Citations sur Dangereusement douce (15)
Le passé est toujours réinventé sous un jour meilleur, tamisé aux souvenirs, toutes les impuretés filtrées, il ne reste que quelques pépites que l'on voit plus brillantes qu'elles ne l'étaient.
Le travail analytique se concentre sur « l’autre corps », disait Malevinsky. Cette haute voltige de l’âme, cet exercice cérébral, si précis et si difficile qu’il atteint au dépassement de soi. Dans le vide, le silence et la lutte contre l’attraction terrestre, comme les trapézistes.
Comme une île flottante, de continent en continent, de névrose en psychose, de mélancolie en souffrance, de rêve en fantasme. Le bureau est une balise, qui émet des signaux.
– Il entre dans une image, la voit dans la réalité et se libère.
– Il se libère même avant, précise Nathalia, il fait un choix. Il change de vie. Il prend une décision. – Et vous, Nathalia, quel choix avez-vous fait ?
– Celui de venir vous voir.
Plus notre sac est lourd, plus nous sommes riches, plus les secrets nous torturent, plus nous sommes sûrs d’exister. Le doute, les remords, les souvenirs, les actes nous brûlent – alors s’ils nous brûlent nous sommes sûrs d’avoir un corps. C’est dans les moments les plus odieux de la vie que nous possédons enfin la certitude d’être vivants.
J’ai grandi dans le 7e arrondissement, avec des Charles-Édouard et des Marie-Bérangère. Leurs parents venaient les chercher à la sortie de l’école, les hommes avaient des pantalons framboise et des mocassins à glands, les femmes les cheveux en arrière avec des catogans – parfois même des serre-tête en velours – et des sacs Hermès.
"— Pourquoi souriez-vous ? me dit-elle.
— Je pense à une phrase de Jung… Elle m’a toujours paru obscure : le refoulé revient sous forme de destin.
Nathalia tire une bouffée de sa cigarette.
— Je comprends, je suis votre destin."
"Dans le travail analytique, on retrouve cette forme de beauté tranquille, cette esthétique en apparence si simple : patient allongé, toujours dans la même position, moi assis, toujours à la même place, dans un décor qui est toujours le même. Nos phrases sont nos figures acrobatiques. Tantôt c’est moi qui guide le patient, tantôt c’est lui qui m’amène vers les questions qu’il aimerait s’entendre poser."
"C’est dans les moments les plus odieux de la vie que nous possédons enfin la certitude d’être vivants. Le travail analytique se concentre sur « l’autre corps », disait Malevinsky. Cette haute voltige de l’âme, cet exercice cérébral, si précis et si difficile qu’il atteint au dépassement de soi. Dans le vide, le silence et la lutte contre l’attraction terrestre, comme les trapézistes."
"Inutile d’inventer le métavers, il existe déjà, tout se passe à travers un écran : vos souvenirs sont dans votre dossier « mes photos » ou votre Instagram, votre mémoire dans votre cloud, les femmes que vous pouvez rencontrer sont dans une application numérique et un site, il faut leur envoyer un message. « On tient plus à la vie qu’on n’a pas qu’à celle qu’on a », a dit il y a longtemps un poète ou un écrivain dont j’ai oublié le nom – je dirais que, désormais, on tient plus à sa vie numérique qu’à sa vie tout court."