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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le narrateur de ce roman, très probablement largement autobiographique, a onze ans à son début. On est en 1979 et il habite Paris. Ses parents, auvergnats d'origine, tiennent un hôtel dans une rue un peu louche du quartier de Bercy. A vrai dire, c'est aussi un hôtel de passe et l'arrestation de la mère du garçonnet ouvre le roman.

Un peu à l'exemple d'Annie Ernaux avec « Les années », Philippe Joanny déroule le fond politique et social des années 1979 à 1984. C'est la prise de conscience difficile de sa singularité qui occupe les pensées du narrateur : il est attiré par les hommes et se sent douloureusement différent et insuffisant, au physique comme au moral. Avec en plus le spectre du SIDA comme horizon proche et les discours effrayants et culpabilisateurs qui fleurissaient alors que les caractéristiques de cette maladie étaient encore inconnues.

Petit à petit, l'arrière-plan familial se précisera. Les manques dont souffre le narrateur ont leur origine dans les vies, pas faciles aussi, de ses parents. C'est un mélange d'amour-haine qu'éprouve le garçonnet puis l'adolescent envers eux. Pourtant ce roman, qui sonne tout le temps juste, ne peut être réduit à un règlement de compte. Il y a une part d'impudeur, bien sûr, mais pas de complaisance pour une position victimaire, comme on a pu le lire ailleurs depuis quelques années.
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J'aime l'ambiance de ce premier roman de Philippe Joanny. Dans "Comment tout a commencé" on n'est pas dans les clichés d'un Paris touristique mais dans un quartier en train de se transformer où grandit un jeune garçon.
Ce n'est pas courant, mais il vit dans un hôtel, l'Hôtel de Bourgogne que tient ses parents (enfin surtout sa mère) près de la gare de Lyon, rue d'Austerlitz. Car Annick et Gérard sont venus s'installer à Paris pour gagner l'argent de leur retraite, avant leur retour en Auvergne.
Entre une mère surmenée, un père raciste et alcoolique et un petit frère avec lequel il ne partage pas grand-chose, le gamin tente de comprendre ce qui se passe en lui, qui il est.
Il aime enfiler les escarpins de sa mère en cachette alors que les tongs avec des marguerites qui lui fleurissent les pieds l'enchantent et il ne les cache pas. Il aime aussi broder des pétales de rose sur un canevas. Pas très original pour montrer la découverte de son homosexualité et dans le genre les romans de Philippe Besson sont plus convaincants.
Mais la particularité de cette autofiction, c'est le changement d'époque avec l'arrivée du sida et sa cohorte de peurs et de morts.
C'est donc un garçon à vif qui s'interroge sur sa place, sa différence mais aussi sa soif d'aimer dans un climat homophobe. Il voit la société changer avec l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand en 1981. Il voit aussi sa ville changer avec la construction de nouveaux quartiers ou encore la construction de l'opéra Bastille, ville qu'il ne veut pas quitter pour y vivre son homosexualité dans l'anonymat qu'elle lui offre.
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Fin des années 70 - Début des années 80, Giscard achève son mandat présidentiel, Mitterrand entretient l'espoir et le FN s'invite. Dans la rue d'Austerlitz, proche de la Gare de Lyon, cerné d'autres hôtels, de prostituées dans les rues et d'enfants jouant sur les trottoirs, se dresse le Bourgogne, un hôtel modeste tenu par Annick. Elle est obèse et épuisée, aussi affectueuse qu'un balai brosse, mariée à Gérard, beauf alcoolique, raciste et homophobe et a deux fils. L'un est modèle, l'autre est complexe.
Philippe a onze ans.
Philippe, c'est le gamin, le complexe, en plein chamboulement hormonal, inquiet de se découvrir différent, attiré par son ami, le fils d'un client ou le voisin. Pas facile à cette époque d'avouer ou d'afficher son homosexualité alors qu'elle est socialement réprouvée, fustigée et moquée. D'autant plus qu'émerge ce foutu « cancer gay » !
Le manque d'amour, la solitude, la différence, le regard des autres, les propos de ce père qu'il déteste, de cette mère complice construisent le gamin. Personne à qui parler alors qu'il y aurait tant à dire. Parler de ce SIDA et de la mort qu'il sème telle une punition divine, ce mal contagieux qu'il pourrait attraper, lui l'homo, le fils indigne.
Les années s'écoulent sur la description douce-amère d'une société bouleversée, un monde en mutation sociale et politique. Philippe étouffe. L'auteur Philippe Joanny (Philippe le gamin ?) livre ses angoisses, ses interrogations face à ce qu'il devient ou souhaite ne jamais devenir, s'affirme et porte un regard vif et lucide sur l'intolérance et ses conséquences.
Les mots sont nets, l'écrit sans concession. Brut. Comme les descriptions du sexe, les premières expériences, l'envie des corps, les sens. La haine. L'émergence d'une pensée propre. La nécessité d'être soi. Contre eux. Tous.
Ce roman, je l'ai dévoré.
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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J'ai reçu le premier roman de Philippe Joanny dans le cadre de la masse critique du mois de janvier organisée par Babelio. Je remercie les éditions Grasset pour cette découverte !

Nous sommes à la fin des années 70, à Paris. le jeune Philippe vit non loin de la gare de Lyon, rue d'Austerlitz, à l'hôtel de Bourgogne, avec sa mère Annick, son père Gérard et son petit frère Rémi.

La rue est animée, grouillante de vie. Il faut dit que les parents de Philippe ne sont pas les seuls à tenir un hôtel, la rue en est truffée. La vie est donc rythmée par les allées et venus de chacun : les patrons, les clients, les gamins, les voisins, les filles qui tapinent.

Les parents se Philippe ne s'entendent pas, ou plus. Ils n'ont pas l'air de s'aimer non plus d'ailleurs, ou plus peut-être, on ne sait pas trop. Philippe est comme tous les enfants en apparence, il se chamaille avec son frère, il aime jouer avec ses copains. Mais il est aussi très observateur, très sensible. Il ne supporte pas le comportement de son père, colérique, alcoolique, vulgaire, raciste et adultérin. Il le déteste, disons-le. Avec sa mère c'est plus compliqué. Il ne supporte pas de la voir souffrir, mais il n'arrive pas non plus à aimer comme il faudrait cette femme qui n'a jamais eu de geste tendre pour lui.
Les gestes tendres, il en rêve... mais ils viennent pas de sa mère. Il rêve de garçons. Et ça, très tôt. Et ça, au moment où le Sida fait son apparition et entame son oeuvre mortelle.

J'ai été très touchée par l'écriture de Philippe Joanny. Précise, juste et souvent acerbe. J'ai eu aussi par moment du mal à rester plongée dans cette histoire, moi qui, à cette époque, n'allait naître que 20 ans plus tard. Moi qui ait grandi dans une société où le sida s'est presque "normalisé" mais où l'homophobie est encore hélas trop présente, j'ai eu la sensation d'assister à quelque chose dont je connaissais déjà l'issue. Je voyais ce jeune homme, avec ses peurs face à ses désirs et cette société dont il était persuadé qu'elle ne l'accepterait jamais ; j'aurai aimé lui dire que tout allait s'arranger, mais j'étais tout aussi impuissante que lui.

J'ai vu dans plusieurs avis que les passages les plus crus quant aux désirs et à l'imaginaire du garçon mettaient mal à l'aise. Je ne rejoins pas totalement ces avis dans la mesure où certes, quand on est soi-même hétéro-normé(e), il peut ne pas être évident de transposer nos propres désirs face au sexe opposé dans le cadre d'une relation/d'un esprit homosexuel(le). Mais il n'y a rien de cru ni de vulgaire. Juste un ado qui découvre avec joie et douleur sa sexualité. Rien de bien extravagant finalement :)
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La quatrième de couverture m'avait Donné envie... mais, je reste dubitative. J'ai eu parfois du mal, envie d'aller plus vite. Et puis, finalement je me suis prise au jeu. J'ai apprécié le climat parisien, social et l'époque dans lesquels se déroule l'histoire. J'ai le même âge que le narrateur, et je partage donc avec lui des souvenirs, la musique, les hommes politiques, l'arrivee du sida...un bon moment tout de même.
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Elles s'appellent Carole, Claudine, Lisette, Léa. En rentrant de l'école, il leur fait parfois une bise. Il a bien compris qu'elles tapinaient, mais elles ont toujours le sourire et un petit mot gentil. Sa mère leur loue souvent des chambres, il faut bien faire tourner la boutique après tout. le jour où un inspecteur de police s'invite chez eux au beau milieu du repas, ça lui semble démesuré. C'est si grave que ça ? Assez pour qu'on conduise Annick au poste. Pas la peine de compter sur Gérard pour les réconforter, son petit frère et lui. Gérard est un con, un con aviné doublé d'un beauf méchant. Un con qui aboie de loin et laisse la culotte à sa femme. Il faut dire qu'elle a du répondant, Annick. Ces deux-là se détestent. Gueularde, bornée, minée par son poids, il lui arrive toutefois de virer au romantisme poussiéreux. Dans les yeux du narrateur, elle est quand même belle, sous ses cheveux crêpés durcis à la Cadonett, engoncée dans son gros manteau rouge.

Dans ce Paris qui va voir naître l'année 1980, plus proche des Deschiens que d'Amélie Poulain, évolue Philippe, petit bonhomme de 11 ans. Dans cette drôle de cellule familiale bruyante et crasseuse, il apprend la vie. Ce qu'il y a derrière les façades grises de la rue d'Austerlitz, derrière les non-dits, les rires ou dans les journaux. L'actualité n'est pas reluisante : le FN monte et le monde s'inquiète du « cancer gay », cette nouvelle maladie qui touche les homosexuels. Philippe aussi aime les hommes. Mais il a tout intérêt à garder ça pour lui. Sa mère serait bien trop triste et son père en ferait une syncope. Ça, ce serait une bonne chose, cela dit. À mesure que le temps passe, ses hormones le travaillent. Voyeur, obsédé comme peut l'être un ado, il officie secrètement et parvient à contenter ses pulsions, et nourrit sa haine du paternel déchu. Mais comment vit-on dans le silence et la honte ? La solitude et l'incompréhension ? le fils indigne a-t-il droit à la parole ?

Entre crise identitaire, drame social et satire familiale, ce roman porte un regard intelligent sur une décennie qui a vu le pays culturellement et idéologiquement chamboulé. Les mots, choisis, piquants, vous arriment au personnage principal qui découvre et se découvre. Si certaines situations et réflexions prêtent à sourire, c'est la justesse, surtout, qui épate. Ce « tout » de Comment tout a commencé, c'est la naissance au milieu de la mort, le besoin de reconnaissance noyé dans l'indifférence, et des lendemains qui n'auront jamais la saveur des jours passés. L'enfance qui claque la porte au nez de l'âge adulte qui n'était pas prêt. Des petites histoires dans la Grande. À travers la bouche d'un gamin qui joue les funambules entre fatalisme et espoir, Philippe Joanny signe là un premier roman entraînant, qu'on croirait écrit sur le fait tant le bouleversement se ressent à chaque chapitre. Sans excès ni complaisance, nostalgique, brut et beau.

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En explorant les mécanismes du désir, Philippe Joanny nous livre un portrait juste et émouvant d'un jeune adolescent homosexuel qui grandit avec la menace croissante du SIDA dans le Paris de la fin des années 1970. Admirant sa mère et honnissant son père, le jeune héros se voile puis se découvre et se comprend. Les différents sentiments qu'il éprouve sont finement analysés et retranscrits par l'auteur.
Alternant habilement narration interne et omnisciente, écrit dans une prose fluide et agréable, j'ai dévoré en quelques heures Comment tout a commencé.

C'est le récit d'une tranche de vie ancrée dans le réel, presque documentaire. Je suppose qu'il ne plaira pas aux lecteurs friands d'actions et d'intrigues, mais personnellement, j'ai beaucoup apprécié cette plongée dans un Paris que je n'ai pas connu.

Merci à Babelio et à Grasset pour cette découverte !
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