Un seul homme armé du mot juste peut accomplir ce qui sera impossible à une légion de soldats.
La main qui a manié autrefois la hache et l'épée n'aspire plus qu'à tenir pour un soir la plume. Quand j'en nettoie la pointe d'une, je me demande souvent combien de seaux d'encre j'ai utilisés au cours de ma vie ; combien de mots ai-je confiés au papier ou au vélin, croyant ainsi capturer la vérité? Et, de ces mots, combien en ai-je jeté au feu parce que je les jugeais sans valeur ou erronés ? Comme d'innombrables fois auparavant, j'écris, je sable l'encre pour la sécher, j'examine mon texte puis je le brûle. Peut-être alors la vérité s'échappe-t-elle par la cheminée sous forme de fumée ? Est-elle détruite ou au contraire, délivrée, se répand-elle sur le monde ? Je l'ignore.
" Il est étrange de se rendre compte qu'une émotion qu'on croyait au rancart depuis longtemps continue en réalité à bouillonner sous la surface."
J’avais peine à croire le fou, jadis, quand il affirmait que le temps était une grande boucle et que nous étions à jamais condamnés à répéter ce qui avait déjà été fait. Mais, plus je vieillis, plus je constate qu’il avait raison. Il voulait dire, pensais-je à l’époque, que nous étions tous enfermés dans un vaste cercle ; en réalité, à mon avis, chacun de nous naît sur sa propre voie circulaire, et, tel un poulain au bout de sa longe de dressage, nous suivons le chemin qui nous est fixé. Nous accélérons, ralentissons, nous arrêtons à la demande, puis recommençons ; et chaque fois, nous sommes convaincus que nous empruntons une route nouvelle.
L’éducation de mon père a été confiée, il y a bien longtemps, au demi-frère de mon grand-père, Umbre ; à son tour, mon père m’a donné à élever à son homme de confiance, et, une fois adulte, je n’ai pas douté que cet homme était le plus apte à protéger ma fille et à lui donner une instruction convenable? Pour ma part, j’ai pris l’enfant d’un autre et j’ai fait de Heur mon fils. Le prince Devoir, qui est mon fils sans l'être est devenu mon élève, et, plus tard, le fils de Burrich est venu apprendre auprès de moi ce que son père refusait de lui enseigner.
Tout cercle donne naissance à un autre cercle. Il paraît nouveau mais c’est une illusion : il représente notre dernière tentative en date pour corriger d’anciens manquements, réparer d’anciens torts dont nous avons été victimes et suppléer à nos négligences passées. A chaque cycle, nous rattrapons peut-être de vieilles fautes mais je crois que nous en commettons aussi de nouvelles. Toutefois, quel autre choix s’offre à nous ? Répéter indéfiniment les mêmes bévues ? Avoir le courage de trouver une voie nouvelle, c’est peut-être oser risque des erreurs nouvelles.
Le prince avait raison : le château débordait de secrets ; la moitié n’en était d’ailleurs pas : il s’agissait seulement de questions que nous n’osions pas poser de peur que les réponses ne se révèlent insupportablement douloureuses.
Je suis en pleine conversation avec Fléria [...]Laissez moi l'écouter ou elle va croire qu'on peut avoir à la fois l'esprit du Vif et l'esprit lent.
Un seul homme armé du mot juste peut accomplir ce qui sera impossible à une légion de soldats.
Proverbe montagnard.
" Celui qui n'a rien à perdre, dit-il, occupe souvent la meilleure position pour se sacrifier au bénéfice des autre."
"Et par ces mots admets une autre vérité: tu connais mes sentiments pour toi, depuis de longues années. Seuls ici, toi et moi, ne faisons pas semblant que tu les ignores. Tu sais que je t'aime. Je t'ai toujours aimé et je t'aimerai toujours." il s'exprimait d'un ton égal, comme s'il décrivait un fait inévitable; on ne percevait nulle trace de honte ni d'humiliation dans sa voix. Il se tut; des paroles comme celles qu'il venait de prononcer exigent une réponse. (...) "je t'aime, dit-il à mi-voix. je n'impose pas de limite à mon amour; aucune. Comprendstu?"
Les lèvres molles, il me sourit. « Je ne supporterai pas de te voir mourir encore une fois. Je ne le supporterai pas.
– Tu ne le supporteras pas ? Et moi ? »
Il émit un gloussement de rire désespéré. « Tu vois : nous sommes pris au piège. Je t'ai pris au piège, mon ami. Mon bien-aimé. »