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Critique de MassLunar


Entre Stand by me et le polar noir et blanc façon La Nuit du Chasseur, Colorado Train est une adaptation âpre, pessimiste et assez glauque (il faut bien l'avouer) d'un roman pourtant public ado signé Thibault Vermot.

Dans un noir et blanc prononcé qui alterne l'inquiétude, le buddy movie et l'horreur, cette bd signé Alex W.Inker nous conte l'histoire de quatre gamins livrés à eux-mêmes dans un petite ville rurale américaine qui se retrouve confrontés face la mort par le biais d'un mystérieux tueur.

L'album, sur un rythme ponctué en bref chapitres, chacun accompagné par sa petite musique, nous présente d'abord ces quatre gamins brisés par leur situation familiale qui trouve cependant du réconfort et de la solidarité dans leur complicité. Les journées faites de skates, de fuites face à des brutes, sont des délivrances face à un quotidien familial dur et amer.
La morosité est ambiante , surtout quand elle est souligné par un noir et blanc très prononcé, voir poisseux qui nous égare dans des limbes obscures au coeur de paysages ruraux dévastés que ce soit les recoins d'une galerie, un petit coin de forêt dans lequel s'entasse détritus et carcasse de voiture ou les vrilles tentaculaires de chemins de fer ... Cette amertume s'enfonce peu à peu dans l'horreur et la violence au fur et à mesure que le traumatisme des adultes vient étendre son emprise sur les enfants telle un croque-mitaine au sourire mort ...

Pour apprécier Colorado Train, il faut affronter une atmosphère assez lourde et un acte final assez marquant , pour ne pas dire choquant ( le passage des doigts) pour y retrouver un vrai sentiment de bravoure et de solidarité qui renvoie ce titre inévitablement à l'oeuvre de Stephen King, notamment pour sa nouvelle le Corps, adapté au cinéma sous le titre de Stand By Me avec un groupe d'adolescents qui se retrouve confronté à la mort. On peut aussi penser au classique Ca pour ce combat face à un croque-mitaine dans une ville ouvrière dont les recoins peuvent dissimuler de sombres secrets. Derrière le thriller et l'horreur, il ya tout de même la présentation de quatre gamins qui font preuve d'une solidarité sans pareil, qui s'amusent et continuent de vivre envers et contre tout leur jeunesse et leur libertés malgré les barrières que le contexte, que les adultes irresponsables et eux-mêmes brisés, leur imposent.

Le dessinateur Alex W. Inker emploie un noir et blanc significatif qui est parfaitement appropiée avec le cadre américain de l'histoire puisque d'une manière un peu méta, l'emploi du noir et blanc peut ici rappeler les polars d'un dessinateur comme Franck Miller ou s'inspirer de la bd de frisson américaine. de plus, ce noir et blanc lui permet de façonner des ambiances à la limite du fantastique comme ce passage où le jeune frère Calvin explore tout seul une galerie. Nous sommes dans du cinema expressionniste avec un tueur qui revêt les traits d'un véritable Nosferaptu !

Le dessinateur donne remarquablement vie à des personnages haut en couleur dans cette bd figée dans le noir et blanc entre ces cinq ados : Mike et son petit frère Calvin dont leur père est absent, Suz victime d'un père alcoolique qui se défoule sur sa progéniture , Donnie harcelé par les brutes du coin et enfin Durhan, un jeune hobo inventif et un peu taré qui vit en marginalité au grés des trains. Tel un roman de Stephen King, ces cinq enfants sont liés par une indefectible amitié qui les ammène à se surpasser, notamment dans un dernier acte intense qui combine à la fois bravoure et horreur.
A la différence des adultes au visage brisés et tuméfies, Alex W.Incker donne véritablement vie à ces enfants au contexte familial brisé procurant à cet album une forme d'espoir... et ce malgré un final très abrupt qui nous poussera à lire le roman afin d'en savoir plus.

Dans l'ensemble, Colorado Train est une bd que j'ai d'autant plus apprécié avec du recul, passé le cap de la noirceur et de l'horreur ambiante qui règne dans cet album. Derrière le pessimisme, se cache aussi une forte histoire d'amitié entre des gosses qui tentent à leur manière, tels des enquêteurs en herbes , de se battre contre les horrreurs de l'âge adulte.




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