AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de bdelhausse


Salmigondis de lieux communs sur fond libidineux de cynisme dérisoire...

J'attendais du soufre. Quelque chose qui claque, que je sois d'accord ou pas, je m'attendais à un truc choc, qui bouscule, provoque et suscite la réaction (dermique et épidermique) et, partant, le débat.

J'en suis pour mes frais. J'ai eu une dystopie tout à fait banale. A tel point que je me demande si les journalistes qui ont commenté les premiers le livre l'avaient vraiment lu.

Tout ça pour ça????

Par où commencer... le contenu. L'histoire. J'ose à peine parler de thèse, tant le propos de l'auteur ne me semble pas acquis du tout. Regardons cela en 3 morceaux:
- le microcosme du "héros", fort proche de Houellebecq, et on peut se dire que ce n'est pas un hasard s'il prend Huysmans qui s'identifiait fortement à ses personnages principaux: c'est cynique et caustique à souhait, emballé, pesé, millimétré, plaisant à lire; les états d'âme sont juteux et bien vus, tout cela m'a énormément plu, je n'ai pas honte de l'écrire, il y a une jouissance de l'action rendue par un verbe fort (j'y reviendrai), ne boudons pas les personnages secondaires, Myriam, Rediger, etc. qui sont bien campés et donnent une fabuleuse réplique au personnage principal; oui, les bouleversements vus par le prisme individuel sont super jouissifs; le personnage principal pris dans le filet de ses contrariétés est finalement touchant et on finit sans doute par s'identifier à ses doutes, ses manques, ses hésitations...
- le macrocosme politico-sociétal... à part quelques saillies intéressantes, c'est un flop total; si je compare avec Une Île Sombre de Christopher Priest, c'est la Bérézina; là où l'auteur anglais, à l'aise avec les dystopies (que ne semble pas maîtriser Houellebecq, davantage dans le récit descriptif que prospectif) nous brosse un portrait individuel et sociétal, Houellebecq traîne la patte, les aspects globaux ne sont quasi pas abordés et quand ils le sont, c'est assez bancal, on est même mieux servis dans le Camp des Saints, ce brûlot fasciste; d'ailleurs, de nombreux passages où Houllebecq parle de la France de 2022 nous montre en fait la France de 2015... bien souvent, en effet, les saillies semblent taillées pour l'instant présent plutôt que pour le futur... volonté ou maladresse...? peu importe, une dystopie ne se construit pas comme cela, et Houellebecq ne maîtrise clairement pas le contexte global (au contraire d'un Moorcock qui fait cela très bien),
- l'argument philosophique repose sur un alignement de lieux communs, qui sentent le réchauffé, le rance, le raccourci à deux balles... franchement, les pages philosophico-mystico-polémiques pourraient être retirées sans que le livre en pâtisse, on aurait 250 pages au lieu de 300 et on ne s'en porterait pas plus mal, cela dynamiserait le propos, et on rirait plus souvent... j'hallucine: rire et Houellebecq sont deux choses qui sont tellement opposées... à mon avis.
Heureusement, après nous avoir rappelé qu'Islam signifie "Soumission" (à dieu, en fait), Houellebecq nous montre que la seule soumission qui compte, c'est celle des êtres humains à leurs pulsions, de sexe, de pouvoir et d'argent. Et que l'Islam, finalement, n'est qu'une manière d'y arriver pour les protagonistes.

Je n'ai pu me départir du sentiment de "réglage de comptes" avec des confrères, les académiques, Onfray, ou d'autres. Fait-on 300 pages pour cela, alors qu'une carte blanche dans Le Figaro suffirait? Bref, quant au racisme et à la xénophobie, rien de neuf et rien de réellement étayé. Pas davantage de vision future, bref une dystopie qui ne mène à rien.

Et le style? J'y arrive. C'est énorme. On le sait, mais on le découvre encore et encore. Houellebecq m'a épaté de nouveau. Pourtant j'étais prévenu. Il a un don, un truc génial, pour nous "lénifier" en cours de route et nous faire accepter n'importe quoi grâce à sa plume. A plusieurs reprises, je me suis surpris à devoir relire des pages entières afin d'y décrypter le propos, édulcoré, adouci, arasé par le style.S'il arrêtait de mettre des morceaux de lui dans sa prose, s'il cessait de se mettre en scène, ce serait super bien. Hélas, Houellebecq continue encore et encore d'être le héros de ses propres livres, et ça, cela ne me fait pas fantasmer.

Au final, le truc positif que je retire réellement de cette lecture, c'est la découverte de Huysmans, que je lirai sans doute un jour.
Commenter  J’apprécie          00







{* *}