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Critique de Christophe_bj


Le narrateur, Jacques Rodenbach (comme le poète belge), a connu Louis Gilet, dit P'tit Louis, au collège et au lycée dans les années quatre-vingt. Bien plus tard, il a la surprise de le revoir au journal télévisé régional de France 3, en tant que poète ayant pour pseudonyme Zéphyr. Puis, en 2014 un entrefilet du journal Ouest France signale que Zéphyr a été porté disparu au Tibet (comme Tchang...). le narrateur, qui vient d'être licencié de l'entreprise d'import-export dans laquelle il travaillait, décide d'en savoir plus, puis de mener une véritable enquête afin de publier un Tombeau de Zéphyr, chez un éditeur qui accepte l'ouvrage à condition de ne pas avoir à trop dépenser pour ce faire. ● Dans la lignée de son précédent ouvrage, Rééducation nationale, Patrice Jean nous offre ici une satire à gros traits de la société actuelle, en un peu moins mauvais quand même. Les « intellectuels de gauche », les adeptes du « vivre ensemble », les thuriféraires du wokisme en prennent pour leur grade. ● Un raté, musicien maladroit d'un groupe de métal adolescent, les « Belzébuth Carnivores », devenu entre temps coiffeur, va pouvoir connaître son quart d'heure de célébrité en tant que poète, malgré les piètres vers qui nous sont cités, grâce aux efforts conjugués d'une belle éditrice, Alice Liu, et d'un spécialiste du marketing, qui disent à P'tit Louis, alias Mike the Fool, alias Zéphyr, à quelles actions de rue participer pour se faire remarquer. ● Ainsi encensons-nous des minables qui trouvent leur chemin grâce à l'alliance objective des cultureux de gauche et du capitalisme cupide. ● J'ai l'impression que Patrice Jean, qui nous a donné quelques romans excellents, La Philosophie selon Bernard, L'Homme surnuméraire, La Poursuite de l'idéal, ou encore le Parti d'Edgar Winger, se laisse emporter sur la pente de la facilité, s'éloignant de la finesse dont il est capable, pour aller vers la grosse farce kitsch, qui menaçait de façon sous-jacente dès le début de son oeuvre. ● On est ici dans la caricature grasse et lourdingue qui ne fait même pas sourire, malgré quelques allusions littéraires pseudo-savamment placées comme « C'était donc ça, une vie » (Maupassant), « Télaime-sur-Rouergue » (Rabelais) et « Il faut imaginer P'tit Louis heureux » (Camus), par exemple, et malgré l'emploi du subjonctif imparfait, qui n'est pas exempt de quelques dérapages comme : « Les spectateurs applaudirent mollement à la fin des échanges, redoutant sans doute que nous reprîmes une controverse qui n'intéressait personne » au lieu de « que nous reprissions ». Quand on joue à ce petit jeu, mieux vaut ne pas faire ce genre de bévue… ● Cela donne des passages comme : « P'tit Louis fut l'un des derniers à s'en aller du salon. Même le stand des juifs homosexuels était presque vide. Avant d'abandonner son emplacement, P'tit Louis entendit qu'on sifflait, il se retourna et aperçut Francis Tabarin qui clignait de l'oeil. Il demeura interdit : que lui voulait le petit moustachu ? C'est alors qu'il sursauta de dégoût à la vue d'une petite bite toute molle s'échappant de la braguette de Tabarin, lequel souriait bizarrement comme s'il offrait au regard de Louis Gilet la Septième Merveille du monde. » C'est censé faire rire ? ● Ce n'est pas parce qu'on publie dans une collection qui s'intitule « Borderline » qu'on peut faire n'importe quoi… Comme dans Rééducation nationale, Patrice Jean tenait là un sujet pouvant donner naissance à une caricature pleine de finesse ; il a choisi la grosse caisse au détriment de l'orchestre de chambre… J'espère seulement que ses prochains ouvrages renoueront avec ceux que j'ai cités et que j'ai eu plaisir à lire.
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