Citations sur Cher monsieur M. (20)
Film ou pas, il ne faut jamais mettre sur la couverture des photos des personnages d'un livre. Cela bride l'imagination du lecteur. Il est alors contraint d'associer les personnages aux visages des principaux acteurs du film. Quand on a commencé par voir le film puis qu'on a aussi envie de lire le livre par curiosité, ce n'est peut-être pas si grave. Mais quand on a d'abord lu le livre, on est confronté à un dilemme. En lisant, on s'est fait sa propre idée des visages des différents personnages. Des visages qu'on a eu le loisir d'imaginer soi-même. Malgré les descriptions des visages. En dépit de vos descriptions surabondantes de nez, d'yeux, d'oreilles et de couleur de cheveux, chaque lecteur compose les visages au gré de son imagination.
- Mais il y a des cultures, des religions, je n'ai pas besoin de les citer, qui se sentent très vite blessées, dit Van der D. Devons nous, nous censurer, tenir notre langue parce que quelqu'un risque de se sentir blessé ?
Les femmes ont plus de temps que les hommes. Quand elles ont passé l'aspirateur, elles ouvrent un livre - votre livre- et se mettent à lire. Le soir, au lit, elles lisent encore. Quand leur mari se tourne sur le côté et pose la main sur leur ventre, près du nombril, ou juste en dessous de leur poitrine, elles la repoussent. "Laisse-moi un peu, encore un chapitre", disent-elles en poursuivant leur lecture. Parfois les femmes ont mal à la tête, ou elles sont indisposées, parfois elles lisent un livre.
Soudain je suis de nouveau pris d'un doute. Nous sommes à présent confrontés à deux récits parallèles ou même trois. Des histoires à l'intérieur de l'histoire.
Vous même, vous en raffolez, vous en avez déjà parlé, vous en usez et en abusez dans " règlements de compte" et dans" l'année de la libération".
''Le trou noir n'existe pas, s'entend-il dire. Pas plus que le blocage de l’écrivain. Ce sont les lâches échappatoires des écrivains sans talent. A-t-on jamais entendu parler d’un menuisier qui a un blocage du marteau ? D'un menuisier qui après avoir posé un parquet ne sait plus s'il saura en poser un autre ?''
Il avait parfois entendu dire que le corps humain pesait vingt et un grammes de moins juste après la mort. Les croyants attribuaient cette différence de poids au départ de l'âme. Mais il n'était pas croyant, du moins il ne croyait pas à des âmes que l'on pouvait poser sur une balance.
Les femmes ont plus de temps que les hommes. Quand elles ont passé l'aspirateur, elles ouvrent un livre (...). Le soir, au lit, elles lisent encore.
Un écrivain doit avoir une femme belle et jeune.
S'il écrivait ce qu'il pensait vraiment, sous sa forme la plus crue et la plus frustre, ce serait terminé d'un seul coup. Les lecteurs, emplis de dégoût, se détourneraient de lui. Comme ils n'oseraient pas brûler ses livres, ils se contenteraient de les retirer de leurs étagères. Les librairies refuseraient de vendre ses ouvrages. [...] Dans certains cercles, sa popularité s'en verrait accrue. Des cercles au sein desquels personne, lui compris, n'a envie d'être populaire. Ces cercles feraient tout ce qui était en leur pouvoir pour s'approprier l'auteur et ses livres, mais ce ne serait pas si simple, les livres étant trop rebelles et l'auteur trop insaisissable. Les Pays-Bas se demanderaient à haute voix s'ils doivent être fiers d'un écrivain comme lui, si l'œuvre peut se détacher de l'auteur. Un "débat national" ! Nous en raffolons tous. Comme toujours, on fait alors deux poids, deux mesures. Ces mêmes deux poids, deux mesures en vertu desquels il y a des années, un maire socialiste d'Amsterdam a refusé à un écrivain néerlandais célèbre qui s'était rendu dans l'Afrique du Sud de l'apartheid l'accès à sa ville alors que ceux qui défendaient ouvertement les dictatures de gauche et les camps de concentration de gauche, à commencer par lui-même y vivaient en toute tranquillité.
« La littérature et les autres livres différaient encore sur un plan. Il s’agissait des mêmes aliments, mais ils provenaient de deux restaurants différents. A droite, le restaurant étoilé du guide Michelin, à gauche le Burger King ou le McDonald’s. Tout compte fait on ne tenait pas toujours à savourer des mets raffinés, on ne voulait pas planter tous les jours sa fourchette dans un minuscule morceau de foie gras sur une assiette par ailleurs presque vide. Parfois, on avait tout simplement envie d’un hamburger au bacon et au fromage fondu – mais cela s’accompagnait toujours d’un sentiment de culpabilité. D’un sentiment de culpabilité tellement envahissant que, lorsqu’on se rendait dans un Burger King, on lançait constamment des regards inquiets autour de soi pour vérifier si on apercevait une connaissance. Pris en flagrant délit ! Comme si on allait voir une pute. La lecture d’un thriller ou d’un polar donnait presque le même sentiment après coup : un grand vide. »