Mr Stevens, le majordome qui est le protagoniste principal de ce roman est comme nous tous a la recherche de son estime de soi, du sens de la vie, du bonheur et tout ca... qu'il croit trouver en devenant ce qu'il appelle un "grand majordome", celui de Lord Darlington ("Sa Seigneurie"). Pour lui, cela signifie etre efficace bien-sur mais aussi "digne" c'est-a-dire capable de garder son flegme (britannique, of course) en toute circonstance. Jusque-la rien de tres particulier mais Mr Stevens ajoute encore une exigeance a la grandeur majordomesque: servir un maitre qui participe de maniere positive a l'histoire humaine car alors lui-meme devient un acteur historique positif en consacrant sa vie a servir ce maitre. Parvenu a etre un "grand majordome" Mr Stevens, sans s'en rendre compte, s'est enferré dans le piege d'une vie entierement consacrée a le devenir et rester. Pour cela, il a non-seulement renoncé a toute spontanéité dans les rapports humains au point de devenir une caricature de personnalité rigide, froide et obsessionnelle mais aussi sacrifié vie privée et donc sociale, amoureuse et affective.
A la fin du roman, Mr Stevens se rend compte de tout ce qu'il a sacrifié a l'idéal du "grand majordome", d'autant que le role historique de son maitre qu'il croyait positif est, entre-temps -manque de pot- devenu négatif aux yeux de la société. S'il est trop tard pour réparer les pots cassés en amour et affection manqués, il décide de retrouver autant que faire se peut la spontanéité dans les rapports humains, ce qu'il appelle la capacité de "badiner".
Voyageur, si tu cherches un roman d'amour sur fond de manoirs anglais ou un trou de serrure sur les secrets d'alcoves de l'aristocratie anglaise, "
Les vestiges du jour" n'est pas pour toi. Loin d'etre anodin, ce roman est une lecon de vie, une parabole sur le sens de la vie.