Assistante de William Lubtchansky et Dominique Chapuis sur le tournage de Shoah, à l'ouvrage notamment lors de l'emblématique séquence du salon de coiffure avec Abraham Bomba, directrice de la photographie de Sobibór, 14 octobre 1943, 16 heures, le Dernier des injustes et Napalm, Caroline Champetier est une pierre angulaire de la fabrique des films de Claude Lanzmann.
Elle abordera des questions concrètes concernant le geste cinématographique de Claude Lanzmann. Quelle est sa conception du plan, de la durée ? Comment se décidait et se discutait sa présence à l'image ? Les principes et recherches de mise en scène ont-ils connu des changements au cours de sa carrière ?
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C'était à la fin novembre 1942.
Et comme on nous chassait du travail
vers nos baraquements, tout à coup,
de cette partie du camp qu'on appelait
le camp de la mort, jaillirent des flammes.
Très haut.
Et en un instant tout le paysage,
tout le camp parut s'embraser.
[...]
et soudain l'un de nous se leva...
nous savions
qu'il était chanteur d'opéra à Varsovie.
Il s'appelait Salve
et devant ce rideau de flammes, il a commencé
à psalmodier
un chant qui m'était inconnu :
Mon Dieu, mon Dieu
pourquoi nous as-Tu abandonnés?
[...]
Il a chanté en yiddish,
tandis que derrière lui flambaient
les bûchers
sur lesquels on a commencé, alors, en novembre 1942,
à Treblinka, à brûler les corps.
C'était la première fois que cela arrivait :
nous sûmes cette nuit-là
que désormais les morts ne seraient plus enterrés,
ils seraient brûlés.
Je me suis battu pour imposer “Shoah” sans savoir que je procédais ainsi à un acte radical de nomination, puisque presque aussitôt le titre du film est devenu, en de nombreuses langues, le nom même de l’événement dans son absolue singularité. Le film a été d’emblée éponyme, on s’est mis partout à dire “la Shoah”. L’identification entre le film et ce qu’il représente va si loin que des téméraires parlent de moi comme de “l’auteur de la Shoah”, ce à quoi je ne puis que répondre : “Non, moi, c’est ‘Shoah’, la Shoah, c’est Hitler.”
Ce mot de « Shoah », Le Monde du 26 février 2005.
J’étais un homme des mûrissements longs, je n’avais pas peur de l’écoulement du temps, quelque chose m’assurait que mon existence atteindrait sa pleine fécondité quand elle entrerait dans sa deuxième moitié.
L'assimilation est aussi une destruction, un triomphe de l'oubli.
Tout est mort, mais on n'est qu'un homme, et on veut
vivre.
Alors, il faut oublier.
Il remercie Dieu de ce qui est resté et qu'il oublie.
Les Allemands avaient même ajouté
qu'il était interdit d'employer le mot "mort"
ou le mot "victime",
parce que c'était exactement comme un billot de bois,
que c'était de la merde,
que ça n'avait absolument aucune importance, c'était
rien.
Celui qui disait le mot "mort" ou "victime"
recevait des coups.
Les Allemands nous imposaient de dire, concernant
les corps,
qu'il s'agissait de Figuren,
c'est-à-dire de…
marionnettes, de poupées,
ou de Schmattes, c'est-à-dire de chiffons.
L'assimilation est aussi une destruction, un triomphe de l'oubli.
La joie, chez elle [Simone de Beauvoir], n'excluait pas la gravité, elles se conjuguaient au contraire dans une très rare attention à l'humanité de l'autre.
Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui. ( Sartre )
En vérité, je crois que ma soeur se sentait bien avec les hommes laids, ils la rassuraient, l'amour étant à ses yeux autre chose que le double mirage de belles apparences, d'abord amour de l'âme, car elle vivait contradictoirement sa beauté, évidente sous le regard des autres, problématique pour elle : elle ne s'en éprouvait pas propriétaire, elle ne se tint jamais pour une "belle souche" et c'était la source constante d'une incertitude, d'une interrogation inquiète à laquelle il n'y aurait jamais de réponse avérée.