Très vite, il fut captivé par les images qui défilaient sous ses yeux. Images de la vie au cœur de la forêt amazonienne, qui est une lutte perpétuelle pour la survie ; de pêche, de chasse, de travaux manuels tels que la construction de huttes, d’embarcations creusées dans des troncs d’arbres, et la fabrication d’arcs et de flèches. Scènes de réjouissances, de danses, de rites.
Penché sur les secrets d’une vie qui n’avait pas évolué depuis des siècles, il apprenait à mieux connaître ce peuple que frappaient les temps modernes, avec l’incompréhension et la cruauté des autres hommes.
La perspective des efforts à fournir, des difficultés à surmonter et des dangers qui peut-être surgiraient sur sa route, le laissaient impassible. Il était à Rio pour accomplir une mission et rien ne l’en détournerait. Il se savait seul, ou presque, pour mener sa tâche à bien, car Costavila ne pourrait compromettre sa situation. Il allait s’attaquer à la puissance, à l’argent qui corrompt tout, à l’inébranlable citadelle que représente un grand nom, mais la pensée d’Olivier le galvanisait.
Olivier… Un visage ouvert, des yeux clairs, un rire franc. Un sportif accompli, un aventurier dans le sens non péjoratif du mot, un garçon épris de lumière, de justice, qui s’était lancé dans l’aventure à fond et avait payé de sa vie sa faim de savoir, sa volonté de vérité, sa fougue.
Les Indiens ne sont pas des saints. Loin de là ! La plupart de ces êtres qu’on a pacifiés et qu’on s’évertue à christianiser, ignorent ce que sont le bien et le mal, et ils les pratiquent indifféremment avec une inconscience démoralisante. Souvent, il est difficile de juguler leurs mœurs cruelles. De plus, il faut les nourrir, les soigner. Vous le savez, leur organisme étant dépourvu d’anticorps, ils sont à la merci d’un rhume, d’une épidémie de grippe qui fait chez eux des ravages terribles. Il suffit qu’un Blanc porteur de germes arrive dans un camp pour que toute une tribu soit contaminée et décimée.
Olivier n’était pas un simple aventurier. Il n’entreprenait pas ses voyages sans motif. En Afrique comme en Extrême-Orient, il a dénoncé les affameurs de peuples, les fomentateurs de troubles, les trafiquants d’armes. Ici, il voulait monter une campagne mondiale pour faire cesser le génocide contre les Indiens d’Amazonie, dénoncé encore récemment par le scandale que vous savez. Parlant couramment le portugais, il avait mené une longue et sérieuse enquête à Rio et à Brasilia avant de partir pour l’Amazonie et n’avait pas caché ses intentions. C’est ainsi qu’il s’est créé des ennemis irréductibles.
Par cette chaleur les boissons chaudes désaltèrent mieux que les autres.