Citations sur Un chemin de tables (33)
Master chef, oui chef !, un dîner presque parfait, le meilleur pâtissier du monde - tu vois bien que quand on parle de cuisine, on ne parle pas du reste, de tout ce qui va mal dans le monde ; tu vois bien que je l’intérêt porté à la gastronomie n’est jamais si fort que dans les périodes où les gens sont inquiets : ça rassure, ça rassemble, ça parle au corps, ça donne du plaisir, il y a du partage, du théâtre, de la vérité. Il ajoute assombri : la concurrence, la discipline, le mérite : tout le monde s’y retrouve, tou le monde se tient tranquille.
A quel moment exactement, le cours de sa vie s’affermit-il, durcissant cette piste-ci comme un futur possible ou désirable, celle-ci et non celle-là, celle-ci et aucune autre (...) ce sont des récits qui fabriquent une légende, ou concourent à inscrire une logique façon « tout petit déjà » (...) car de vocation, de voix qui appelle..., de passion qui tend le corps en une ligne dure, il n’en est pas question à l’époque.
Le travail de Mauro rappelle que , contrairement à l'idée commune, le cuisinier le plus doué, le plus inventif, le plus juste, n'est pas forcément celui qui métamorphose le produit mais peut-être celui qui le restitue le plus intensément.
Ce qui se joue à l'heure des repas est conçu comme un rapport au corps et une inscription dans le monde, l'idée d'une conscience de soi, autrement dit ce par quoi l'homme se distinguerait de l'animal...
Ce qui se produit durant ces heures compactées, dans cet espace réduit, est toute la fois une improvisation d'une grande intensité, une expérience sensorielle de haute volée et une confrontation avec la matière - matière organique, vivante, ultra réactive.
Transmise par la lignée maternelle, italienne, [la] culture de la commensalité (…) fait (…) surgir dans le paysage, aux côtés d’Anna, la mère, aventurière et raffinée, une grand-mère aux plats mythiques, conservatoire ambulant de la cuisine toscane, (…) deux figures quasi opposées (…) qui, ensemble, catalysent l’épopée de tout cuisinier : la création et la tradition, l’innovation et la coutume, l’étonnement et la simplicité.
Bientôt le voilà qui verse, casse, pèse, bat, broie, chauffe, mesure, transvase, manipule, pétrit, coupe, épluche, cuit, dispose, mélange, et reproduisant les gestes de l'adulte, le voilà qui prépare à manger pour les siens
Puisque d'emblée la cuisine induit les autres, induit la présence des autres contenue dans le gâteau comme le génie dans la lampe. Puisque la préparation d'un plat appelle immédiatement une table dressée, un autre convive, du langage, des émotions, et tout ce qui peut se jouer de théâtral dans un repas, depuis la présentation du plat aux commentaires qu'il suscite - borborygmes des convives bouche pleine et yeux écarquillés.
la plus grande violence de ce métier, tu sais, la plus grande violence, je trouve, c'est que la cuisine exige qu'on lui sacrifie tout, qu'on lui donne sa vie
Mon ami hausse les épaules: tu vois bien que quand on parle de cuisine, on ne parle pas du reste de tout ce qui va mal dans le monde ; tu vois bien que l'intérêt porté à la gastronomie n'est jamais si fort que dans les périodes où les gens sont inquiets : ça rassure, ça rassemble, ça parle au corps, ça donne du plaisir, il y a là du partage, du théâtre, de la vérité.