« Les montagnes ressemblent à une ville aux tours vivantes, qui n’ont pas envie d’être habitées. Certains sommets sont tout blancs. Je me souviens de plein de poésies pour l’école qui parlaient de la neige comme d’un manteau, mais non, la neige est aussi un truc vivant et nu, aux palpitations scintillantes. Je me sens tout petit, là-dedans. »
« Dans mon dos, un immeuble en flammes. Devant moi, la mer qui vomit les cadavres. Droit devant sur une colline, la Bonne Mère immobile et dorée, celle qui est censée protéger les Marseillais. À mes pieds, mon chien bâtard, croisement de border collie et de race inconnue. Dans ma tête, l’idée d’une horloge à Paris, dont j’ignore tout. Et sur mon coeur, l’image de ma famille. »
« La Mort… J’attendais qu’elle frappe à ma porte, grelottant sous ma couette, fasciné par ce ciel bleu qui se moquait de tout, des vivants, des morts ou des agonisants, et surtout de moi. Ce ciel juste occupé à se diluer en élégants dégradés qui se déchiraient en début et fin de journée. L’eau du port reflétait ses couleurs comme avant, les mâts des bateaux s’entrechoquaient comme avant, les gabians criaient comme avant, mais aucune parole, aucun cri, aucun moteur, aucune musique, aucune présence humaine comme avant… »
« Il glisse sur l’eau.
Le monde est en train de finir. Des flammes dansent et lèchent le ciel derrière moi. Et je ne peux détacher mon regarde de cette chose, là, qui flotte.
J’ai le coeur en mille milliards de morceaux, les pieds dans le chaos, et le soleil est froid sur mon visage. »
"J'aimerais moi aussi avoir des ailes... pour être plus vite auprès de celle sans qui plus rien n'a de sens ni de sauveur"
La vraie vie est ainsi, fragile et précieuse. Elle devrait être notre plus grand trésor.
– Alors… prépare-toi à partir. Je vais à Paris. Dès que j’aurais soigné mon chien. Tu peux venir si tu veux, et si tu ne fais pas tout foirer. Promis ?
- Ton chien ?
- Ouais. Viens, je dois aller le voir, c’est urgent. Mais sois prudent, hein, tu n’en parles à personne.
- Promis ! Crois de bois, crois de fer, si je mens…
- Laisse béton, on est déjà en enfer.
Demain, avant l'aube, je partirai. Seul, je peux m'en sortir, je le sais.
Tu es là. Je suis là. Le soleil brille dehors et l'herbe poussera encore. Ce n'est donc pas la fin du monde.
On ne se trouve pas, en réalité. On se construit.