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Critique de Lamifranz


« Les Saints vont en enfer » ce titre de Gilbert Cesbron pourrait servir de sous-titre à ce roman (si toutefois c'est un roman), magnifique témoignage d'amour, d'espérance et de charité (trois vertus « chrétiennes »), d'humilité, de sagesse, de tolérance et d'acceptation (vertus hautement humanistes toutes religions confondues). « La Cité de la joie » est un manifeste pour la défense de l'humain contre toutes les agressions extérieures, qu'elles soient naturelles, liées au climat, aux maladies, à la pauvreté, ou hélas humaines, liées principalement à la violence et à la corruption.
Calcutta c'est « Enfer-sur-Terre ». Les statistiques (2011) donnent 4 millions et demi d'habitants et une densité de 21800 habitants au km2 ! Dans les années 1980, où se passe l'action, c'était un peu moins, sans doute, mais le drame de la surpopulation existait depuis des siècles. Avec tout ce que cela suppose comme effets catastrophiques. Et pourtant les gens vivent dans cet enfer, vivent et meurent, bien sûr, vivent ou survivent, dans des conditions que nous, nantis des pays occidentaux, avons peine à imaginer.
Ce que nous montre Dominique Lapierre, c'est que ces gens, qui vivent dans l'extrême pauvreté, qui cohabitent avec les rats, les serpents et d'autres colocataires (à deux pattes, parfois) tout aussi dangereux, ces gens qui n'ont pas à manger, qui travaillent (quand ils ont un travail) au jour le jour, ces gens qui pataugent dans la boue dans la crainte des inondations, eh bien ces gens ne sont pas « malheureux » (au sens que nous donnons, chez nous, aux mots « bonheur » et malheur »). Ils ont une résilience qui leur fait accepter leur sort, avec résignation, certes, mais avec aussi confiance et espérance. Ce message est d'une portée incalculable
L'histoire (bien que la narration ne soit pas le thème premier du livre) est celle d'une poignée de bénévoles, « saints » religieux ou laïcs qui se plongent au milieu de cette population dans le seul but d'aider et de soulager, sans rien attendre en retour : un prêtre français Paul Lambert, qui recherche la source même de sa vocation, plus proche de Vincent de Paul que de Bossuet, un jeune médecin américain, une infirmière, plusieurs Indiens dont un tireur de pousse-pousse, une poignée de héros du quotidien dont la raison de vivre est de soulager la misère du monde. Tâche immense, incommensurable, à la mesure de cette ville, de ce pays, de ce peuple où les dieux avoisinent avec les humains, où les traditions perdurent même au plus fort de la misère, où les traditions freinent la modernité mais n'empêchent pas de regarder l'avenir avec une sorte de sérénité dont nous, occidentaux, serions incapables.
Calcutta pour tous ces personnages, est un lieu de rencontres. Peut-être même plus, un lieu d'osmose, ils se fondent dans cette population pour en épouser les joies et les peines, les déceptions et les espérances.
C'est aussi le cas de l'auteur. Venu ici avec Larry Collins pour écrire « Cette nuit la liberté » il a eu le coup de coeur pour ce pays d'une richesse absolue en même temps que d'une pauvreté indicible, pays de contrastes tellement forts, pays surtout habité par un peuple multimillénaire, d'une immense profondeur spirituelle, qui le fait survivre au-delà de l'enfer terrestre où il est confiné.
Ce que Dominique Lapierre a mis dans ce livre dépasse le travail du journaliste, du reporter, du romancier. C'est un chant d'amour pour un pays, un hymne à la vie, et tout en même temps, un appel à la tolérance universelle, à l'espérance, et à la paix.
Un chef-d'oeuvre, parmi les plus grands témoignages du XXème siècle, à lire absolument.

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