AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de beatriceferon


Noël travaille comme coursier pour la maison Bâtard et fils à Versailles. Souvent, le « signor Minimo », qui s'occupe de tout à l'hôtel des Réservoirs, l'envoie faire l'une ou l'autre enquête. Aujourd'hui, voilà le petit homme au bord de l'apoplexie. le riche client de la 22 a perdu « son cornet ». Noël s'imagine un digne vieillard dur d'oreille. Eh bien pas du tout. C'est un jeune excentrique entouré d'un vrai capharnaüm. Il a perdu le carnet dans lequel il note ses idées. Ce dernier est vital pour lui qui ambitionne d'écrire une vaste fresque littéraire. Il s'appelle Marcel Proust et il prend Noël sous son aile.
Quand il se lance dans la rédaction de ses souvenirs, Noël a presque cent ans. Il replonge dans son passé. Nous voici à Versailles en 1906, et ce petit coursier déluré et ambitieux rencontre par hasard le prestigieux client de l'hôtel des Réservoirs, qui deviendra son mentor et son modèle. Noël prend, lui aussi, l'habitude de noter dans des carnets tous les événements marquants de ses journées. Enfant du peuple, il vit avec sa mère et l'ami de celle-ci, qui ne l'aime guère. Aussi, le jeune homme fuit-il le plus possible le domicile familial. Marcel Proust deviendra comme un père pour lui. Noël note religieusement les expressions du grand homme et les mots qu'il ne comprend pas, dont il cherchera, le soir, le sens dans son précieux dictionnaire.
Marcel Proust ne quitte guère sa chambre en raison de sa santé défaillante. Comme il adore observer et se livrer à des déductions, Noël, ce gaillard débrouillard dont personne ne se méfie en raison de sa petite taille et de son visage poupin qui lui donnent l'air d'un enfant, sera ses yeux et ses oreilles au-dehors.
Évidemment, les prétendues « enquêtes » auxquelles se livrent les deux compères, n'ont rien de vraiment haletant. Elles servent de prétexte à l'auteur pour nous donner sa vision personnelle de cet écrivain que Pierre-Yves Leprince veut montrer « jeune », « drôle », alors que la plupart des gens le voient comme un « mondain malade et sans âge, qui écrit la nuit dans son lit ».
Il a aussi lu « La Recherche » comme une sorte de roman policier. Quoi de plus naturel, donc, que de mêler Marcel Proust à des enquêtes ? Ainsi, notre dandy se livrera-t-il à une investigation concernant les « fantômes du Trianon ». Deux Anglaises sont persuadées d'avoir découvert une faille temporelle qui leur a permis de faire irruption dans le XVIIIe siècle et de voir Marie-Antoinette dans les jardins du parc.
J'avais lu une bande dessinée inspirée de ce mystère : « Marie-Antoinette, la reine fantôme » de Rodolphe et Annie Goetzinger, qui m'avait beaucoup plu. J'étais donc surprise et ravie de découvrir une autre évocation de cette énigme dans le roman de Pierre-Yves Leprince. Marcel Proust aurait aimé que cette histoire soit vraie, lui qui aurait tant voulu retrouver le « temps perdu » et revoir sa chère maman.
Dans le roman de Pierre-Yves Leprince, pas d'enquête palpitante, ni de suspense insoutenable. Il y avait, à mon avis, des longueurs, voire des redites.
Pourtant, j'ai beaucoup aimé cette lecture, surtout parce que j'adore Marcel Proust et que je m'intéresse à tous les ouvrages qui parlent de lui.
Pour autant, ne prenez pas ce roman pour une somme austère et assommante. Il fourmille de clins d'oeil comiques.
Comme Gaston Leroux dans « Le mystère de la Chambre jaune », il découpe une énigme en plusieurs parties, ce qui donne lieu à des chapitres titrés « Début de l'affaire du sac perdu », « Retour à l'affaire du sac perdu » ou « Première fin de l'affaire du sac perdu ». Il parodie certains passages de l'oeuvre de Proust, comme dans son chapitre intitulé « Les plaisirs et les nuits » (où il détourne le titre « Les plaisirs et les jours », premier ouvrage publié par Proust). Il évoque aussi les romans d'Agatha Christie. « Miss Marple jeta un dernier regard au cadavre, conduisit la pauvre veuve dans le petit salon, la réconforta en lui préparant un pot de thé (bizarrement, les traducteurs ignorent le mot « théière » et traduisent littéralement le mot « teapot »). Cela m'a fait rire car j'ai lu énormément de romans de notre chère vieille Anglaise et je n'avais jamais prêté attention à cette aberration !
J'ai donc beaucoup aimé ces « Enquêtes de Monsieur Proust » et vais lire le second volume qui vient de paraître.
Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}