Les nouvelles enquêtes du juge Ti, tome 5 : Madame Ti mène l'enquête

Tao Gan était un ancien escroc de petite volée, mais retors et plein d’astuce, que Ti avait sorti d’un mauvais pas : il lui avait évité d’être écharpé par une troupe de villageois que le malandrin avait délestés de leurs économies à l’aide de dés truqués. Plutôt que de retourner à une liberté précaire, le petit escroc avait eu la brillante idée d’offrir ses services à son sauveur. Le juge avait eu assez de finesse ou de cynisme pour pressentir quel parti il pouvait tirer de ses dons : l’homme savait crocheter une serrure, falsifier des documents, imiter les signatures, mentir sans honte, tromper son monde en toute occasion. Le parfait auxiliaire de police.

Le mariage était un malentendu tragique entre deux personnes qui n’avaient guère de chances de se comprendre, deux êtres que leur éducation avait tout fait pour éloigner plus encore que la nature ne les y avait disposés.

Je suis convaincue, cependant, que d’un mal peut sortir un bien. Un désagrément peut se changer en opportunité. En un mot, c’est peut-être une chance que les dieux envoient à notre maître pour favoriser sa guérison.

 Les beaux chevaux sont comme les belles femmes. Ils font naître la convoitise. Mais, une fois qu’on les a acquis, on s’aperçoit qu’ils coûtent beaucoup trop cher et ne servent à rien !

Une femme mûre et intelligente, éminemment intelligente, décidée, capable de partager ma hauteur de vue, voilà ce qu’il me faut. Songez à la vie que vous auriez auprès de moi. Je suis infiniment plus riche que votre fonctionnaire de mari. Je possède en particulier une très belle résidence à la campagne. Et si elle ne vous plaisait pas,nous en ferions bâtir une autre à votre goût.

Malheureusement pour dame Yin, la démence n’était pas au nombre des causes officielles autorisant la rupture d’un mariage. Même folle à lier, elle restait la première épouse du seigneur Pei. L’usage avait prévu que l’on conservât ce titre à celles qui en jouissaient, dans le but de les protéger et d’affirmer la solidité des liens conjugaux. La médaille avait son revers : elle ne pouvait pas plus quitter son mari que ce dernier ne pouvait la répudier sur un coup de tête.

 J’accuse mon mari d’être un démon ! reprit la visiteuse. Il s’agit en réalité d’un fantôme échappé du monde infernal. Il a volé la peau d’un homme pour vivre parmi nous ! Mais il n’a rien d’humain !

Une femme qui recevait un homme dans ses appartements privés, à une heure indue, en l’absence de son époux, était coupable d’emblée.

Une femme laide pouvait se livrer à toutes les turpitudes sans éveiller la suspicion.

Les femmes trop belles se voyaient courtisées par des importuns qui n’avaient que faire de ruiner leur réputation ou leur vie. Si elles étaient pauvres, leurs parents étaient harcelés par les maquereaux et leurs rabatteurs, qui leur offraient de grosses sommes pour alimenter les écoles de courtisanes ou les vulgaires maisons de passe. Riches, elles étaient inévitablement soupçonnées de faire mauvais usage de ce don du Ciel. Il n’existait pas, dans l’esprit public, de belle femme honnête.