–Mais bon sang, qu’est-ce que tu fais ? Rugit-elle. Tu as une présentation dans une demi-heure.
–Panne d’oreiller, lui répondis-je laconiquement. Je serai là dans vingt minutes. Prépare-moi des litres de café et des viennoiseries. Je meurs de faim…
–Oohh, dis-moi, serait-ce qu’enfin Julien a retiré le balai qu’il avait coincé dans le…
–Ce n’était pas avec lui, murmurai-je en rougissant. Lui et moi...
–Tu as intérêt à tout me raconter sinon je débarque chez toi et je te torture.
J’avais vingt-six ans et comme lorsque j’en avais huit, ou dix, après un gros chagrin, j’allais chercher du réconfort auprès de celui qui était tout pour moi : mon meilleur ami, mon frère. Mon tonton Alex.
Mon oncle Alexandre était le jeune frère de ma mère. Il était arrivé par un beau matin de printemps, à la plus grande surprise de ma grand-mère qui avait fait une croix sur une autre grossesse. Dix-neuf ans après la naissance de ma mère, Alexandre avait fait son apparition et fut reçu comme un cadeau. Cinq ans plus tard, ce fut à mon tour de voir le jour. Ma mère m’a dit que, lorsqu’il était venu à la maternité pour voir sa petite nièce, Alex en était tombé amoureux.
Sans un mot, je me laissai entraîner vers la sortie, le visage empourpré. Je savais que mon silence avait blessé Alex. Mais pour l’instant, j’étais sous le choc. Jamais je n’aurais imaginé être agressée ainsi à cause de mes choix amoureux ou plutôt, j’avais voulu occulter le problème. Lorsque nous traversâmes la foule, certains ne se génèrent pas pour nous insulter ou nous montrer du doigt.
Voilà, le moment que j’appréhendais tant était arrivé et notre soirée était gâchée, irrémédiablement foutue.