Gaston Leroux travaillait comme reporter au Matin avant d'y devenir feuilletoniste avec ce curieux roman, qui met en scène la réincarnation de Cartouche, célèbre bandit du début du XVIIIème siècle, deux siècles plus tard, dans le corps et l'esprit de Théophraste Longuet, un homme timide, retraité à 41 ans, ex-marchand de timbres en caoutchouc et marié à Marceline qui le cocufie en douce avec son meilleur ami Adolphe.
Lorsque tous trois visitent la Conciergerie, Théophraste est soudain pris d'une fièvre inexplicable qui l'entraîne dans les caves de l'ancienne prison où il découvre un mystérieux petit papier caché dans la muraille où sont écrits des lambeaux de phrases incompréhensibles mais faisant allusion à des trésors. C'est le début d'une inquiétante métempsychose qui va malheureusement très mal se terminer pour le héros, ainsi que la préface nous l'annonce dès le début.
Ce roman-concours fût publié en feuilleton dans le Matin du 5 octobre au 22 novembre 1903 sous le titre Le Chercheur de trésors. Il distillait des indices au cours du récit sur les lieux fréquentés par Cartouche dans la capitale et en province afin de permettre aux lecteurs de découvrir et gagner sept trésors totalisant la somme de 25000 francs. L'histoire ne dit pas s'ils les ont trouvés, ni où... Mais cela devait fortement motiver la lecture du feuilleton et l'achat du quotidien chaque jour.
Après la lecture des 5 premières aventures de Rouletabille, cette première oeuvre de
Gaston Leroux est un peu déconcertante. Lorgnant fortement du côté d'E. A.
Poe pour les morceaux d'épouvante macabre ou de fantastique ésotérique, le roman est très inégal à la fois dans le plaisir de lecture qu'il procure et dans son écriture.
J'ai beaucoup apprécié de découvrir la vie extraordinaire de Cartouche, chef de bande à la tête d'une organisation qui comptait 2000 hommes vers la fin de sa vie ! Cartouche terrorisait les bourgeois et nobles de
Paris tout autant qu'il amusait le petit peuple avec ses espiègleries et farces aux dépens des nantis. de nombreuses anecdotes historiques sont rapportées dans le roman et d'autres sont revécues par Théophraste ou lui sont inspirées, ce qui donne les passages les plus intéressants du roman. Attention aux âmes sensibles, les tortures et la mort de Cartouche font l'objet d'un chapitre plutôt difficile à vivre pour ce pauvre Théophraste. Mais l'humour macabre domine, faisant passer plus facilement toutes ces scènes ainsi que les exploits imaginatifs mais très sanguinaires de Théophraste quand il est sous l'influence de Cartouche...
Mais si le feuilletoniste respecte les codes du genre avec rebondissements en série en fin de chapitre, mystère et suspense, il semble avoir joué au cadavre exquis avec des passages ou des titres de chapitres aussi étranges et farfelus que possible, qui produisent des enchaînement abrupts, peu travaillés, sans doute justifiés par l'obligation de rendre sa copie chaque jour à temps pour la publication du Matin. Je n'en citerai que quelques uns en exemple : le ronron du petit chat violet – l'art de saigner un veau – l'énigme du train qui disparaît (avec plan à l'appui !)- les catacombes – un peuple sans yeux avec un groin rose !
Sans doute ne faut-il pas chercher trop de cohérence à tant de loufoquerie mais je n'ai pas aimé ce côté décousu, qui tire à la ligne pour délivrer un chapitre en temps et en heure.
Je vais donc poursuivre ma série des Rouletabille, qui sont bien plus plaisants à lire !
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