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210 pages
Lévy Frères (01/04/1860)
4.5/5   1 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Mélangez le mot « rigolo » et le suffixe « boche » désignant un plaisantin et vous obtenez « Rigolboche » le surnom farfelu d'une notoriété publique d'une jeunette d'à peine 18 ans, et qui dès 1860 était l'une des femmes les plus connues du tout Paris bohémien. Elle était ce qui se faisait de mieux dans cette folle danse qu'est le Cancan.
Et c'est également en 1860 que sort ses mémoires ? Mais pour qui elle se prend du haut de ses 18 Ans ? Comme si elle avait déjà tant vécu… Les mémoires de Rigolboche sont sortis de façon anonyme et certains ont réellement cru que cela venait d'elle. Il y a derrière Louis Huart et Ernest Blum, deux auteurs farceurs et rigolos, des Rigol-plumes à l'esprit satirique… Les deux auteurs vont bien s'amuser car la Rigolboche divise les parisiens, regardez ce qu'on a bien pu dire d'elle avant même la sortie de ses faux mémoires :

Journal le Charivari - 14 mars 1860 - Titre intitulé « Le Rigolbochisme » :
« Dans ces derniers temps les parisiens ont été scandalisés de la célébrité de Rigolboche, leur indignation a atteint les frises du paroxysme quand ils ont vu des écrivains réputés sérieux vanter ses pas extravagants et son coup de pied pharamineux. 
Ces indignés n'ont pas voulu vouloir voir là ce qu'il y avait réellement, c'est à dire plus qu'un scandale, une personnification.
En effet, le Rigolbochisme représente assez bien les idées de cette époque, Rigolboche, transformée en déesse à ses apôtres et ses fervents.
Ceux qui ont mis sur sa tête l'auréole de la renommée ont simplement individualisé l'esprit du jour.
Qu'est ce qui ne lève pas un peu la jambe aujourd'hui ? (…)
Des gens dont la seule ambition est d'éveiller un peu de bruits autour de leurs noms. Aujourd'hui plus que jamais... C'est à celui qui lèvera le plus haut la jambe, qui frappera le plus fort sur la grosse caisse (...)
Levez la jambe, en vérité, je vous le dis, c'est avec le pied maintenant qu'on atteint la fortune »

Le Charivari et autres journaux seront terriblement nargués, le ton du livre est d'une impertinence exquise :

« Oh Rigolboche qui publie ses mémoires !
Eh bien oui ma chère - est-ce que cela te gêne ? N'ai-je pas autant ce droit que Monsieur Chose ou que Mademoiselle Machin ? (…)
Ils se sont amusés à me rendre célèbre tant pis pour eux, je suis leur égale maintenant. (…)
Je veux devenir une femme littéraire, j'ai envie d'être de l'Académie (…) j'apprendrai à danser au père Lacordaire (moraliste chrétien), gratis »

Tant d'impertinences dès le départ ! Ces quelques pages suffisent déjà à l'extermination publique sans procès d'une bonne partie des journaux, alors imaginez un journal catholique… Tenez, voici une réaction :

« Ce temps est lamentable. Des publications ordurières circulent impunément parmi le peuple et violent le foyer domestique, tels les mémoires de Rigolboche. Les honnêtes femmes pourraient acheter ce livre, sur le titre ; il faut qu'elles sachent que Rigolboche est une sauteuse célèbre dans le monde de la débauche ; un libraire, faisant argent de tout, s'est complu à publier ces pages ignobles. » du journal « le Drapeau catholique » en 1860.

L'insouciance et la raillerie règnent tout le long du livre jusqu'à se moquer des autres mémoires avec une certaine auto-dérision « Est-ce que cela va bien vous amuser que je vous raconte ma vie ? Ce serait intéressant si j'imitais une foule d'amies à moi qui ont inventé sur elles un tas d'histoires pleurnichardes pour s'excuser de leur mauvaise conduite »

Vous voulez la connaître ? Mais pourquoi dont ? « Les hommes ont une manie bien désagréable, ils sont curieux. Comment vous-êtes-vous perdue ? Demandent-ils tous.
Qu'est-ce que cela leur fait ? … On se perd quand on ne gagne pas assez, voilà tout »
Elle va tout de même nous raconter une anecdote de jeunesse, ce qui l'a fait quitter le sentier de la vertu, mais ce qu'elle aime par dessus tout, c'est piailler et caqueter sur les autres et de nous partager l'obscurité des coulisses de tous ces théâtres comiques.

Une de ses rivales est démolie, elle est de celles qui veulent s'appuyer sur une éphémère gloire afin de s'émanciper au plus vite de leur statut de lorette et qui sont enchantées d'être confondues avec les femmes du monde. Ce masque ridicule est sans cesse trahi par un langage commun qui fait rire son entourage. Elle a cependant la présence d'esprit de faire écrire ses lettres par sa maîtresse de piano, ce qui lui vaut une étonnante admiration de ses amants dupés qui ne s'attendent pas à tant d'esprit.

Mais d'où vient cette rage du cancan qui dévore notre Rigolboche ? En dehors de l'argent, la soif de liberté tout simplement ! « se conduire mal pour respirer » et de choses toutes bêtes aussi « bien des filles ont quitté le toit paternel pour abandonner le corset. Et cela se comprend, le corset est une prison »

Méfiez-vous de la naïveté et de la gaieté de ces lorettes folâtres qui dansent et des courtisanes de théâtre comique, voyez dont avec quel professionnalisme elles vous dérobent votre argent. L'une d'elles entre au théâtre munie d'un châle des Indes en cachemire. Elle scrute le moindre homme galant et lui demande de bien vouloir déposer son écharpe au vestiaire. Quelques heures plus tard, un drame survient, la lorette crie bien haut et fort en bonne actrice « Oh mais ce n'est point du cachemire ! » Dit-elle quand l'homme lui rapporte l'écharpe. C'est que l'écharpe avait été subtilement remplacée entre temps par une écharpe banale de même couleur par une complice. La lorette accuse le coup à l'innocent galant, qui, pris au piège des regards soupçonneux de la foule, accepte sans compromis une indemnisation.
Tout aussi fourbe… Vous êtes invité chez une lorette, vous attendez dans le salon que Madame finisse sa toilette quand vous remarquez une lettre entr'ouverte et visible sur le coin de la cheminée. Piqué de curiosité, vous ne pouvez résister à lire la lettre, sait-on jamais, un rival caché ? Eh non… Il s'agit d'une lettre larmoyante de la mère suppliant sa fille de lui donner de l'argent dans les plus brefs délais, tout en reconnaissant que sa fille est elle-même dans la misère… La lorette revient au salon sans faire le moindre bruit, surprend en flagrant délit d'indiscrétion le jeune homme, qui, en dédommagement lâche quelques billets…

Quel talent dans la persuasion, la domination et quelle confiance voit-on également chez certaines lorettes qui, lorsqu'elles ne montent pas sur scène, échangent régulièrement avec le public, rarement de façon désintéressé bien sûr :

Eh Alice ! (Dit un habitué) M. C (un nouveau) voudrait te voir »
« Il est vilain ton ami, Monsieur ne vient pas souvent »
« c'est la première fois… » (visiblement très gêné et intimidé)
« Payes-tu quelque chose ? »
« Au plaisir, c'est me faire beaucoup d'honneur, certainement car… »
« As-tu fini tes manières ?! » (…)
Ou encore, à quelques questions posées sur sa vie privée « Monsieur est juge d'instruction ? »
Remarquable familiarité charmante de ces lorettes ! Extraordinaire… Mieux que ça, c'est une forme d'arrogance et de vengeance sur les petits bourgeois maladroits et réservés, Oh quelle exaltation à les piétiner sans résistance !

Le repaire par excellence des lorettes et de Rigolboche est le théâtre des Délassements Comiques. Les actrices et danseuses y sont tellement sollicitées qu'il existe un facteur entre le public et les dames qui passe chaque soir, pour une moyenne de 60 à 90 courriers ! Tous identiques, tous demandent une faveur, une invitation à souper et gare aux poètes ou aux âmes sensibles sans fortune, ne perdez pas le peu d'argent que vous avez car chaque lettre s'accompagne d'une gratification pour ces dames. Pas la moindre chance qu'elle daigne accorder de l'attention à votre lettre si la somme n'est pas suffisante :
« Mademoiselle, voici une lettre, dit-il ; je n'ai reçu que vingt sous pour la course »
« A vingt sous pour la course, on ne lit pas la lettre »
Parfois reconnaissante, le correspondant à l'honneur de recevoir une réponse : une promesse de se voir à la sortie du théâtre. Si seulement elle tenait sa promesse… Elle préférera plus souvent s'échapper discrètement avec son amant, se déguisant en homme à l'aide des nombreux costumes du théâtre, peu importe que les galants hommes aient pu l'attendre 3-4 heures à la sortie.

La reine de tout ce monde est Rigolboche, pourtant discrète dans ses mémoires. C'est qu'à côté des autres actrices et danseuses elle semble bien sage… Elle se trémousse si bien avec ses jambes, elle rapporte tant là où elle se produit, qu'elle ne ressent pas le besoin de gagner davantage en soutirant ci et là les économies de son public bohème.

Tout est conté avec une insouciance et une légèreté sans égale et un aplomb incroyable dans la manière d'affirmer les choses.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Les souvenirs de jeunesse ont cela de particulier, c’est qu’en les remuant on y trouve toujours une impression qui ressemble beaucoup aux giboulées de mars.
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