Nous les connaissons morts. Nous avons oublié qu'il y en eu de vivants...
Un soldat blessé est monté dans un convoi sanitaire. Arrivé à l'hôpital, pas de papiers. Amnésie. Quasi aphasie. Il est baladé d'un hôpital à l'autre jusqu'à Rodez. Là un médecin va tout mettre en oeuvre pour retrouver sa famille. Avec l'autorisation du préfet, il convoque les journaux pour diffuser photo et description. Cela Fonctionne. Au-delà de ses espérances.
Une quête qui se prolonge sur tout l'entre-deux-guerres. Un défilé de familles brisées qui contre logique gardent espoir, accusant parfois les médecins de malveillance.
Une facette assez méconnue de la der des der : le désarroi, la souffrance des familles à qui les hommes ont été enlevés, l'incapacité pour eux (et c'est normal) de concevoir les horreurs et les incertitudes de la guerre moderne (gaz, obus, armement...). le personnel soignant lui-même n'est pas à l'abri de ce désarroi devant les blessures infligées par ces nouvelles armes.
Une scène très parlante, mais côté civil : scène de liesse à Rodez pour célébrer la signature de l'armistice, les civils veulent remercier les soldats ; ils entrent dans l'hospice et voient les gueules cassées. Ils viennent de comprendre que la guerre n'est pas propre, ni sans conséquences, même du côté des vainqueurs, que ce n'est pas un jeu.
Une BD en N&B, sombre, un graphisme assez recherché. Tout cela sert le thème de cette histoire de quête d'identité, d'humanisme, d'humanité dans un pays qui n'est pas près à assumer toutes les horreurs de
la Grande Guerre, que les sauveurs de la France ne sont pas revenus la fleurs au fusils et que Berlin n'a jamais été prise. Comme le fera remarquer l'officier SS venu prendre possession de l'hôpital.
D'une guerre l'autre, un mort est un mort.