Citations sur Mortagne, bourreau, tome 1 : Le Brasier de justice (44)
La justice des hommes était le biberon qu’on faisait miroiter aux pauvres ou aux faibles d’esprit pour leur faire accroire que l’on prenait soin d’eux. La justice des hommes ne concernait pas les vrais puissants, sauf lorsqu’ils étaient assez bêtes pour que leurs forfaits s’étalent aux yeux de tous.
(J’ai lu, p.365)
Votre pardon messire mire ! Cette mienne indélicatesse me fait rougir d'encombre ! Votre Pardon en vérité Messieurs.
…fier comme un poul
« Poul », masculin de « poule » à l’époque, c’est-à-dire « coq ». De la dérive notre expression actuelle, incompréhensible, « fier comme un pou ».
(Note de bas de page, J’ai lu, p.125)
Marie de Salvin le fixait, un rideau de flammes les séparant. Une médaille étincelait à son cou. Pourtant, on enlevait leurs bijoux aux condamnés. Ses longs cheveux couleur de blé mûr cascadaient jusqu'à sa taille. Pourtant, on les lui avait coupés à la hâte. Le silence. Un silence compact. Le brasier était muet. Aucun son, nul rire ne sortait des bouches ouvertes des badauds assemblés pour assister à son exécution. Il lui souriait, semblant inconscient du feu qui allait la consumer. Il s'entendait alors déclarer avec un calme joyeux :
- Je ne vous ouïs point, ma mie. Votre pardon.
Elle souriait à son tour et, entre deux langues roux-jaune de feu, lançait :
- Peu importe, mon doux, attendons le demain.
Leurs deux voix enchâssées dans un univers de silence.
Marie de Salvin le fixait, un rideau de flammes les séparant. Une médaille étincelait à son cou. Pourtant, on enlevait leurs bijoux aux condamnés. Ses longs cheveux couleur de blé mûr cascadaient jusqu'à sa taille. Pourtant, on les lui avait coupés à la hâte. Le silence. Un silence compact. Le brasier était muet. Aucun son, nul rire ne sortait des bouches ouvertes des badauds assemblés pour assister à son exécution. Il lui souriait, semblant inconscient du feu qui allait la consumer. Il s'entendait alors déclarer avec un calme joyeux :
- Je ne vous ouïs point, ma mie. Votre pardon.
Elle souriait à son tour et, entre deux langues roux-jaune de feu, lançait :
- Peu importe, mon doux, attendons le demain.
Leurs deux voix enchâssées dans un univers de silence.
Il lut pour la millieme fois sur les visages le meme deroutant melange d'emotions:degout meprisant pour lui et joyeuse ferocite pour le spectacle qui allait suivre
Je suis en paix, innocente...je tiens à vous voir jusqu'à la dernière seconde.Vous, ce prêtre et cette foule. Vous serez le visage de l'iniominie, celui que j'emporte dans la tombe.
La tête désagréablement légère, il erra sans but dans Mortagne et n’aurait su préciser combien de temps. Deux pensées contradictoires tournaient en rond dans son esprit, se heurtant, s’interpellant : il n’avait pas jugé et n’était en rien coupable de la mort d’une innocente ; mais comment n’avait-il pas perçu sa sincérité, peu avant de la ligoter ? Pis : pourquoi ne s’était-il pas une seule seconde interrogé sur la fermeté de cette femme dont l’unique urgence en cet instant, alors qu’elle allait mourir d’affreuse manière, se résumait à ce qu’on la croie ? Si seulement elle avait menti, admettant un parjure qu’elle n’avait pas commis, tous y auraient vu repentance, et elle aurait été prestement décapitée. Toutefois, son honneur, celui de son défunt mari, lui importaient plus que la terreur et la souffrance.
S’il avait été au bout de son raisonnement, cadet-Venelle aurait admis que l’extrême solitude des exclus et sa différence infamante aux yeux de tous le flattaient, même si elles le meurtrissaient. Sacrifié sur l’autel de la justice, conspué alors qu’il rendait service à tous. Un fauve devenu agneau sacrificiel. Le destin, toujours.
Lorsque Hardouin et Célestin traversèrent la place au pas lent de Fringant, les têtes se détournèrent sur leur passage.