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EAN : 9782013349192
138 pages
Hachette Livre BNF (01/08/2013)
5/5   1 notes
Résumé :
I - Avant-propos philosphico-médical
II - Du nombre des médecins qui exercent, ou plutôt qui n’exercent guère en France
III - Des différents moyens de se rendre célèbre
IV - Les homéopathes
V - L’agrément des consultations
VI - Les hydrolithes
VII - Du magnétisme, du somnambulisme et du jobardisme
VIII - De la médecine et de la philanthropie
IX - Deuxième classe de médecin philanthropes - les docteurs en jupo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Nous n'aurons jamais assez de gratitude pour ce courageux médecin, ce brave homme si dévoué à sa noble profession, restant sa vie entière cloîtré en son cabinet, dans une modeste et humble obscurité.
Tel n'est pas le cas selon l'auteur pour qui le médecin n'est qu'un méprisable charlatan, aussi cupide que n'importe quel autre commerçant, si ce n'est davantage tant il abuse de la confiance qu'inspire son diplôme pour mieux flouer ses patients. 

Sur le fond, son approche de la médecine ne consiste qu'à :
« Mettre des drogues qu'il ne connaît guère dans un corps qu'il ne connaît pas »

Le reste réside en son caractère, qui doit se composer d'une écrasante arrogance. Cela suffit pour moitié à faire un très bon médecin.
Cette attitude, bien que détestable, réconforte le patient n'ayant que bien souvent une maladie imaginaire : « quand il voit arriver à son chevet un homme qui, après lui avoir tâté le pouls avec beaucoup de sang-froid et lui avoir fait tirer la langue avec un sérieux imperturbable, déclare à haute voix qu'il se charge de le guérir, l'a par ce fait seul, dejà guéri à plus de moitié »
L'humilité de reconnaître ses erreurs ou de douter est donc plus largement un vilain défaut : « L'important chez un médecin est d'avoir toujours l'air bien sûr de son fait »

La préoccupation principale d'un bon médecin est d'entrer en guerre avec ses concurrents, d'arracher par tous moyens inavouables quelques poignées de malades : « Les médecins n'ont des malades qu'autant qu'ils ont beaucoup de réputation, et ils n'ont de réputation qu'autant qu'ils ont eu beaucoup de malades ».
Dès lors, les jeunes et nouveaux médecins sont à l'image des animaux les plus hostiles à l'homme, ils : « hument l'air de tous les côtés pour voir s'ils ne sentent pas la fièvre à droite ou à gauche » ; sans doute même pire que des corbeaux ou des vautours : « Sans compter que le corbeau désire que le malade en finisse promptement avec cette mauvaise plaisanterie qu'on nomme l'existence, tandis que le médecin fait durer le plaisir aussi longtemps que possible et, sans vouloir la mort du pauvre diable, ne lui souhaite pourtant non plus la santé, - il le tient dans un juste milieu fort désagréable »
Cet enthousiasme macabre n'épargne pas même ses proches : « c'est tout d'abord à ses amis et à ses connaissances qu'il souhaite quelques bonnes fluxions de poitrine, quelques excellentes fièvres typhoïdes ».
Que l'on se méfie, si le médecin est anormalement affable, ce n'est jamais sans raison : « Quand ce cannibale vous prend la main et vous sourit avec un air de contentement, c'est qu'il trouve que votre peau est brûlante et couvre quelque légère indisposition qui, avec des soins convenables, se transformera en une maladie qui durera bien deux ou trois petits mois; à deux visites par jour, cela forme un total assez nourrissant. »

Le commercial médecin déploie des moyens grotesques afin de se forger une réputation : il promet parfois des consultations gratuites à un grand nombre de personnes en vue de créer une longue file d'attente en son cabinet ; clame haut et fort qu'il a pour client tel baron ou tel comte, vrai ou faux peu importe ; finance des publicités trompeuses où le médecin est louangé par des témoignages de faux clients…

Mais tout ceci est du charlatanisme modeste et respectable quand on songe à toutes les autres vilaines crapuleries issues spécialités médicales :

L'homéopathe est un génie de la rentabilité en coûts matières des médicaments qu'il prescrit : « Vous prenez un petit paquet de poudre blanche pesant environ un milligramme ; de ce milligramme, vous prenez avec les barbes d'une plume quelques atomes que vous transportez dans une carafe pleine d'eau claire (…) ».
Si on l'interroge quant à la grande onérosité de ses traitements, il répondra tout bonnement « qu'il faut bien que tout le monde vive ! » mais comme le fait remarquer l'auteur « malheureusement, cette phrase ne peut pas s'appliquer à leurs malades ! »
Dès que le client doute de l'efficacité du traitement, il lui reprochera de n'avoir pas saisi toute la délicate subtilité de l'art homéopathique : « si elle n'est pas convenable ce ne sera pas la faute de l'homéopathe, mais cela tiendra uniquement à ce que vous aurez avalé quelques gouttes de trop - ou de moins » un fragile équilibre qui ne souffre pas la moindre inexactitude et qui arrange bien l'homéopathe.

L'hydropathe : plus rentable encore que son prédécesseur, ce dernier ne jure que par l'eau. Cette mode fut inventée par un médecin allemand qui : « transforma l'eau en une panacée universelle, qui devait détrôner à tout jamais la pierre philosophale, l'or potable » (…) « Ce remède suprême, qui existait depuis l'invention du monde et de la colique, est bien simple et à la portée de toutes les fortunes, c'est l'eau - Mon dieu ! Oui, monsieur, l'eau, la pure eau, la simple eau ! »
L'épuration par l'eau ne connait pas de limites, plus on en boit, mieux c'est : « et puis il faut en boire, non pas des cuillerées, non pas des verres, non pas des cruches, mais des sceaux » (…) « on cite actuellement de braves Allemands qui boivent jusqu'à 87 verres d'eau dans leur journée ».

Le médecin et le somnambulisme : si le patient hésite entre consulter un médecin et se rendre au spectacle, il peut tout aussi bien concilier les deux grâce au médecin-somnambule. le charlatan s'accompagne d'un faux somnambule se donnant un air convalescent, lequel est interrogé sur les causes de la maladie : « où est le siège du mal ? » Quelques effets de spectacles, des murmures, un peu de suspens et voici le somnambule indiquant que le mal se situe ou bien à l'estomac ou au coeur puis indique d'une façon tout aussi fantastique les remèdes au patient abasourdi et séduit.

Le médecin philanthrope : le désagrément des autres charlatans est de subir éventuellement le mécontentement de ses patients. le philanthrope au contraire ne reçoit que de la gratitude et de l'admiration de ses patients pour qui il est un véritable héros, un grand fou généreux au service du bien commun. Il s'offensera si l'on insiste pour payer ses consultations, car elles sont entièrement gratuites !… Ce grand philanthrope prescrira par contre systématiquement des médicaments que seul un pharmacien dans tout Paris sait confectionner. Si le patient s'en procure d'un autre pharmacien, il s'écrira qu'il est fou, qu'il court un grand danger en s'égarant de sa recommandation…
Cette unique pharmacien est si talentueux et adroit en son domaine que ses préparations et autres potions sont au mieux 10 fois plus cher que ses concurrents… Et les deux bons amis font leur compte chaque semaine, se partageant les résultats.

Le médecin des dames : celui-ci est honnête, mais il n'est pas médecin. Il sert à appuyer les petites doléances ménagères de certaines dames qui feignent une maladie nerveuse tout en confessant qu'elles rêveraient de porter un cachemire vert, de posséder une élégante calèche, d'acquérir une maison à la campagne, et que ces désirs inassouvis sont refusés par son mari avec une telle frustration qu'elle en est devenue, hélas, profondément malade ! le galant médecin l'écoute d'une grande compassion chaleureuse et conforte l'avis de sa patiente, exhortant ainsi le mari, à la manière d'une ordonnance, à satisfaire souverainement les désirs de Madame, lui faisant à coup sûr recouvrir la santé.

Les plus purs, rares et honnêtes médecins se trouvent dans de misérables positions comme celle du chirurgien militaire : « qui partage tous les ennuis et tous les périls de la profession militaire sans en être dédommagé d'aucune manière » ou du médecin de campagne, qui brave de longue distance, à travers les champs, parfois à travers la pluie, pour venir au chevet d'un paysan cadavéreux, à l'agonie et à ses derniers souffles, car : « les paysans ne vont chercher le médecin que quand le malade est à toute extrémité ; car s'ils aiment leurs grands parents, ils aiment encore plus leurs petits écus »
Comble de l'effort et des sacrifices du courageux médecin : « à la campagne on ne paie jamais le médecin quand le malade vient à mourir » et il subi même une déloyale concurrence : « il n'a pas même la consolation de vivre en paix au milieu des stupides villageois, car il est détesté du berger de la commune qui, lui aussi, a, de père en fils, la science de deviner et de guérir toutes les maladies - pour peu que la scène se passe en Picardie, dans les Pyrénées ou en Bretagne, le berger-médecin, qui à ces deux fonctions, joint l'emploi de sorcier, après avoir regardé dans la paume de la main des malades, leur révèle qu'ils sont sous l'influence d'un sort qui leur a été jeté par le médecin de la commune, et qu'ils ne pourront s'en délivrer qu'en donnant une roulée audit médecin »

Tous les médecins de ville ne sont pas nécessairement charlatans. On trouve notamment des chirurgiens passionnés, mais ils sont souvent si fanatiques du scalpel qu'ils se transforment en grossier boucher. Selon eux, tous les maux se résument en un nerf discordant qu'il faut identifier et couper à telle ou telle partie du corps pour remédier au dysfonctionnement. Si vous boitez d'une jambe il vous sectionnera un ou deux nerfs pour débloquer la paralysie, si vous bégayez il vous flanquera un coup de lancette dans un nerf de la langue…
Outre l'inefficacité probable de cette pratique, la moindre maladresse est catastrophique : « Si l'opérateur, par suite de myopie, d'étourderie ou d'ânerie, et même par suite de ces trois choses réunies, vient à laisser dévier le scalpel seulement d'un millième de ligne, je ne vous cache pas que vous aurez du désagrément »

Les confrères pharmaciens connaissent les mêmes félicités dans le charlatanisme : l'un vous vend des « cigares médicaux » guérissant du « rhume de cerveau » l'autre « des brosses électro-magnétiques dont l'usage enlève subitement les rhumatismes »…
Mais la mine d'or inépuisable se trouve dans les pâtes pectorales : ces petites dragées censées combattre la toux.
Il y a autant de variétés de pâtes pectorales qu'il y a de pharmaciens, autant de recettes, autant de noms, de prospectus propres aux pharmaciens « Pâte pectoral balsamique de Regnaud » « Pâte pectoral de Mou de veau de Degenetais » les publicités sont longues et accablent le lecteur d'une foule de témoignages de professeur agrégé à la faculté de médecine, membre de l'académie royale de Médecine… : « les médecins les plus célèbres ordonnent chaque jour l'usage de la pâte de… comme les remèdes les plus utiles pour combattre efficacement les rhumes, toux… » (exemple véridique tiré au hasard d'un journal d'époque). Des sommes pharamineuses sont dépensées par des pharmaciens industriels pour ces publicités occupant parfois presque la moitié d'une page de journal.
Le rhume est une grande manne céleste bénie par le pharmacien : « et, consultant l'horizon, il se frotte les mains avec joie quand il voit que le vent vient du nord, et que le baromètre dirige son aiguille vers le temps des fluxions de poitrine. » (…) « il n'adresse des prières au ciel, soir et matin, que pour lui insinuer de faire attraper à tous les mortels une foule d'intranspirations, de rhumes et de coqueluches ! »

En ce monde médical dégénéré, il y a encore les charlatans faisant de l'exercice illégal de la médecine. le fait était très peu réprimé à l'époque, une amende insignifiante, 3 jours de prison en cas de récidive. On ne saurait pour si peu, renoncer à exploiter le filon de la médecine sans diplôme. Certains vrais médecins les traitaient pourtant en bons amis, contre-signant à l'aveugle leurs ordonnances non sans quelque gratification…

De tous les exemples précités, il y a qu'une seule et bonne morale à extraire selon l'auteur : « C'est que dans la conduite de tous les charlatans médicaux de l'époque, il n'y a pas la moindre morale ! »
Louis Huart se défoule en cette drôle de physiologie étayée d'un tas d'exemples précis. Il dénigre avec humour et une grande exagération la sphère médicale sans épargner le moindre de ses sujets.
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