Mon rythme de lecture, un peu ralenti, s'explique par la densité du récit, la richesse du vocabulaire utilisé (malgré mon niveau plutôt bon en anglais), et il faut bien le reconnaître aussi, mon manque d'emphase avec l'héroïne que je trouve un brin excessive dans ses réactions et par d'autres choses encore qui m'ont irritée.
Je m'explique.
Le récit s'ouvre sur les manigances de Feyre au coeur de la cour de Printemps et l'écheveau qu'elle tisse, fil à fil, méthodiquement, implacablement pour parvenir à ses fins : l'effondrement du royaume de Tamlin de l'intérieur, grâce aux graines de révolte qu'elle instille dans le coeur des sujets de la cour du printemps. On découvre une Feyre calculatrice, froide, guidée par sa soif de vengeance et heureuse d'assister à l'effondrement programmé de la cour du printemps.
A aucun moment je n'ai été admiratrice ou en emphase avec elle. Je trouve qu'elle est guidée par les mauvaises raisons. Elle ne peut pardonner Tamlin de s'être uni au roi d'Hybern, d'avoir transformé ses soeurs en fées et lui voue une rancoeur sans borne puisqu'il est celui qui l'a emprisonnée, ne l'a pas laissée s'exprimer librement, la confinant dans des rôles de potiches sans droit de parole : inacceptable pour cette héroïne au caractère bien trempé, qui ne cesse de s'affirmer au fil des tomes de la série ACOWAR.
Malheureusement pour la lectrice que je suis, ouverte au pardon et aux rédemptions, il n'en va pas de même pour notre chère Feyre qui s'est mis martèle en tête : Tamlin n'aura pas le droit à une seconde chance, il passe très rapidement de la catégorie « beau mâle fréquentable au tempérament tempétueux » au « vilain traitre tyrannique à détruire », sans passer par la case « tempérance : peut-être faut-il prendre du recul et réfléchir un peu sur les motivations de ce cher Tamlin… ». Car évidemment, il n'y a rien de tout blanc ou de tout noir dans cette série… Les actions de Tamlin sont régies par l'amour débordant qu'il voue à Feyre. Son instinct protecteur l'a poussé, dans le passé, à la freiner dans ses aspirations de liberté et d'action… Oui, c'est vrai. Mais bon, pourquoi ne peut-elle pas lui pardonner ? Rhys aussi a dû commettre des actes atroces, inavouables pour protéger les siens, et pourtant Feyre a su les accepter, passer outre pour lui offrir son coeur sans condition. Bref, je ne comprends pas pourquoi ce qu'elle accepte de l'un, elle ne le tolère pas de l'autre.
Aussi, je m'étais fortement attachée à Tamlin dans le premier tome… Pourquoi l'auteure tente t-elle de déconstruire notre empathie pour lui ? Cela ne fonctionne pas si bien pour moi ! Il a su faire preuve de tellement de patience, de douceur même, pour apprivoiser Feyre à ses débuts dans la cour du Printemps. Il a su la protéger aussi… Bref, la rancune est un vilain défaut et, dans ce sens, le comportement sans demi-mesure de notre héroïne m'agace (je n'apprécie pas non plus le traitement que lui inflige Rhys à la fin de ce tome : il manque cruellement de classe en tirant sur l'ambulance… Celles et ceux qui auront lu l'histoire sauront à quoi je fais allusion). Bref. Revenons à Feyre. Elle a la mémoire courte. Elle part au quart de tour, saborde la cour du Printemps et, à aucun moment, ne se dit qu'il n'est peut-être pas ce qu'il a l'air d'être et qu'il oeuvre pour le bien (il a exprimé dans le premier tome son rejet de la tyrannie et des régimes répressifs, asservissant les humains)…
Vous l'aurez compris, je continue à aimer le personnage de Tamlin (sentiment renforcé par les actions emplies de bravoures et d'abnégation dont il est l'auteur aux trois-quarts du livre mais qui laissent Feyre dans une indifférence certaine ou, en tout cas, qui n'éveillent pas en elle un sentiment de pardon). Or, je trouve que le vrai héro de ce tome, c'est lui car malgré l'amour fou qui le dévore, il ne cède jamais à la jalousie ou à la vengeance (lui!) !
J'ai trouvé aussi que les passages précédant la mise en place des alliances pour contrer les armées du royaume d'Hybern étaient d'un long, mais d'un long ! Je n'ai clairement pas accroché.
J'ai regretté que le passage décrivant la confrontation entre Feyre et le miroir Ouroboros soit aussi peu étoffé voire bâclé…
Je suis aussi déçue par la personnalité des soeurs de Feyre : Nesta est tellement froide que toute forme d'empathie envers elle m'est étrangère ! Déjà, dans le premier tome, la froideur et l'indifférence dont elle faisait preuve devant la jeune Feyre humaine contrainte à chasser dans l'hiver mordant pour nourrir toute sa famille m'avaient révoltée… Je ne comprends pas non plus la persévérance de ce pauvre Cassian : elle ne mérite clairement pas son attachement, elle se montre détestable et jamais encourageante ! L'auteure n'en dévoile pas assez sur les pouvoirs de cette dernière… A la fin de ce tome, je me sens frustrée car on n'est pas tellement plus avancé à son égard. Quel pouvoir si terrible a-t-elle réellement volé au Chaudron ?
Elain, quant à elle, est décrite comme une somptueuse beauté dotée d'un tempérament doux et délicat et est pourvue de visions, don offert par le terrible Chaudron qui n'a su résister devant tant de grâce lors de la transformation de cette dernière. Bon, ok, enfin moi, tant de platitude m'a rendue totalement hermétique ! Cette personnalité manque cruellement de relief et je n'apprécie pas le dédain dont elle fait preuve envers ce pauvre Lucien aussi bien malmené que sous exploité dans ce tome.
Bon et puis, le retour héroïque et mélodramatique du père de ces chères trois soeurs à la fin du récit m'a paru franchement capillotracté !
Autre bémol : j'ai lu le livre en anglais et l'auteur nous sert du « my mate » à tous les coins de pages quand Feyre fait référence à son cher Rhysand… Non mais, plus nian nian, tu meurs ! Puisque j'aborde le côté « romance », j'insiste aussi sur un autre point : ce roman n'est clairement pas à remettre entre toutes les mains… Ce n'est pas du « young adult », certains passages sont clairement explicites!!!
Revenons sur les points positifs : J'ai apprécié de pouvoir rencontrer, dans ce tome, les Hauts seigneurs des autres cours, Varian, l'amoureux d'Amren, le fait de revoir Tarquin… Il a été aussi jubilatoire de retrouver certains personnages terrifiants devenant des alliés « surprises »…
J'ai aussi apprécié la rugosité, l'âpreté du tempérament d'Amren qui s'avèrera être une carte maîtresse dans le dénouement de la terrible guerre opposant Hybern et les autres royaumes faes. Elle ne cesse de nous surprendre, fait preuve d'humanité (à cet égard bien plus que Nesta !) : cela transparaît dans ses actes guerriers et amoureux.
Les révélations de Mor nous éclaireront aussi sur ses tergiversations amoureuses…
Enfin, j'aime la « bromance » unissant Rhys, Cassian et Azriel. Tous trois ont vécu des moments très difficiles et de ces épreuves vécues ensemble, ils en sont sortis soudés à la vie, à la mort.
Le passage se rapportant aux retrouvailles entre Feyre et le suriel m'a émue aux larmes.
L'auteure nous laisse entrevoir une suite axée sur la relation Nesta/Cassian (il était temps car la romance axée sur Rhys et Feyre commençait franchement à sentir la guimauve). Je n'apprécie pas Nesta, vous l'aurez compris, mais je lui laisse une seconde chance et je me ferai, je l'espère, un plaisir de découvrir ses aventures avec Cassian…
Bref, j'ai pris du plaisir à lire ce livre mais pas autant que pour les tomes 1 et 2.
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