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sur 3092 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je retrouve après quelques années de pause, la cantatrice chauve celle « qui se coiffe toujours de la même façon » pour tenter d'aider trois élèves de seconde à mieux comprendre le théâtre absurde et qui sont pour le moins perplexes pour ne pas dire déconfites , bien que toujours confinées, car elles ont à découvrir cette oeuvre sans préambule et à la commenter .
Je côtoie à nouveau les six personnages, chacun, stéréotype d'un individu vivant ou survivant dans une société bourgeoise, conformiste, étriquée, décadente qui s'entendent sans s'écouter, se parlent sans échanger.
Cette lecture est toujours pour moi une redécouverte passionnante , un exercice ludique , un jeu subtil pour repérer les figures de style, le sens caché des mots, les contre-sens, les non-sens, les truismes, de nouvelles incongruités.
Mr and Mrs Smith, Mr and Mrs Martin, Mary et le capitaine des pompiers évoluaient, durant la décennie 50 dans un monde drôle et tragique, leurs descendants, aujourd'hui, dans une Angleterre coupée de l'Europe vivent-ils mieux , moins absurdement dans ce monde frappé par le covid et par son variant, of course anglais !
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Jamais je n'aurais cru prendre intérêt à la conversation d'un couple anglais –tout ce qu'il y a de plus banal par ailleurs- lorsque ceux-ci se contentent d'évoquer leur dernier dîner de poisson-patates… Et pourtant, dans la Cantatrice chauve, ce sujet devient passionnant –non seulement celui-ci d'ailleurs, mais d'autres tout aussi rébarbatifs : l'évocation de la famille Watson, le fonctionnement des sonnettes d'entrée, ou la répartition démographique des incendies dans la ville de Londres.

Anodins à première vue, chacun de ces sujets de conversation ne tarde pas à prendre la tangente et à s'éloigner des voies rationnelles de la communication. Si, pour entretenir une discussion, il s'agissait de suivre une constante telle celle que l'on fixe à 9,81N pour la gravité, alors elle serait totalement anéantie dans la Cantatrice chauve.

La politesse est abolie. Plus aucun personnage ne fait d'effort pour s'intéresser aux racontars incessants des autres. Ceux-ci ne s'en formalisent pas : tellement abrutis par l'égocentrisme qui les pousse à parler sans que cela n'intéresse personne, ils ne se rendent pas compte qu'on ne les écoute pas.

La logique est abolie. Sitôt un fait posé, une affirmation prononcée, le contraire surgit et annule ce qui semblait pourtant être une évidence, en tout cas une certitude. Dans la Cantatrice chauve, on ne peut jamais être sûr de rien, et surtout pas de la sincérité des personnages. Pourtant, aucun vice n'est à déceler derrière les contradictions sans fin qui émaillent des propos. Elles se font plutôt le reflet de l'absurdité de la vie, que l'on essaie habituellement de dissimuler derrière l'apparente logique d'un discours construit. Après tout, est-il vraiment plus ridicule que tous les membres d'une famille s'appellent Bobby Watson, plutôt que l'un s'appelle Bobby, l'autre Roger, l'autre Brigitte, etc. ? Non, mais le premier fait n'a rien de commun et prouve à quel point les habitudes viennent nous rassurer dans un monde qui serait proche du chaos sans cela. Cette absurdité exprime également l'inconstance des personnages qui cherchent une fois à se définir par le biais de telle opinion, de telle position sociale, puis une fois par telles autres, pour finalement n'être définis par rien, puisque tout peut les définir.

La pudeur est abolie. Pas totalement, mais on sent que nous ne sommes jamais loin de l'instant où les couples finiront par se mêler et ou les gestes et les comportements dépasseront les limites de la bienséance. Encore une fois, Ionesco nous amène à nous interroger sur la légitimité d'un monde fondé uniquement sur des règles éphémères et dont la justification nous échappe souvent.

On pourrait trouver cette pièce totalement idiote et s'interroger sur son sens –mais ce serait avoir mal lu la Cantatrice chauve. En effet, la pièce met à mal toute notion de valeurs et ridiculise cette prétention qu'ont les hommes de vouloir donner du sens à ce qui n'en a pas. Aucun personnage n'est comique dans cette pièce : c'est la condition humaine qui l'est, sa terreur du vide qui la pousse à déployer toutes sortes de ruses pour se justifier d'être.


Alors que la démonstration aurait pu se perdre dans de longs paragraphes, Ionesco parvient à utiliser la forme très appropriée du théâtre pour nous transmettre cette réalité fondamentale et, ce qui n'est pas négligeable, il parvient à le faire avec toute la légèreté et la finesse d'esprit qui siéent à la comédie. Volonté d'ajouter que, même si tout ce à quoi nous accordons de l'importance n'en a pas véritablement, rien ne sert de nous en formaliser, et mieux vaut prendre cette réalité avec légèreté et décontraction. de toute façon, le contraire ne résoudrait en rien l'absurdité du monde que l'on retrouve toute condensée dans la Cantatrice chauve

- La leçon -

Les personnages sont universels : l'élève, le professeur. Sans difficulté, le lecteur pourra s'identifier à l'un ou à l'autre. Votre préférence se portera-t-elle plutôt sur la figure de l'élève, jeune fille modèle, sûre d'elle et brillante ? Ou plutôt sur la figure du professeur, doux et prudent à la manière de ceux qui n'ont pas confiance en eux et qui cherchent coûte que coûte à se faire apprécier des autres ?
Ne réfléchissez pas longtemps au choix que vous allez faire : de toute façon, les rôles s'inverseront vite et l'élève deviendra de plus en plus piteuse, ignorante, écrasée par le totalitarisme d'un professeur qui pense pouvoir étaler son tyrannisme à mesure qu'il révèle son savoir. La possession de connaissance lui donne-t-elle le droit de s'imposer de cette façon ?

On pourrait débusquer, derrière la pièce de la Leçon, une réflexion sur le lien entre culture et barbarie. Avec Ionesco, les enjeux ne sont heureusement jamais annoncés aussi abruptement, d'autant plus qu'au spectateur, les connaissances du professeur sembleront totalement erronées. Se succède en effet une litanie d'affirmations fumeuses et délirantes concernant les fondamentaux des maths, des langues ou de la prononciation. La logique perd sa suprématie au profit des jeux de mots et des confusions engendrées par l'ambiguïté du langage. L'élève reçoit cet enseignement saugrenu sans broncher, avec une crédulité qui ressemble fort à celle qui pouvait être la nôtre lorsque nous partagions encore sa position. de cette façon, Ionesco parvient à remettre en question les acquis fondamentaux de nos connaissances. Comment pouvons-nous être sûrs que deux et deux font quatre, si ce n'est qu'un homme l'a dit une fois et que personne n'a encore réussi à le démentir, par manque de preuve contraire ?

Là où la comédie cesse de nous faire rire, c'est lorsque le professeur justifie sa violence destructrice par le fait qu'il est le représentant du savoir. Mais que vaut cette légitimité si ce savoir qui le caractérise n'a aucune valeur ?

Ionesco réussit une nouvelle fois à ébranler nos certitudes en nous partageant entre le rire et la stupéfaction. Il laisse désemparé et nous remue en nous confrontant à des personnages aussi perdus et dérisoires que nous.
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J'étais trop jeune lorsque j'ai lu cette pièce la première fois.
Je devais interpréter le pompier, anxieux à la peur du trou de mémoire dans le monologue du “rhume”.

A l'époque, je n'avais pas percuté sur le caractère non sense à l'anglaise du texte dont le final partait “en sucette” : “Sainte Nitouche touche ma cartouche.”

Présentée comme une anti-pièce par Eugène Ionesco, elle développe son théâtre de l'absurde : “Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux !”, influencé par la méthode Assimil.

Depuis, je suis allé au théâtre de la Huchette, où la pièce se joue sans discontinuité depuis 1957, pour apprécier ce texte. Elle détient le record du monde du nombre de représentations, plus de 18 000 et 2 millions de spectateurs dans une même salle de 90 places, et j'en fus.

J'ai relu récemment cette courte pièce, annotée par la metteuse en scène de mes vingt ans.
Un petit article était glissé avec l'interview de la cantatrice à Sedan, par le journaliste de “L'Ardennais”du 04 novembre 1971 : “j'ai réussi à m'accepter telle que je suis et je ne me ferai pas de cheveux blancs avec ma calvitie. Tout chauvinisme mis à part, j'en suis même fière.”

Endossant aujourd'hui mon costume de soldat du feu devenu étroit, je peux interroger sans discrimination : "À propos, et la cantatrice chauve ?” et Mme Smith de répondre : “Elle se coiffe toujours de la même façon."




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La cantatrice chauve
Bien qu'on qualifie généralement La cantatrice chauve de pièce « absurde », elle m'apparaît plutôt comme un exercice de style théâtral qui n'a d'absurde que l'apparence superficielle. À mon avis, au lieu d'écrire un essai critique sur le théâtre bourgeois et la bourgeoisie en général, Ionesco écrit une « anti-pièce » dont chaque scène, chaque réplique, chaque indication, chaque mot, chaque lettre et signe de ponctuation sert à la caricaturer.
Cela n'empêche en rien de catégoriser, avec justesse, cette pièce comme étant une pièce de « théâtre absurde », mais il faut bien comprendre que son absurdité tient plutôt à la rupture qu'on y trouve par rapport aux genres théâtraux plus classiques et, surtout, à ce qu'on y trouve une dénonciation de l'absurdité d'une possibilité d'existence humaine. Et la possibilité d'existence humaine dont l'absurdité est ici montrée, c'est celle des bourgeois.
Le bourgeois se fait, en effet, surtout reconnaître par ses conversations banales et c'est ce qu'on trouve d'entrée de jeu : « Tiens, il est neuf heures. Nous avons mangé de la soupe, du poisson, des pommes de terre au lard, de la salade anglaise. Les enfants ont bu de l'eau anglaise. Nous avons bien mangé, ce soir. C'est parce que nous habitons dans les environs de Londres et que notre nom est Smith. »(11)
Les bons principes de médiocrité intériorisée du bon bourgeois sont également omniprésents : « Il faut leur apprendre à être sobre et mesuré dans la vie »(13).
Le bourgeois voit tout en petit et n'imagine jamais qu'il puisse ne pas comprendre quelque chose. Il va ainsi souvent parloter à tort et à travers de choses qu'il a entendues et qu'il ne comprend absolument pas : « le yaourt est excellent pour l'estomac, les reins, l'appendicite et l'apothéose. »(14)
Il va aussi généraliser hâtivement à partir de principes qui lui échappent, mais qui s'imposent de manière contingente à son petit esprit. Ainsi, pour M. Smith, le médecin doit mourir avec son malade comme le capitaine meurt avec son bateau (14), il y a toujours quelqu'un à la porte lorsqu'on entend sonner (40), ou bien il n'y a jamais personne puisque ça fait trois fois qu'on entend sonner et qu'il n'y a eu personne à chacun de ces trois fois (41) et que, si il y a bien eu quelqu'un la quatrième fois, chacun sait que « la quatrième fois ne compte pas »(46).
Ionesco ne se gêne pas non plus pour évoquer cruellement la bêtise bourgeoise : « Pourquoi à la rubrique de l'état civil, dans le journal, donne-t-on toujours l'âge des personnes décédées et jamais celui des nouveau-nés? C'est un non-sens. »(15)
Ou encore ses contradictions : « Elle a des traits réguliers et pourtant on ne peut pas dire qu'elle est belle. Elle est trop grande et trop forte. Ses traits ne sont pas réguliers et pourtant on peut dire qu'elle est très belle. Elle est un peu trop petite et trop maigre. »(17)
Le bourgeois est aussi pris avec des cadeaux absurdes dont il crève de se débarrasser sans jamais en avoir le courage. (18)
Le phénomène bourgeois est aussi habituellement lié à un nationalisme bien précis dont la contingence et les particularités n'apparaissent évidemment pas à ses incarnations : « Intérieur bourgeois anglais, avec des fauteuils anglais. Soirée anglaise. M. Smith, Anglais, dans son fauteuil et ses pantoufles anglais, fume sa pipe anglaise et lit un journal anglais, près d'un feu anglais... »(11).
Ionesco présente aussi le bourgeois, tel que dénoncé par le marxisme, en tant qu'il est complètement inconscient de toute lutte des classes: « Je voyageais en deuxième classe, Madame. Il n'y a pas de deuxième classe en Angleterre, mais je voyage quand même en deuxième classe. »(25) Cette inconscience de classe rend le bourgeois d'autant plus efficace dans l'actualisation dénuée de tout scrupule de l'inégalité de traitement qu'implique son être bourgeois : « Je crois que la bonne de nos amis devient folle... Elle veut dire elle aussi une anecdote. (...) Elle n'a pas l'éducation nécessaire.»(65-66)
Ionesco veut aussi s'amuser de la propension bourgeoise à vouloir sublimer par une fusion spirituelle l'union du désir des corps à laquelle se réduit pour lui la relation de couple. le couple Martin se cherche et se trouve ainsi de la coïncidence jusqu'à leurs lits de leurs chambres et jusqu'au blanc et rouge des yeux de leurs filles respectives nommées toutes deux « Alice » et pourtant, ils s'illusionnent tous deux sur eux-mêmes, sur leurs propres personnes et sur leur couple, phénomène qui donne l'occasion à Ionesco de mettre l'un des plus jolis passages de sa cruelle anti-pièce : « Oublions, darling, tout ce qui ne s'est pas passé entre nous et, maintenant que nous nous sommes retrouvés, tâchons de ne plus nous perdre et vivons comme avant. »(32)
Enfin, le bourgeois doit aussi se quereller de temps à autre. Il ne sait pas et n'a pas à savoir pourquoi. C'est simplement parce que c'en est l'heure. Son entêtement n'a alors d'autres bornes que celles de ses capacités physiques, comme on peut le voir à la fin de l'anti-pièce.
L'absurde apparaît ainsi non pas dans sa pureté, mais, par une présentation surréaliste qui prouve par l'absurde que les principes bourgeois sont issus d'une logique bien bancale. Et parce que le bourgeois caricatural n'existe pas, le spectateur bourgeois, inconscient de son appartenance de classe, ne se voit donc pas lui-même et s'amuse naïvement devant l'absurde de la situation qui lui est présentée. Son plaisir, il voudra ensuite le reproduire, pour que ses lèvres continuer de bien rigoler (avec mesure toutefois pour ne pas échapper le cigare), pour que ses poches puissent demeurer bien remplies et que son ventre puisse demeurer bien rond. L'absurde, d'abord véritable provocation anti-bourgeoise entrera ainsi bien rondement dans la culture populaire. Il n'y s'agira pas, toutefois, du même absurde qu'on trouve à l'origine chez des auteurs comme Ionesco, Jarry ou Camus.
En effet, pour faire sa place dans la culture de masse, l'absurde, a du laisser derrière lui toute charge sémantique pour se faire absolu et devenir l'absurde pur. L'absurde pur, dont on use à simple fin de drôlerie commerciale, peut être assimilé au burlesque. Les situations loufoques qu'on peut en tirer, même lorsqu'elles sont tout à fait convenues et attendues, par un public venu voir la dernière attraction à la mode, parce qu'il doit pouvoir le dire à ses amis, arrivent sans trop de peine à faire leur petit effet.
Le bourgeois se venge ainsi d'une attaque bien trop subtile pour pouvoir le toucher, sans même s'en rendre compte, victorieusement insignifiant et bête, en restant tout simplement lui-même, pour confirmer la règle exposée par la pièce :
Mme SMITH
Nous sommes allé voir une pièce absurde ce soir, parce que nous sommes Anglais et que nous nous appelons Smith. Nous avons ri car une pièce absurde est drôle, mais nous n'avons pas ri avec excès car il faut être sobres et mesurés dans la vie. Ma voisine n'a pas ri car elle est illégitime et manque d'instruction anglaise. Elle trouve la pièce absurde très sérieuse car elle n'est pas anglaise. Elle rit clandestinement de l'auditoire, mais ce n'est pas moi qui irai la dénoncer.
M SMITH, continuant sa lecture, fait claquer sa langue.
Ceci étant dit (ou écrit, c'est selon), ce n'est pas parce que je crois être en état de comprendre Ionesco que je suis moi-même un anti-bourgeois aigri. Il faut respecter toutes les formes fragiles et éphémères du bonheur humain. Et les bourgeois pavent l'enfer des autres avec tant de candeur, d'innocence et de belles intentions...

La leçon
Dans la leçon, c'est l'absurdité de l'enseignement qui est présenté de manière surréaliste.
Ionesco y montre l'enseignement en soi. le travail du professeur qui enseigne sans avoir quoique ce soit de réel à enseigner. À force d'enseigner, il a, avec ses confrères, développé une sorte de certitude qu'il existe une réalité derrière tout ce fatras insignifiant dont il bombarde sa pauvre élève.
On reconnaît aisément le phénomène du « pelletage de nuage » si fréquent dans les universités, phénomène plus actuel que jamais, avec nos théories de la justice, de linguistique, de musicologie, etc., qui font tant de bruit, mais exclusivement dans nos universités et qui ne troublent que les intellectuels de chaises berçantes.
On s'amuse donc ferme tout au long de la pièce, surtout si on a fait un passage à l'université.
La tournure tragique des évènements me semble toutefois forcée. Ionesco semble s'être laissé entraîné par l'exigence du genre auquel il souhaitait appartenir plutôt qu'au contenu de sa pièce. le professeur déconnecté du réel pourra certainement ignorer complètement la réalité et les besoins vitaux de son élève, mais il aurait été bien plus intéressant que le professeur laisse plutôt mourir son élève de faim ou de soif qu'il la tue platement et bêtement avec un couteau.
Désolé d'avoir donné la conclusion, mais je me suis permis, exceptionnellement, de le faire étant donné qu'il s'agit du moment le moins intéressant de la pièce.
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Théâtre de l'absurde. Comment parvenir en simplement un billet de blog à vous offrir une critique de cette pièce de théâtre ? Je ne sais pas si cela est réellement possible.

Au premier niveau de lecture, nous rions. Nous rions d'un rire franc sans équivoque. Toutefois, lorsqu'on essaie de creuser davantage sous cette couche de rire qui n'est en réalité qu'un fard pour un message plus profond ; nous découvrons un Ionesco philosophe et critique de la langue. En effet, Ionesco souhaite nous parler des problèmes inhérents à la langue et toute sa pièce repose sur cette réflexion. C'est pour cette raison que les dialogues de la pièce ne sont en réalité que des monologues. Les personnages se parlent mais ne s'écoutent pas. Ils se contredisent parfois. Les conversations tournent à vide jusqu'à ne devenir que des sons. Les mots ne sont plus que des sons sans sens … nous assistons à l'assassinat du langage.

M.Smith: Kakatoes, kakatoes, kakatoes, kakatoes, kakatoes...
Mme.Smith: Quelle cacade, quelle cacade, quelle cacade...
M.Martin: Quelle cascade de cacade, quelle cascade de cacade, quelle cascade de cacade...

La cacophonie ambiante nous montre alors l'absurdité du langage. Nous parlons, nous n'entendons guère ou alors nous entendons uniquement ce que l'on souhaite bien entendre.

Le contexte : une vie quotidienne, des scènes tirées d'un quotidien à nous arracher les cheveux du fait de leur absurdité. L'intrigue est difficile à trouver, à résumer et c'est tout à fait normal puisqu'il s'agit de théâtre de l'absurde. Il n'y a pas vraiment de logique à tout ce qui s'enchaine toutefois il y a du rythme. Ionesco est parvenu malgré l'absurdité du tout de la pièce à créer du rythme. le spectateur prend part à cette pièce et est captivé par celle-ci.

Alors voilà il est difficile d'en dire plus et je pense que Ionesco ne voulait pas qu'on en parle trop, d'autant plus si c'est pour nous perdre dans des explications, des analyses … absurdes. le théâtre de Ionesco est un théâtre qui se voit, qui s'entend et qui se vit. J'ai eu la chance de me rendre au théâtre de la Huchette à Paris pour assister aux pièces La Cantatrice Chauve et la Leçon qui sont magnifiquement interprétées. Je vous recommande ce théâtre qui ne fait que ces deux pièces : fous rires garantis !

Je recommande cette pièce à des esprits éveillés, des personnes qui ne possèdent pas d'oeillères et qui sont prêtes à aller au-delà du théâtre classique… En tout cas, moi je ris toujours autant devant des pièces de Ionesco.

Lien : http://leslescturesdespleenl..
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Peut être la meilleure pièce de Ionesco. Pour l'anecdote le titre vient d'une bévue d'un des comédiens qui devait dire à l'origine quelque chose de totalement différent et qui par oubli finit par exprimer cette phrase. Cela plut à Ionesco qui décida de nommer la pièce ainsi, ce qui renforce le caractère absurde qui habite la pièce.

C'est du Ionesco donc indescriptible mais il est intéressant de noter certaines thématiques sous jacentes à l'humour absurde : critique des classes sociales, vacuité du quotidien, uniformisation des rapports sociaux, une certaine critique de l'existentialisme et une quête de sens parfois vaine.

C'est drôle, et cela me fait rire à un point que je peux difficilement le lire dans un lieu public. Cependant il faut apprécier l'illogique, le loufoque, l'incongru et se laisser parfois porter. C'est la pièce qui m'a fait être véritablement fan de Ionesco.

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Ce sont donc deux fleurons du théâtre de l'absurde qui sont ici réunis dans un seul et même ouvrage.

Avec la Cantatrice chauve, nous entrons dans le salon anglais d'un couple de bourgeois, anglais of course, qui accueillent ce soir un autre couple de bourgeois, anglais of course.
Et s'active dès lors un des plus beaux dialogues de sourd qu'on puisse imaginer.Parce que le grand Eugène eut l'inspiration de cette anti-pièce, comme il la nomme lui-même, en tentant d'apprendre l'anglais. Les poncifs du genre "My taylor is rich. Brian is in the kitchen. The flowers are beautiful" assénés dans le désordre, bout à bout sans réel sens, ont donc fait le lit de cette comédie, devenue depuis une des références en absurdie.
Parfois, la suite de commentaires sur les réseaux sociaux me font penser à cette pièce. Prenez un post avec beaucoup de commentaires (un post "presse" généralement) et lisez les commentaires les uns à la suite des autres... Un régal !
Petit bonus, par les temps qui courent, la tirade de l'anecdote sur le rhume racontée par le pompier est juste savoureuse en soi.

Avec la Leçon, on passe dans le tragi-comique à travers une satyre de l'enseignement aveugle et formaté, où l'on croise un professeur chargé d'enseigner à une élève pas très futée les fondamentaux des mathématiques et de la linguistique. Ce sera à coup de fausses vérités, de phrases toutes faites, de sentences absurdes,... que le professeur tentera de faire entrer des pseudo-connaissances dans le cerveau de plus en plus fragilisé d'une jeune fille qui comprend de moins en moins. Certains y verront une parodie de l'enseignement en général, universitaire en particulier. D'autres verront plus large et pourront, dans le contexte de notre époque, y voir les dérives de la communication et des médias en particulier, dans un monde où les masses se gavent de médias sociaux au fur et à mesure qu'elles perdent leur sens critique.

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Si vous voulez de l'original, de l'étrange, du délirant, du comique et de la folie, lisez ou allez voir La Cantatrice chauve. C'est une pièce où vous vous demanderez ce que vous faîtes-là, si les comédiens ne sont pas sortis d'un hopital psychatrique et si vous aussi n'avez pas attrapé le virus. Mais rassurez-vous! Ionesco répond à une question complexe : pourquoi (et pour qui) communique-t-on? Et rien de plus simple que d'y répondre en faisant dire n'importe quoi à ses personnages. On sait qu'il s'est aidé de la méthode assimil en anglais, ce qui permet de comprendre le caractère...anglais de la pièce. L'ensemble reste un jouyeux foutoir qui se termine en apothéose du langage. A lire absolument.
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Il semble que Ionesco ait toujours eu du mal à maîtriser la langue anglaise mais il s'est inspiré de ses tentatives pour y remédier dans cette pièce dont les clichés, platitudes, répliques absurdes, vides de sens sont tirés de la méthode Assimil. Evidemment, Ionesco est bien plus drôle car cette pièce est un petit bijou d'humour absurde, de non sens, d'incohérences d'un écrivain pince sans rire qui trouve là l'occasion d'évoquer la vacuité de la parole, du langage en général et des relations humaines. A la fin d'une conversation décousue, un personnage termine en remerciant ses hôtes pour avoir "passé un vrai quart d'heure cartésien".
N'y cherchons pas intrigue et psychologie, le personnage éponyme est absent, les personnages sont creux mais tellement drôles dans le sérieux avec lequel ils mènent des conversations vides et quel régal !
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Je me souviens très bien de cette pièce!! Je faisait que de rigoler. Je l'avait lu en cinquième. Les qui propos futiles s'enchaînent et les redondances sont des plus comiques. Les incohérences défilent aux rythmes des personnages. le tout est bien mené, même si on a l'impression de perdre son temps en lisant ce livre (on revient au début au final), on s'amuse bien.
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