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Citations sur Ma bibliothèque : Lire, écrire, transmettre (16)

On ne demande jamais à un homme de définir l’écriture au masculin, sans doute parce qu’elle reste pour beaucoup de consciences d’essence masculine et que, si le livre est signé par une femme, il s’agit d’une anomalie que l’on tolère, bien décidé cependant à ne pas mélanger les torchons avec les serviettes. J’entends encore mon amie, Marie-Hélène Lafon, ulcérée par la fausse problématique, rugir lors d’une rencontre littéraire à Brives-la-Gaillarde : « Mais moi, monsieur, quand je crée, je suis tout : homme, femme, eau, feu, vent, terre. Oui, je suis tout ! » Elle fut sublime et le débat s’est clos sur ces mots non négociables.
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La fonction de bibliothèque est fondée sur un malentendu, à savoir qu’on irait à la bibliothèque pour chercher un livre dont on connaît le titre. […] mais il n’y a rien de plus révélateur et de plus passionnant que d’explorer des rayons […] et de trouver à côté du livre qu’on était allé chercher un autre livre qu’on ne cherchait pas et qui se révèle être fondamental (Umberto Eco, De Biblioteca - L'échoppe- 1986).

Ainsi je me souviens très bien que, cherchant un livre de Gary, j’ai découvert Sylvie Germain. C’était à la librairie Compagnie, dans cet antre magnifique occupé par Mme Josette Vial. Une autre fois, voulant racheter un exemplaire des Maximes, mon œil rencontra non le noble patronyme du duc de La Rochefoucauld, mais le nom aquatique de la romancière Linda Lê. La chose advint cette fois-ci à la Terrasse de Gutenberg à l’heure de la fermeture, dans cette belle librairie du faubourg Saint-Antoine tenue par une autre Circé, Michelle Farradou.
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"La littérature n'est qu'une reconnaissance de dette", écrit Linda Lê, "qui se renouvelle de génération en génération" (p. 23)
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Mes personnages ne sont jamais que les enfants nés de mes lectures. Il m’est impossible d’écrire sans avoir lu, parce que la tâche de l’écrivain commence avec ce patient arpentage des œuvres, crayon en main, cornant les pages, lisant à voix haute bien souvent. Un écrivain est avant tout un grand lecteur. Mais un lecteur qui a du vice : il perturbe le cours calme et suave de la lecture, crée un estuaire, et précipite les mots arrachés aux livres dans l’océan de ses travaux. Le roman en train de s’écrire est ainsi continuellement abreuvé par les très riches heures passées à fréquenter les textes des autres. Si les images et les mots volés viennent à manquer, la mer se tarit puis meurt. Le sel a rongé sa faune, sa flore. La page, son intention même, est devenue sèche, râpeuse. On ne crée jamais rien. On se souvient.
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Par l'écriture, Emily (Dickinson) rejoint l'autre, abolit l'absence, vit davantage: " J'aime être seule ici, occupée à t'écrire une lettre, et savoir si ta joie à la lire va être aussi grande, plus ou même moins grande que la mienne à la rédiger devient pour moi en cet instant un problème crucial" , confie-t-elle à Abiah Root en janvier 1852 (p.47)
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En pleine guerre de Sécession, Emily (Dickinson) possède une arme redoutable : le langage. Les mots sauvent ou tuent. Il n'y a pas d'alternative. Sa capacité d'émerveillement liée à sa puissance lecture du monde, de ses énigmes, est une invite à adorer le livre de celle qui a écrit....

L'ortie a triomphé partout
Les flâneurs ont épelé
L'orthographe solitaire
Des Morts Anciens
... pour se perdre sur l'ombreux sentier de sa grâce. (p.49)
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Mme de Sévigné écrivait un jour à sa fille cette phrase inouïe : « J’aime à vous écrire, c’est donc un signe que j’aime votre absence. » Écrire une lettre plutôt que de compter sur le téléphone, le sms, le mail, c’est faire confiance au temps, à la distance, et considérer ces données comme sacrées, puisqu’en raison des empêchements qu’elles induisent, elles confèrent au papier un caractère précieux que les autres supports n’ont pas. À la différence du courrier électronique, la lettre privée préserve intactes notre intimité et toute la grâce d’un certain secret. Mais surtout elle nie l’absence. Rend présent. Incarne.
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Les limbes de la bibliothèque c’est aussi la nouvelle géographie qu’il a fallu que j’invente pour certains volumes que ne pouvait plus contenir la bibliothèque. Il s’agit d’espaces intermédiaires où les mots et les images flottent et semblent attendre. Ainsi j’ai rangé une partie des livres d’art dans une niche creusée à même le mur de l’escalier qui conduit au premier étage de l’appartement.
(...)
L’escalier me sert de bibliothèque provisoire. À l’endroit où les marches présentent la surface la plus large, je dépose les derniers livres achetés après m’être adonnée à un petit rituel. Toujours le même. Sur la page de garde j’écris mon nom, la date et le titre du texte que je suis en train d’écrire. (Dans les limbes tout est fragile et fluctuant, alors on se rassure comme on peut.) Et puis il est amusant, en rouvrant un roman des années après, de se souvenir dans quel état nerveux nous étions alors, quel était notre rapport au sens, au temps, au dire, puisque l’œuvre avait été choisie une première fois pour aider à la rédaction du texte en cours. Il n’est pas rare que je lise cinq volumes tout frais débarqués de la librairie en même temps, ce qui me conduit à leur trouver des correspondances légitimes, alors qu’aucun lien naturel ne m’y autorise en principe. Mais l’escalier-bibliothèque est le tronc d’un arbre généalogique. C’est lui qui diffuse la sève vers les branches-fouillis au bout desquelles fleurissent les familles d’écrivains que j’invente en lisant.
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Tsvetaïeva est proche de Bachman comme l'a pressenti Todorov dans l'admirable autobiographie qu'il signe d'elle : vivre dans le feu . Porte-voix de son auteur, Moi dit à Ivan: "Tu comprends, mes lettres enflammées (...) tout le feu que j'ai mis sur le papier, avec ma main brûlée, j'ai peur que tout cela devienne un bout de papier carbonisé". Or, loin d'être de cendres, l'oeuvre de Bachmann est à jamais un incendie d'amour et d'intelligence, un feu de joie inextinguible qui apaise les ombres du soir et allonge l'éclat des matins.
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« Écrire est un acte religieux : une manière d’ordonner, corriger, réapprendre et réaimer les gens et le monde, tels qu’ils sont et pourraient être. »
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