilleur, encore meilleur (quand est-ce que ça s'arrêtera ?).
« Aux jeunes, je dis : regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation –le traitement fait aux immigrés, aux sans-papiers, aux Roms. Vous trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez ! »
Bien sûr, on ne peut pas reprocher à papi Hessel de vouloir nous laisser un monde dans lequel il soit toujours plus facile de vivre, mais son ton condescendant énerve, et entre les phrases pleines de bonnes intentions qui parsèment son livre, on ne trouve que du vide. Un bel exemple ? Pour que les inégalités cessent, il suffirait de mieux répartir l'argent entre les individus. Idée de génie. La boucle est bouclée…
Les considérations de
Stéphane Hessel sur le monde actuel sont intéressantes, mais elles auraient été plus crédibles si elles avaient été débarrassées de leurs remontrances contre une jeunesse avachie. Mais
Indignez-vous n'aurait alors été plus qu'un article de journal, et il aurait remporté beaucoup moins de succès…
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