Sous les étoiles glacées et la lune rieuse, Fen ne s’était jamais senti aussi seul et vulnérable. Il avait l’impression d’être piégé dans un cauchemar ; pas le sien, mais celui de l’Angleterre, celui d’une nation qui se croyait à l’abri de tout. Une nation qui, comme un ploutocrate vieillissant et contant de soi, pensait que son avenir ne serait que confort, satisfaction, politesse et approbation de ses pairs. Une nation qui n’aurait jamais pu prévoir la pénurie, la haine et l’isolement dont elle souffrait aujourd’hui. L’Angleterre dormait et faisait un cauchemar, et Fen avait hâte que sonne l’heure du réveil.
L'heure de lecture. La dernière de la journée. Celle où, après s'être imbibés de connaissances nouvelles, les élèves – et le professeur – pouvaient se détendre un peu. Depuis sa position dominante, Fen examina ces garçons et ces filles à la mine concentrée. Plus ils étaient jeunes, plus ils plissaient le front. Retour au calme, à la normale. Le silence ou presque. Quelques froufrous de vêtements. L'un renifle, l'autre toussote, se gratte un peu. Le ballet des pages qu'on tourne. Et puis, ces mouches qui continuent de foncer tête baissée sur la vitre.