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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je l'ai lu d'une traite car il s'est révélé passionnant : l'auteur, un universitaire et intellectuel de gauche, s'est fait embaucher dans l'usine Citroën de Choisy juste après les événements de 1968 en prétendant n'avoir aucun diplôme, d'où ce témoignage historique. On découvre une entreprise où les ouvriers sont spécialisés de catégorie 1 s'ils sont d'origine française, de catégorie 2 s'ils ont une autre origine européenne, et ne sont que manoeuvres s'ils sont d'origine africaine. La hiérarchie reposait sur le racisme sans que cela ne choquât personne. La médecine du travail en 1968 ? On apprend qu'elle aurait prescrit de l'aspirine à la Mort si ça lui avait permis de travailler... ☠ Les syndicats ? Hum... le droit au travail ? On voit vite comment le patronnat l'entendait. Quant au titre, "l'établi", il trouve son sens dans le dernier chapitre où un vieil ouvrier méticuleux s'oppose à un bureau des méthodes dictatorial. Des portraits se détachent de l'ensemble, mis en relief par la volonté de l'auteur de rendre hommage à ses "camarades". Il ne s'agit pas d'une fiction, mais d'un ouvrage autobiographique et engagé, d'un cri de révolte. L'auteur a d'ailleurs fini par s'enfoncer dans le mutisme quelques années après avoir écrit cet ouvrage qui reste une plongée très éclairante parmi les ouvriers d'une usine.

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Dans cet ouvrage, Robert Linhart, intellectuel soixante-huitard, raconte son établissement chez Citroën, c'est à dire son entrée dans l'usine, en tant qu'ouvrier spécialisé, parmi les plus bas échelons, au coeur de ce qu'il espère être une lutte sociale acharnée.

On découvre avant tout la maladresse de l'intellectuel, éternel cliché qui revêt pourtant une immarcescible part de vérité, incapable de faire une tâche simple à la chaîne. C'est révélateur du fossé qui sépare la majorité des penseurs des classes défavorisées qu'ils croient défendre, et particulièrement amusant quand on sait que Linhart était maoïste, compte tenu du travail auquel se sont trouvée astreints les intellectuels sous Mao.

Un élément particulièrement intéressant du livre concerne l'auto-organisation des ouvriers par race, nationalité et même village d'origine. Les cultures s'exportent sans altération, avec une reconstitution au sein des ateliers des hiérarchies autochtones.

Linhart décrit avec sagacité l'hypocrisie des chefs qui font mine d'analyser le travail réalisé par les ouvriers comme s'il s'agissait d'oeuvres d'art, s'enquérissant des conditions de température ou d'humidité de l'atelier, non pour les ouvriers mais pour les objets qu'ils fabriquent, la matière ayant ici bas pris le pas sur l'humain.

L'usine subit les règles de la raison cartésienne : matérialisme et divisionisme. Ainsi, les ouvriers sont déshumanisés, esseulés, épuisés par les cadences et donc difficilement capables de s'organiser en syndicat, tels des prisonniers.

La lecture est rendue aisée par le talent littéraire certain de Robert Linhart qui nous fait ressentir l'humiliation des chefs, le broyage de la chaîne, l'excitation à l'approche de la grève, l'angoisse de l'échec du soulèvement populaire, etc.

On retrouve dans l'expérience d'établissement de Linhart les mêmes conclusions que Simone Weil tirait 35 ans auparavant : les ouvriers ne subissent pas seulement une violence de classe mais avant tout une oppression des machines. L'inexorable mouvement des machines et la privation de la liberté en tant qu'accomplissement par le travail formate des individus fantomatiques, brisés, dépressifs et résignés. de cela résulte la quasi impossibilité de s'organiser pour lutter, la majorité étant ainsi rendue inoffensive, inerte, impuissante.
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Au lendemain des événements de mai 1968, un jeune militant intellectuel se fait embaucher chez Citroën pour s'y "établir" le temps d'observer de l'intérieur les conditions de travail des salariés, de s'y familiariser, pour pouvoir ensuite les dénoncer et les inciter à protester collectivement. Un beau jour, alors qu'on leur annonce qu'ils devront travailler gratuitement 3/4 heure de plus le soir, pour récupérer les heures perdues en mai 1968, le narrateur organise des réunions. Une grève est décidée. La première semaine, elle compte 400 grévistes.

Sociologue français, Robert Linhardt rejoint fin 1968 la Gauche prolétairienne, qui vient d'être fondée par Benny Lévy. Il décide alors de devenir un "établi", c'es-à-dire de pratiquer ce que l'on appelle une observation participante. En quoi cela consiste-t-il ? Pour Jean Peneff, « on appelle observation participante en usine le fait, pour un sociologue, de participer, en tant que salarié, à la production dans l'entreprise pour en tirer l'information et la documentation la plus proche des faits et du travail concret. Cette participation se déroule généralement sur une longue période (trois mois à un an (... ) de manière à s'intégrer dans le collectif de travail, à se familiariser avec la forme spécifique de l'activité et à contrôler sur un grand nombre de cas les analyses dégagées » (Jean Peneff, Les Débuts de l'observation participante ou les premiers sociologues en usine in Sociologie du Travail, 38, n° 1/96, p. 26.)
Suite de la critique sur mon blog "Carnets de SeL"
Lien : http://essel.over-blog.com/a..
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Un témoignage passionnant sur les conditions de travail et sur l'engagement politique.
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L'établi, le poste de travail de l'ouvrier et l'intellectuel qui s'engage à l'usine ou sur les docks. L'auteur a fait partie de ses jeunes universitaires qui ont voulu travailler à l'usine pour y faire souffler un vent de liberté. Mais la réalité va vite le rattraper : la fatigue, la peur de ne pas suivre les cadences. Un texte qui reprend des choses que l'on sait déjà mais le fait avec beaucoup d'intelligence. Un essai intéressant qui se lit comme un roman.
Lien : http://madimado.com/2012/11/..
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Une lecture très interessante sur le mon de des ouvriers, celui de travailleurs a la chaine chez Citroen a partir de l‘année 1968.

Ce livre publie en 1978, est un ouvrage autobiographique, puisque Robert Linhart, s‘y fait embaucher en tant qu‘ouvrier spécialisé car il est diplômé et pourrait prétendre a un tout autre métier.

J‘ai lu ce livre comme une veritable analyse sociologique de ce qu‘était le travail a la chaine à cette époque.

Certaines descriptions comme les méthodes de recrutement ne seraient plus possibles aujourd‘hui sans un soulèvement des travailleurs . Enfin je l‘espere …

Extrait :

„ Il y a six catégories d‘ouvriers non qualifiés. de bas en haut : : trous catégories de manoeuvres ( M.1, M.2, M.3) ; trois catégories d‘ouvriers spécialisés (O.S 1, O.S 2, O.S 3).
Quant a la répartition, elle se fait d‘une façon tout a fait simple : elle est raciste. Les Noirs si t M1, tout en bas de l‘échelle. Les Arabes sont M2 ou M3. Les Espagnols, les Portugais et les autres immigres sont en général OS 1. Les Français sont, d‘office, OS 2“

Il évoque la „lobotimsation „des cerveaux par les taches répétitives au détriement de la santé, la modernisation decidee par la hiérarchie, les changements d‘horaires imposes, l‘humiliation permanente par les petits chefs….

J‘ai trouve cette lecture extrêmement interessante et vais essayer de trouver un roman sur ce même sujet mais a notre époque pour faire une comparaison des conditions de travail .

Peut être vais je lire a la ligne de Joseph Ponthus



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Bien écrit, on vit l'expérience avec l'auteur. Ses descriptions sentent le vécu ... Nous pourrions croire que c'est daté ... Mais ses rapports de forces sont encore présent dans notre société
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L'aventure des quelques intellectuels engagés dans une découverte du monde ouvrier en se faisant embauchés dans les usines après mai 68. Très intéressant.
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