Citations sur La Jurée (90)
Il en faut de la lâcheté pour ignorer la douleur des autres. Pire, pour l'utiliser comme excuse.
- T'as toujours cru que t'étais la grande sœur qui prenait soin de moi. Mais ça marchait dans les deux sens. Moi aussi, dans l'ombre, je veillais sur toi.
Les premières semaines, il avait l'impression que ça [le traitement] empirait son état. La nuit, il faisait des cauchemars atroces, mais avec le temps c'est devenu une béquille.
- Les antidépresseurs, ça n'enlève pas la douleur, mais ça aide à bouger.
(p. 86)
J'ai tant détesté ma mère de nous priver de nos repères, de notre père, que je n'ai pas entendu sa propre douleur. C'est le privilège des enfants. Ignorer la peine de ceux qui les élèvent. Ne leur accorder qu'une attention limitée.
Tous les professionnels du tribunal portent un costume par-dessus leur tenue de ville : la robe noire des avocats, celle des assesseurs à côté de moi, la robe rouge de la présidente, l'uniforme bleu des policiers. Moi aussi, j'aurais aimé un déguisement pour m'aider à jour mon rôle de jurée.
(p. 36)
C'est facile de dire que c'est la faute de F, qu'il n'aurait pas dû s'endetter, lance L, énervé ... Pourquoi il y a de la pub partout si c'est mal de consommer ? Pourquoi on nous file de l'argent s'il faut pas emprunter ?
Écran plan, console de jeu, montre connectée, smartphone de dernière génération, ...
_ Il n'y a rien de mal à vouloir un objet et à faire un crédit pour l'acheter. C'est même grâce à ça que le monde tourne.
Quand la présidente lui explique qu'il ne s'agit pas de reprocher à F. ses choix de consommation mais d'en comprendre les conséquences, il hausse les épaules.
[Elle] est déjà partie, partie sur les routes serrer la main à des blouses blanches, leur vendre ses probiotiques qui ne soignent rien mais font du bien, paraît-il, à qui, on ne sait pas, peut-être à des gens qui ont le ventre noué de vide, comme nous, et des plaques rouges qui grattent, comme moi.
(p. 71)
Ne pas se sentir gêné [e] par soi-même est bien plus facile que de passer son temps à hésiter, s'excuser, se cacher.
On oublie tous des milliers de choses chaque jour. Un produit sur la liste de courses, le prénom d'un collègue, le titre d'un film, l'odeur d'une personne aimée. Nos souvenirs sont des châteaux de sable. C'est physiologique, c'est salvateur, qu'une vague passe, puis une autre, que ça déborde.
- C'est facile de dire que c'est la faute de Fred, qu'il n'aurait pas dû s'endetter, lance Ludovic, énervé, après avoir décliné son identité. Mais en vrai faut s'en prendre à la société. Pourquoi y a de la pub partout si c'est mal de consommer ? Pourquoi on nous file de l'argent s'il faut pas emprunter ? Fred, il avait plus de boulot, il se sentait pas bien, c'était sa manière de compenser. (...) Il n'y a rien de mal à vouloir un objet et à faire un crédit pour l'acheter. C'est même grâce à ça que le monde tourne.
(p. 126)