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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'aimais déjà beaucoup Titiou Lecoq, brillante journaliste et essayiste féministe dont je suis les chroniques sur le magazine en ligne Slate.fr, dont j'ai apprécié ses articles parus chez Libération sur les féminicides et les meurtres conjugaux.

J'ai aimé d'emblée la couverture de son Honoré et moi, du orange et violet qui claque, un portrait De Balzac et une phrase drôle « parce qu'il a réussi sa vie en passant son temps à la rater, Balzac est mon frère ».

Souvent, je trouve ça très chiant, les biographies, trop souvent empesées voire ampoulées. J'en lis pour approfondir mes connaissances, certes, mais rarement je m'éclate ! Et là, ça a été l'éclate totale ! Titiou Lecoq a réussi à dépoussiérer complètement le genre pour en faire un récit vivant et très drôle. Et après cette réjouissante opération de décapage, j'ai découvert un Balzac terriblement moderne et attachant.

J'ai appris plein de choses ( je partais de très bas, ne connaissant presque rien de la vie De Balzac ) dans un tourbillon alliant documentation biographique solide et plume allègre maniant sans complexe un vocabulaire actuel volontairement anachronique. En vrac, voici mon top 5 des informations que je retiens :

1- Balzac était le roi de la foirade, obsédé par l'argent, voulant à tout prix devenir riche … mais tout le temps surendetté et acheteur compulsif de fringues extravagantes et d'objets de déco ! Les femmes de sa vie l'ont bien rincé pour éponger ses dettes.

2- Il était ultra complexé, édenté, court sur pattes, joufflu, robuste, avec une tête, selon les critères de ses contemporains, «  à vendre des saucisses sur un marché du Tarn » … bien loin d'un Lord Byron «  beau mec version dépressive ». Déjà qu'on lui reprochait de trop écrire pour des raisons mercantiles …

3- Lui qui était plutôt très réac dans ses idées politiques a été un féministe avant l'heure. Dans son étonnante Physiologie du mariage ( 1831 ), il lance un appel aux maris à ne pas violer leurs jeunes épouses lors de la nuit de noce et enjoint les maris à ne jamais «  se permettre un plaisir qu'il n'ait eu le talent de faire désirer par (leur) femme » !

4- Pour se faire de la thune, il a eu le drôle de projet ( jamais réalisé, ha ha ) de planter chez lui 100.000 pieds d'ananas dans des serres … pour vendre ensuite les fruits dans une sorte de supermarchés tenue par des écrivains, George Sand à la caisse, Théophile Gautier au rayonnage et lui à servir les clients.

5- En 1899, grosse dispute suite à la proposition de la gauche de panthéoniser Balzac , refus catégorique et offusqué de la droite. Cela aurait eu de la gueule, pourtant un triumvirat Hugo-Zola-Balzac dans les cryptes du Panthéon !

Un régal que cette biographie décomplexée et ludique, que l'on soit intéressé ou pas par le personnage De Balzac, ce n'est que du pur plaisir. Personnellement, j'ai comme une envie furieuse de me plonger à nouveau dans un de ces romans ! Suis allée chercher La Femme de trente ans que je n'ai jamais lu.

Lu dans le cadre du jury Grand Prix des lectrices Elle 2020, catégorie Essai
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Je me suis fait un nouveau pote! C'est Honoré, qui cache bien son jeu quand on ne se donne pas la peine de fouiller un peu sa biographie. Heureusement qu'il y a des auteures comme Titiou Lecoq, qui se mettent la tâche et explorent la documentation pour en sortir une très intéressante biographie de ce monstre de la littérature classique française.

C'est passionnant, parce qu'on en découvre de belles sur l'auteur de la Comédie humaine, et en particulier sa relation particulière à l'argent, qui lui file entre les doigts. Qu'il en ait ou qu'il n'en ait pas (il a connu des épisodes de vache maigre avant le succès), le résultat est le même, il est poursuivi par des créanciers. Très en avance sur son temps, il a pratiquement créé le concept de surendettement. Au moins il en aura profité, vivant dans un luxe largement au-dessus de ses moyens.

On le connait pour sa capacité de travail hors du commun, mais on sait un peu moins qu'elle était lié à ces besoins urgents de remboursement de ses créanciers, qu'il ne parvenait pas toujours à maintenir à distance.


On en sait aussi un peu plus sur sa famille, qui a sans aucun doute subi les conséquences de la légèreté de l'acheteur compulsif qu'il fût .

C'est écrit avec humour, Titiou Lecoq utilise ce ton familier que l'on réserve le plus souvent à des proches, ce qui rend le propos drôle en plus d'être instructif. Il est probable qu'à la lumière de ces révélations, certains personnages des romans De Balzac apparaissent sous un nouveau jour.

Dès que j'en aurais fini avec Emile, j'attaque Honoré!

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Un livre qui vaut vraiment le coup, bien documenté mais particulièrement distrayant, nous attachant inexorablement à ce Balzac de panache et de fougue. L'auteur rechigne à finir son livre, elle veut rester encore un peu avec Honoré ! Et bien nous aussi.
Elle s'imagine discutant le bout de gras avec lui , affalé dans un fauteuil crapaud couinant sous son poids généreux et partageant quelques boutades bien senties sur la petite bourgeoisie éternelle.


Il s'agit bien d'un livre sur Honoré , plus que sur Balzac-écrivain ; pas de prétention à l'exégèse, pas de biographie exhaustive non plus, mais un ton familier et drôle pour parler d'un personnage qui passa toute sa vie la tête plongée dans des soucis triviaux, comme vouzémoi .


Il courra après l'argent toute sa vie, enchaînant avec une constance remarquable plans foireux (culture d'ananas et mines d'argent !) et faillites fracassantes, poursuivi de près par la tête chercheuse d'une scoumoune surnaturelle qui ne le lâchera jamais, tout comme la horde de ses créanciers sur les dents.

L'argent il adore ça , ça l'attire énormément, tout comme la célébrité le fait rêver. Il semble que ses fiascos à répétition n'aient pas anéanti sa bonhomie constitutive et son optimisme increvable . Et elles auront eu le mérite de le contraindre à écrire au kilomètre, une de ses qualités étant son énorme capacité d'écriture, heureusement d'ailleurs car bien souvent il avait déjà dépensé l'argent des livres qu'il n'avait pas encore écrits.

Il adore également d'autres formes du superficiel, fringues, tapis, bibelots, meubles, un véritable décorateur d' intérieur doté de plus de talent dans ce domaine que dans celui de la finance où il était une bille complète.


Rondouillard comme une bille justement, il l'était aussi, teint rosé, dentition fantaisiste, Honoré n'a pas un physique facile . Mais, foin du cliché du grand écrivain ascétique et lointain plein de componction, il suscite la sympathie par l'effet petit-gros-jovial. On était frappé aussi apparemment par l'éclat de ses yeux où pulsait une véritable chaleur tournante.
Il captivait par ce regard, séduisait même.
Il sera aimé, son souhait le plus ardent, quoi d'autre ?
Par des Victor Hugo ou Théophile Gautier, reconnaissant son talent et sa finesse d'analyse des jeux sociaux. Par des femmes surtout (riches... !), aiguillonnées par son insolente passion de vivre.

Décrivant sans concessions la réalité peu reluisante que vivent les femmes de son époque, réduites à de pâles moitiés, il émet des voeux clairs pour une nouvelle place pour elles, reprenant la main sur leur vie sociale et amoureuse.
A moins que ce ne soit une ruse attrape-mouche supplémentaire ? Et si l'écriture n'était elle même qu'un faire-valoir pour ses ambitions ? Peu importe, une oeuvre est née de cette énergie exubérante et insubmersible et il aura livré un portrait acide et lucide de la société de son époque.


Cupide et dépensier compulsif, Balzac cultive également une mauvaise foi fascinante . Notamment à l'égard de sa mère qui se dévouera et se ruinera pour son fils avec une phénoménale ingratitude en retour.

Oui, Honoré fut parfois détestable; mais ce que Titiou Lecoq a tant apprécié chez lui, c'est sa ténacité à poursuivre ses envies, quitte à les vivre sous sa plume, il lui faut de la démesure , du désir, et on peut constater que jamais il ne plia échine devant la réalité et ses fâcheuses contrariétés. le contraire d'une vie au petit-pied, mesurée et frileuse, échappant au poste de clerc de notaire qu'on lui destinait.



Titiou Lecoq finit sur un magnifique post-scriptum irradiant de sincérité, où elle nous livre au débotté ses conclusions provisoires sur la vie, elles sont décapantes et font mouche. C'est sa fraternité avec Honoré : il lui faut du sens à elle aussi, impérativement, et elle nous convie à faire passer à la question nos choix d' existence pour voir ce qu'ils ont dans le ventre.

Beaucoup de plaisir à lire, une réussite !
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Un bail que j'ai lu Balzac qui m'était resté en tête comme un incontournable du Lagarde & Michard, un forcené de la plume qui nous a légué plus de 90 livres et une flopée de personnages inoubliables. Il aurait été dommage de ne pas faire la connaissance de ce « roi de la foirade » au destin drôle et tragique !

Titiou Lecoq écrit très bien et sa passion pour Balzac s'est avérée tout à fait communicative. La vie de l'écrivain est incroyablement romanesque et sa personnalité fascinante : une âme d'artiste sensible bien cachée derrière un physique bonhomme ; une fantaisie, une excentricité tape-à-l'oeil si immodérées qu'elles en deviendraient presque drôles ; une envie ardente de faire fortune et une capacité hors-normes à concevoir les idées les plus foireuses, de l'édition d'oeuvres complètes illustrées imprimées tout petit, en passant par la politique et le commerce d'ananas. Ajoutez à cela, face aux échecs, une obstination qui frôle l'acharnement et un art de l'autodérision tout à fait désarmants. Et une manière un brin angoissante (pour le lecteur comme pour l'entourage De Balzac) de justifier constamment de nouvelles dépenses de fringue et de décoration intérieure dignes de son génie et des impératifs de la vie mondaine ! le décor n'est pas en reste : un Paris en profonde ébullition politique, littéraire et intellectuelle en cette première moitié du XIXème siècle.

Mais ce qui est le plus fascinant, c'est la façon dont cette biographie vient éclairer l'oeuvre balzacienne. L'écrivain fait l'amère expérience des enjeux d'argent ? Il les fera entrer en littérature. On se gausse de lui parce qu'il doit vivre de sa plume ? Il assumera de devenir un marchand de livres, voire un épicier des lettres. Il est seul avec ses entreprises ratées ? Il s'inventera les vies qu'il aurait aimé avoir. J'ai été très intéressée par les pistes d'analyse proposées, sous l'angle des questions d'argent, mais aussi des femmes, de l'intime ou de l'ambition littéraire.

Titiou Lecoq brosse un portrait terriblement humain et touchant, « flamboyant contre-exemple » des obsessions contemporaines de réussite absolue. Son livre se parcourt avec beaucoup de plaisir – et donne envie de courir se replonger dans La comédie humaine !
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Un livre qui rend hommage, une biographie tout en humour d'Honoré de Balzac. Bien loin de ce que l'on voit pendant nos études. Une manière ludique et éducative de le découvrir. Il est le grand gagnant dans sa catégorie dans le cadre du prix des lecteurs organisé par le livre de Poche. Prix totalement mérité
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C'est frais, c'est drôle, c'est simple mais c'est extrêmement complet ! J'ai passé un très bon moment avec Balzac – pas comme au lycée où l'étude de ses oeuvres en cours de française me faisait sécher les cours !

Durant plus de deux cent pages, Titiou Lecoq démystifie un géant de la littérature française ! C'est avec le sourire aux lèvres et même parfois des éclats de rires que j'ai découvert qui est Balzac. Comment ne pas rire face au portrait qu'en dresse l'auteur ? En effet, elle charge le personnage, il n'a pas un physique facile, il ne sait pas tenir ses comptes et encore moins ne pas dépenser ce qu'il a ou n'a pas comme argent !

Ce que j'ai particulièrement aimé, c'est la simplicité de cet essai. Oui, parfois l'auteur se permet quelques familiarités mais ce n'est pas grave car elle contrebalance cela par la mine d'informations qu'elle nous livre sur Honoré !

C'est un exercice assez périlleux mais ici c'est un carton plein ! On découvre un homme avec une vie pas facile car, même s'il a un nom à particule, Balzac n'est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche et il passe un bon moment de sa jeunesse à se galérer pour trouver des éditeurs ou des journaux acceptant de le publier !

J'ai vraiment adoré. J'ai découvert un Honoré que je ne connaissais pas, avec sa vie amoureuse chaotique ou ses relations familiales complètement hallucinantes ! Je n'ai pas vu les pages défiler et j'ai appris des tonnes de choses tout en rigolant. Comme quoi, il est possible de faire un ouvrage sérieux sur le ton de l'humour, sérieusement mais sans être pontifiant ! 🙂 J'ai pris une belle leçon de culture et croyez-moi, cela a été un moment de plaisir !

Si, toi aussi, ton compte bancaire est dans le rouge, ou si ta vie amoureuse est un fiasco, ou encore si tes relations avec tes parents sont compliquées, j'ai ce qu'il te faut ! Honoré et moi, de Titiou Lecoq te permettra de découvrir que Balzac ne se résume pas au Père Goriot et que connaître sa vie permet de regarder ses livres d'un autre oeil !
Lien : https://ogrimoire.com/2020/0..
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Bon, avant toute chose, je dois vous faire une confession : lorsque j'ai reçu le courriel indiquant le choix de mes copines jurées du Grand Prix des Lectrices “Elle” pour la sélection de mars et que j'ai appris que l'essai/document retenu était « Honoré et moi », j'ai presque (ou quand même) eu envie de pleurer toutes les larmes de mon corps. Pourquoi? Parce que rien que me dire que j'allais devoir me coltiner une biographie d'Honoré de Balzac, j'étais aux portes du désespoir. Pourtant, les retours en étaient vraiment élogieux. Mais pour moi, mes souvenirs au sujet d'Honoré de Balzac remontaient à des années durant mes études secondaires et il ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable à vrai dire…

Alors quand les livres de la sélection sont arrivés et que je me devais de choisir par lequel des livres j'allais commencer, j'ai pris mon armure de guerrière et je me suis dit : « Autant faire comme avec un sparadrap et retirons-le d'un coup ». J'ai donc ouvert le dernier livre de Titiou Lecoq

Mais quelle terriblement bonne surprise!!! Je me suis totalement régalée. Et bien oui, je le crie haut et fort, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis! Qu'est-ce que ce bouquin m'a plu ! Car en plus, d'en apprendre sur cet énergumène qu'était en fin de compte ce grand auteur classique Honoré de Balzac, Titiou Lecoq arrive à vous donner envie de découvrir plus sa vie, de continuer la lecture de ce document et même de vous arracher souvent des petits sourires en coin le tout grâce à une écriture fine et drôle.

Malgré des cours de littérature classique, je me rends maintenant que je ne connaissais rien mais alors rien du tout de ce personnage haut en couleurs. Déjà qu'à l'heure actuelle, il passerait pour un loufoque, je me dis qu'à son époque, il devait bien détonner et pourtant, s'en contre-foutre des opinions bien-pensantes de la société de l'époque.

Même si Titiou Lecoq le rend inévitablement attachant par bien des aspects, elle n'en cache pas pour autant sa folie des grandeurs, son incompétence viscérale quant au rapport à l'argent mais aussi, pour ma part, son ingratitude à l'égard de certains membres de sa famille et de son entourage en particulier, sa mère.

Je ne me plongerai pas dans la psychanalyse de ce grand écrivain mais il est indéniable qu'à bien des égards, tout ne roulait pas bien dans sa tête et ses besoins de reconnaissance et d'argent devaient trouver leurs origines au plus profond de son être.

Je pense vraiment que c'est le centre de cette biographie qui donnera l'envie à ses lecteurs, de se plonger ou de redécouvrir à nouveau les grandes oeuvres écrites par Honoré de Balzac et de peut-être mieux en comprendre certains aspects.

Donc, je voudrais faire un énorme mea culpa à mes copines jurées : malgré que j'ai peut-être dû vous maudire de mon être de m'avoir « imposer » cette lecture, qu'est-ce que je l'ai trouvée truculente et succulente! Merci!
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Dès l'introduction le ton est donné! On sait que l'on va nous raconter Balzac de manière iconoclaste et sur un ton plus «fun» que nos souvenirs scolaires.

Le grand homme sort du cadre littéraire pour se révéler autant loser que génie, perpétuellement en quête de notoriété, d'amour et surtout d'argent. Sa plume industrieuse est au service de son imagination débordante mais avant tout un moyen de faire fortune et d'assumer les débordements pécuniaires de son mode de vie qu'il refuse de restreindre. Mais sa destinée s'apparente à une telle collection de déveines et galères qu'il en est attachant.

Se glisse dans cette fantaisie biographique une pertinente réflexion sur le rapport à l'argent, et sur l'immuable système économique de nos sociétés inégalitaires, quelle que soit l'époque.
On parle aussi beaucoup d'amour et de sentiments car le littérateur n'est peut-être pas très beau mais il est séduisant. Adulé et/ou critiqué, il se montre d'une intelligence vive, d'une audace désarmante, d'une hypocrisie confondante et d'une naïve ambition. Il est décidément fort sympathique de découvrir l'homme en électron libre, confronté à ses contemporains et nourrissant son oeuvre de leur société.

Une plume gaillarde et décomplexée distille un humour un peu vachard et ressuscite l'homme dans son quotidien le plus ordinaire, avec une puissance évocatrice nourrie d'une documentation solide.

Titiou Lecoq aime Balzac! Pas de doute!
Et elle a su se démarquer de prestigieux biographes qui l'ont précédée dans l'exercice avec un essai pertinent et savoureux, culbutant le mythe et ravissant le lecteur. (…qui se promet de repiocher dans la bibliographie)
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Ce livre m'a replongé dans un passé lointain. En effet, j'ai réellement découvert Honoré de Balzac pendant mes études universitaires; vous savez, c'est quand vous devez tout mettre en fiche et vous gaver de connaissances. J'avais un très bon professeur, un passionné, Rafaël Pividal, qui m'avait initié, le temps d'une année, à ce grand écrivain. Il avait une nouvelle de prédilection: « Sarrasine ». Je me souviens encore qu'il commençait son cours par l'incipit de ce morceau de « La Comédie humaine ». Il m'a fait adorer cette nouvelle musicale; un peu moins, je dois dire, les analyses critiques qu'il fallait avaler pour le partiel. Quoique, je garde en mémoire deux bons essais : celui de Roland Barthes « s/z » (1970) et celui de Michel Serres, « L'Hermaphrodite » (1987). Et puis, je dois avouer que l'essai biographique de Gaëtan Picon, « Balzac par lui-même » (1956) m'avait aussi beaucoup séduit à l'époque. Là, je vous parle du milieu des années quatre-vingt-dix. Mais, tout cela n'aide pas vraiment à aimer un auteur classique; au mieux vous le relisez, mais toujours enfermé dans des considérations stylistiques, et au pire vous vous contentez de le lire pour valider vos examens.

A mon sens, la critique littéraire universitaire est à éviter quand on veut donner envie de lire un auteur comme Balzac. Mais alors, comment pousser une personne à lire Balzac ou au moins à s'intéresser à lui ? C'est là où le livre de Titiou Lecoq a tout son intérêt. Sa proposition biographique décalée m'a enchanté. Certes elle sort de l'orthodoxie académique, mais ce n'est pas plus mal. Elle est accessible, directe, parfois coupante, avec une pincée d'humour et surtout elle applique au romancier le regard aiguisé de la féministe, sans être dans l'extrême, et cela lui permet de remettre les pendules à l'heure. C'était nécessaire. Et on peut comprendre pourquoi Titiou Lecoq écorche au passage la biographie de Stefan Zweig. Elle s'approche davantage de celle d'un Pierre Barbéris. Car, si Balzac a un rapport particulier aux femmes, il n'est rien face à celui de l'argent, du paraître en société et d'une cupidité insatiable.

Après la lecture de ce livre, je peux dire que Titiou Lecoq m'a fait découvrir, une nouvelle fois (oui c'est possible !), Balzac sous un angle plus humain; un homme perfectible avec ses qualités et ses vices. En abordant ce grand écrivain avec beaucoup d'humilité, l'auteure ne donne pas seulement envie de le relire; elle nous pousse à le faire à travers des questions qui restent d'actualité: les relations femmes/hommes, l'avidité de pouvoir (un clin d'oeil à Christophe Castaner), l'endettement (la belle courbe de la « dèche balzacienne », page 229), les inégalités économiques (j'ai adoré la citation d'Eugène Varlin à la page 166), les injustices, le métier d'écrivain et les pratiques éditoriales … Mais il ne faut pas croire que ces thèmes d'actualité, l'humour et, par moment, l'usage du langage familier font de cet ouvrage une biographie légère. Bien au contraire. Et c'est ce qui m'a le plus impressionné. Il aura fallu à l'auteure un travail colossal, probablement de nombreuses heures de lecture de la revue « L'année balzacienne » et bien d'autres références encore, pour mettre sur page une telle biographie. Titiou Lecoq a réussi le coup de force d'allier humour et érudition pour notre plus grand plaisir de lectrice et de lecteur. Maintenant, j'attends avec impatience la biographie de George Sand …

Je remercie l'équipe du site Babelio et les éditions Iconoclaste de m'avoir permis de lire cet ouvrage.


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Rencontre sympathique et tendre entre une jeune femme d'aujourd'hui, moderne et drôle et un écrivain du 19ème siècle, monstre sacré de la littérature.
Coup de foudre de l'une pour l'autre, sympathie mêlée d'interrogations quant à la vie effectivement quelque peu ratée ou du moins contrariée de ce Balzac. On rit devant tant de bévues et de décisions qui tournent à la cata. On apprend beaucoup de choses sur cet ogre, gros producteur de pages, visionnaire malchanceux ( ses idées étaient pourtant bonnes...) .
le courant passe entre nous et cet Honoré grace à l'humour de T. Lecoq.
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