Citations sur Les Chiens de chasse (36)
Certes, c'était aux tribunaux et non à la police de juger de la culpabilité des suspects, mais il était impossible pour des enquêteurs de rester objectifs dès lors qu'ils avaient un soupçon. La suite de l'enquête ne visait finalement qu'à étayer ce qui devenait une conviction, et la question de la culpabilité était tranchée bien avant le jugement du tribunal.
Ce n’était pas la première fois que Wisting voyait ça. Sous la pression, on pouvait être amené à tirer des conclusions hâtives. Les enquêteurs se formaient leur propre avis dès que les premières preuves apparaissaient et ensuite, leur opinion faite, il s'instaurait un processus inconscient pour en chercher la confirmation. Ils se mettaient des œillères et ne recueillaient que les infos qui allaient dans le sens de leur hypothèse principale. Ils se transformaient en chiens de chasse qui traquaient le gibier dont ils avaient flairé la trace. Toutes les pistes secondaires et les éléments qui pouvaient les distraire de leur but étaient écartés. Ils en avaient après Rudolf Haglund, il s'agissait de l’encercler, un point c’est tout.
Il avait toujours pensé que le métier de policier était difficile et exigeant, mais il aimait justement le genre de défis qu'il avait à relever. Il connaissait des périodes de doute où il avait l'impression que tout lui échappait et où il craignait de ne pas avoir su prendre les bonnes décisions. Mais il agissait toujours par conviction intime et il n'avait jamais eu de problèmes jusqu'ici pour répondre de ses actes. A ce stade, il ne voyait pas comment il aurait pu agir autrement dans l'affaire Cecilia.
Elle lui avait demandé quel était son rêve à lui, mais il n'avait pas répondu. Pas parce qu'il ne voulait pas, mais parce qu'il ne savait pas. Il aimait sa vie telle qu'elle était. Son travail d'enquêteur lui donnait le sentiment de faire quelque chose d'important et qui avait du sens. Il ne souhaitait pas qu'il en fût autrement.
Une injustice n'en corrige pas une autre. Haber releva le col de sa veste. Puis il haussa les épaules et se retourna pour se diriger vers la voiture. Wisting resta sur place à le suivre des yeux, sans savoir si le policier à la retraite était sérieux ou si la proposition ne servait qu'à le tester, comme dans un jeu de stratégie. Laisser Haber assumer la responsabilité serait une faute aussi grande que d'avoir remplacé la preuve ADN. Ce serait un mensonge. Une fraude. L'ancien technicien en identification criminelle se retourna et le chercha du regard. Wisting esquissa un pas pour le suivre, plus si sûr de bien connaître l'homme qu'il avait devant lui.
« Ils se mettaient des œillères et ne recueillaient que les infos qui allaient dans le sens de leur hypothèse principale. Ils se transformaient en chiens de chasse qui traquaient le gibier dont ils avaient flairé la trace .
Toutes les pistes secondaires et les éléments qui pouvaient les distraire de leur but étaient écartés . Ils en avaient après Rudolf Haglund, il s’agissait de l’encercler, un point c’est tout » ...
Dans le ciel, il trouva le Grand Chariot et les autres étoiles qui, ensemble, formaient la Grande Ourse.
Près de cette constellation se trouvaient les canes venatici. Les Chiens de chasse.
Line allait fermer sa session sur l'ordinateur quand son rédacteur en chef revint de la réunion. On disait de lui qu'il avait obtenu ce poste parce qu'il était incapable de voir les tragédies humaines qui se cachaient derrière les gros titres. Son manque d'empathie lui avait donné les qualifications requises.
Personne ne l'attendait. Suzanne sortait lentement de sa vie. Encore une fois, il serait obligé de se coucher seul et de se lever seul. De prendre ses repas seul. Pourquoi, dans le monde, était-il si difficile de partager sa vie avec quelqu'un ?
Les pulsions sexuelles ne se trouvent pas entre les jambes. Elles sont dans la tête.
D’ailleurs, les abus sexuels ont plus souvent un rapport avec le pouvoir qu’avec le sexe.