Tutoiements

-Tutoiement pédagogique-

Elle le tutoie à son tour, en lui disant bonjour, et cela fait un drôle d'effet. Pourquoi ? parce qu'elle est une femme et que la familiarité prend avec elle une nuance un peu plus transgressive. (p.94)

Puis, au bout d'un moment, je pense au tutoiement de cette fillette. Normal à son âge. Elle doit avoir entre six et huit ans. Et moi, avec mes soixante-dix, je viens de l'entendre m'interpeller de sa petite voix musicale, sur le mode de la familiarité la plus directe. Elle voit sans doute en moi un grand-père. Mais plus probablement elle tutoie tout le monde. Elle ne sait pas que le -vous- existe. Elle va l'apprendre. Elle l'apprendra toujours assez tôt. Pour l'instant, elle ne sait que tutoyer, et me voilà tout à coup, à un moment de ma vie où cela sonne plutôt drôlement, enrobé dans ce tutoiement enfantin, désarmant de spontanéité. (p. 8, Arléa, 2000)

(...)mais que le plus beau tutoiement de tous les domaines reste celui de Marguerite Duras dans -Hiroshima mon amour-:
Tu me tues, tu me fais du bien. (p.122)

J'ai connu un vieux baroudeur politique qui ne cessait de dire que le tutoiement était la plus belle conquête des révolutions. L'égalité et la fraternité n'étaient, à ses yeux, nulle part plus fortement inscrites que dans ce -tu" qui devait un jour devenir obligatoire dans le monde de la "camaraderie" communiste. Obligatoire et spontané en même temps, ce qui n'est pas toujours aussi simple qu'on pourrait le penser. Et quelquefois assassin, remarquait-t-il. Mais il aimait à rêver sur ce tutoiement de camarades. (p.51)

[Correspondance amicale entre Simenon et Fellini]

Les années ont passé. Les rencontres sont toujours rares. Mais la correspondance suivie a offert un terrain fertilisant au tutoiement. (p.121)

-[Tutoiement policier]

Quel est ce tutoiement-là ? Il a dû traverser des siècles, mais il n'est pas celui de l'amitié...Il semble retentir de tout un monde où l'on voit des serviteurs, des domestiques, des portiers, des paysans, des gens de la rue insolemment apostrophés par les hommes bottés et coiffés de casques blancs. (p.77)

- Tutoiement religieux-

Ce tutoiement de Dieu est-il une bonne chose ? Pourquoi pas ? Après tout, la familiarité avec le divin est rassurante, et Dieu peut bien être considéré comme un ami, un proche, un parent, un père surtout. N'empêche, dans ma lointaine enfance, j'avais un sentiment de révérence à son égard qui n'autorisait que le Vous. Mais peut-être était-ce un simple préjugé d'époque, de moeurs. (p.104/ Arléa, 2000)

....Je pense au tutoiement de cette fillette. Normal à ce âge. elle doit avoir entre six et huit ans....Elle ne sait pas que le "Vous" existe...Ce tutoiement
qui nous fait franchir, d'un petit saut de syllabes, la barrière de l'âge et des âges...

[Tutoiement] amoureux

....une vérité simple et lumineuse. C'était qu'en amour on ne peut progresser que du -vous- au -tu- et pas l'inverse.

(p.36, Arléa, 2000)

[Tutoiement] amoureux

-Et quand on respecte quelqu'un, on le tutoie pas ?
-C'est tout le problème.

(p.40/ Arléa, 2000)