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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la population maghrébine fuit son pays et part s'installer en France, terre de toutes les promesses. En pleine reconstruction, le pays a besoin de main d'oeuvre, de bon marché évidemment. Des ouvriers arrivent de toutes parts, d'Algérie ou du Maroc. Des ouvriers du bâtiments, de l'automobile ou de l'industrie. Pour les loger, eux, et parfois leur famille, la France a simplement construit des bidonvilles sur des terrains vagues, en périphérie parisienne. de simples baraquements, sans eau ni électricité, pas de sol en béton et des murs décrépis. Parmi ces bidonvilles, il y a celui de Nanterre. Une seule adresse : 127, rue de la Garenne. Une appellation : La Folie.
Au 1957, il y a la famille de Kader. Lui, déjà installé depuis quelque temps, accueille en ce premier jour d'octobre 1962 toute sa petite famille, sa femme, Soraya, et ses deux enfants, Ali et Samia. Lorsque Soraya arrive dans ce bidonville, elle désespère de pouvoir vivre ici. Elle se désole de l'état de sa "maison", insalubre et précaire. À cela s'ajoute bientôt des problèmes d'obtention de papier. Kader, malheureusement, n'est qu'un cas parmi tant d'autres...


Laurent Jaffre met en avant, dans cet album, un épisode bien mal connu de l'après-guerre : la venue en masse d'ouvriers maghrébins installés dans des bidonvilles. Il installe son récit à La Folie, un bidonville de Nanterre et suit le parcours de Kader et de sa famille, de 1962 à 1966. À partir d'archives et de souvenirs d'époque, il relate une bien sombre période de la France des Trente Glorieuses. Un pays prêt à accueillir tous ces étrangers et leur donner du travail mais visiblement peu soucieuse de leur bien-être. Parqués dans des baraquements insalubres, ces laissés-pour-compte n'auront d'autre choix que de subir ces conditions de vie, dans l'espoir de jours meilleurs. L'auteur nous offre un album très instructif et intéressant, sans être rébarbatif, et poignant. Un travail fort documenté et riche qui rend un bel hommage à tous ces maghrébins venus aider à reconstruire la France. Graphiquement, le noir et blanc est du plus bel effet et le trait élégant.

Merci pour le prêt, Cécile...
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Dans les bidonvilles de Nanterre des années 1960. La dure réalité d'une famille algérienne auprès de ces 2000 personnes qui vivent sans eau ni électricité et dans la poussière. La plupart travaillent à l'usine automobile où il faut toujours plus de rendement. Comment les enfants envisagent leurs avenirs ? En noir et blanc avec un dessin très fourmi. Bien documenté et révoltant. Un passé peu glorieux pour nos politiques et patronat
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Un superbe album qui parle forcément aux habitants de banlieue, et qu'il ne faut pas manquer pour tous les autres. La richesse des sujets abordés est un témoignage de l'époque des années 60, mais elle nous parle toujours au 21è siècle : solidarité entre les immigrés, misère délibérément maintenue par l'État, hostilité généralisée de l'administration, guerre d'Algérie, urbanisme d'urgence.
Le dessin, finement crayonné est magnifique sur les grandes planches, voire les doubles pages, mais il lasse un peu dans les plus petites scènes.
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Tout comme de nombreux Algériens de sa génération (1960's), Kader a rejoint la France en 1962 pour participer à la construction des HLM de la banlieue parisienne. Logé mais surtout parqué au 127 rue de Garenne, autrement dit au Bidonville de la Folie de Nanterre, Kader espère faire des économies pour pouvoir offrir une vie meilleure à sa famille et pourquoi pas, acheter à termes une maison au bled. Malheureusement, ce qui sur le papier ressemble beaucoup à un rêve tangible, ne correspond pas aux espoirs nourris par les travailleurs immigrés qui ont accepté de partir travailler en France : hébergé dans une baraques en ruines dans des conditions de vie insalubre (pas de raccord à l'eau ni à l'électricité), Kader n'a d'autre choix que de s'adapter et de rassurer sa famille restée au bled en lui envoyant des photos de lui en costume avec en fond, de beaux clichés touristiques de Paris. Mais la réalité est autrement cruelle. Lorsque Soraya, la femme de Kader, le rejoint avec leurs enfants, Ali et Samia, ce n'est que désenchantements et désillusions : non, la petite famille ne sera pas logée dans une des belles maisons dorées des cartes postales envoyées par Kader mais dans la baraque 1957 du bidonville gris et boueux de la Folie. Exposée au froid, à l'humidité et vivant dans des conditions de vie déplorables, la petite Samia tombe sérieusement malade. Commence alors pour Kader et Soraya un véritable parcours du combattant pour obtenir l'accès à un logement décent...

Le bien nommé bidonville de la Folie ou l'histoire douloureuse des travailleurs immigrés maghrébins
L'histoire de Kader est celle de nombreux travailleurs immigrés Maghrébins venus en France dans les années 1960 à l'appel du gouvernement pour participer à la (re)construction du pays : construction de routes, d'infrastructures, de logements..., les immigrés ont constitué une main d'oeuvre bon marché que les français n'ont pas hésité à solliciter. Rêvant d'une vie meilleure, beaucoup d'Algériens parmi d'autres communautés, se sont laissés tenter par cet Eldorado où, à en croire certains, il suffisait de se baisser pour ramasser les billets. Pourtant, cet échange de bons procédés qui semblait au départ partir d'un principe louable (accueil en France pour du travail), s'est avéré être un véritable fiasco : en effet, si les premiers travailleurs immigrés des années 1950 étaient logés dans des « garnis » du centre-ville, la rapide saturation de ces logements meublés et l'arrivée des familles ont précipité l'installation de baraques de fortune sur les terrains vagues à proximité des usines et des chantiers. C'est ainsi que le bidonville de la Folie s'est construit sur les terrains de l'Établissement Public pour l'Aménagement de la Défense (EPAD) : « Sur les chantiers à proximité, le chemin de grue et la préfabrication régnaient en maître. L'EPAD, responsable de l'urbanisation de la zone, entraînait une transformation radicale du paysage. Tel un îlot perdu, la Folie subsistait au milieu de ce ballet incessant de camions charriants de la terre. Sa résorption n'était pas encore programmée mais la Brigade Z, constituée de démolisseurs aux ordres des autorités, empêchaient son extension. » (extraits).
Non seulement, les habitants du bidonville y souffraient du froid, de l'humidité et de la saleté (ils avaient honte d'aller en ville avec leurs chaussures inévitablement crottées de boue et enveloppaient leurs chaussures de sacs plastique pour les protéger) mais ils devaient en plus se coltiner la corvée d'eau (une seule fontaine d'eau mise à disposition pour 1500 travailleurs et 300 familles), devaient craindre les risques d'incendie et devaient en plus subir les contrôles incessants et les brimades et humiliations de la Brigade Z (sa mission était de contenir l'expansion du bidonville car le terrain devait être réhabilité pour accueillir les nouveaux quartiers de la Défense). Dans un contexte politique complexe alors marqué par la Guerre d'Algérie (1954-1962) et les conflits entre la France et le FLN, la défiance manifeste de certains citoyens français envers les populations immigrées qui s'est notamment traduit par les ratonnades et le massacre du 17 octobre 1961, envenime les relations entre les immigrés, les autorités publiques et les administrations. Pour être relogés dans les cités de transit ou dans des habitations salubres, les travailleurs immigrés doivent payer des pots de vin et faire face à des casse-têtes administratifs sans fin. La situation devient intenable et force est de constater que le rêve vendu par la France aux travailleurs algériens s'est définitivement vidé de sa substance et n'est devenu qu'un miroir aux alouettes... Heureusement, de nombreuses personnes à l'instar de Véronique Hervo ont milité pour défendre les droits de ces travailleurs immigrés et laissé des archives inestimables pour la reconnaissance de ce douloureux épisode de l'histoire de l'immigration en France...

Histoire, mémoire et bande-dessinée, un trio gagnant
Exploitant les enregistrements sonores et les photos collectés par Véronique Hervo au bidonville de la Folie dans les années 60, Laurent Maffré a travaillé ce projet de bande-dessinée dans le cadre de recherches du programme pluridisciplinaire de l'Agence nationale de la recherche (projet Terriat, Territoires de l'attente). Ce projet qui s'intéresse à la mise en attente des communautés en déplacement et en particulier à la manière dont les populations migrantes s'approprient les lieux et les moments de leur trajectoire interrompue, a permis cet excellent travail mémoriel sur l'histoire de l'immigration en France. Largement inspiré des témoignages des habitants et des documents d'archives hérités de Véronique Hervo, Laurent Maffré qui met intelligemment son talent de dessinateur et de narrateur au service d'un récit mêlant réalité et fiction, prouve une fois de plus que le 9è art sait avec justesse et brio, s'illustrer et se mettre en scène dans des projets scientifiques aux objectifs ambitieux comme des travaux sur l'histoire et la mémoire de l'immigration. Aussi, pour ses sobres dessins aux innombrables et minutieux détails, pour l'alternance de certaines planches aux applats gris marquant des situations tristes, tragiques ou angoissantes avec une majorité de planches en noir et blanc dominées par la clarté, pour la richesse de son contenu (malgré ses quelques 160 pages, cette bande-dessinée propose un contenu très riche), pour la qualité de ses propos (pas de jugements, ni de condamnations), Demain, demain est une lecture à découvrir absolument... Une formidable réflexion sur la thématique de l'exil qui devrait tous nous interpeller à une période maussade par les « crises migratoires »...

Pour compléter cette passionnante lecture, je vous invite à découvrir le web documentaire intitulé 127, rue de la Garenne, le bidonville de la Folie, Nanterre (frise multimédia illustrée et enrichie par les commentaires de Véronique Hervo et par les témoignages des habitants du Bidonville à l'poque) qui accompagne l'ouvrage (co-production de Arte).
Lien : http://embuscades-alcapone.b..
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« le bidonville Rue de la Garenne, dit la Folie, le plus vaste – 21 hectares – et le plus insalubre des bidonvilles de Nanterre, se situait sur les terrains de l'Etablissement Public pour l'Aménagement de la Défense (l'EPAD). Comme d'autres bidonvilles de Nanterre, le 7 Rue d'Equéant, Les Pâquerettes, le Petit Nanterre, il était relégué aux portes de Paris. En 1962, environ mille cinq cent ouvriers « célibataires » et quelques trois cent familles u habitaient, sans électricité, et sans eau courante. Pour tous, il n'y avait qu'une seule fontaine et qu'une seule adresse administrative : le 127 Rue de la Garenne » (Demain, demain)

Soraya est arrivée à Paris le 1er octobre 1962. Elle a fait le voyage avec Ali et Samia, leurs enfants. A l'aéroport, et parce que Kader n'arrivait pas, elle a fait comme il a dit. Elle a tendu le bout de papier qu'il lui avait donné la dernière fois qu'il était venu au bled et, comme il avait dit, elle a prononcé « Taxi ? ». le taxi l'a emmenée, elle a traversé Paris, ses monuments. Les maisons se sont espacées, puis ont laissé place aux immenses terrains vagues et aux chantiers de construction. Dans le bidonville, son époux l'a conduite jusqu'à leur maison. Attendre, toujours attendre en espérant pouvoir sortir un jour de cette cabane sans eau courante ni électricité.

D'ici-là, il faut gérer le quotidien, les enfants, la nostalgie du pays… et comprendre ce que Kader a vécu depuis qu'il est en France… En Algérie, on croyait qu'il ramassait l'argent par terre et qu'il avait un bel appartement avec vue sur Paris.

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Depuis quelques mois, j'éprouve de l'intérêt à lire des albums qui relatent la situation en Palestine ; les albums de Joe Sacco et Max le Roy sont mes principales sources d'approvisionnement. Depuis quelques temps, j'ai également débuté une série de lecture sur l'immigration, essentiellement l'immigration magrébine des années 1950 à 1970. Je crois que le premier titre lu et qui se référait aux événements d'octobre 1961 était Meurtres pour mémoire. Plus récemment, j'avais eu envie d'échanger sur Les Mohamed. C'est cet ouvrage qui a été déclencheur et motivé mes recherches pour en lire (et en apprendre) plus encore sur ce sujet. Maintenant, je vais certainement m'orienter vers Octobre noir à moins que vos suggestions ne m'ouvrent de nouvelles pistes de lecture.

Laurent Maffre a commencé son parcours d'auteur BD en publiant dans la revue Shot. Publié en 2006, son premier album – L'homme qui s'évada – est une adaptation de l'ouvrage éponyme d'Albert Londres. Pour réaliser Demain, demain, il s'est servi des archives de Monique Hervo (que l'on voit d'ailleurs intervenir sur quelques scènes de l'album) ; en seconde partie de l'ouvrage, un texte de Monique Hervo, 127, Rue de la Garenne, qui contient ses photographies et quelques témoignages des immigrés qu'elle a côtoyé de nombreuses années à La Folie.

Par l'intermédiaire d'une famille algérienne, on suit donc l'histoire qui est celle de centaines de familles immigrées. le prologue est le même : le chef de famille quitte le bled pour la France et son besoin de main-d'oeuvre. Il envoie la majeure partie de son salaire à sa famille et passe moins de deux mois par an en leur compagnie. Quelques années plus tard, ils le rejoignent en France et constate avec effroi que leurs conditions de vie sont pires qu'au bled. Puis, c'est l'attente d'un relogement. Et pendant ce long laps de temps : l'humiliation d'être ignorés, la honte, le racisme…

L'histoire commence pour nous le 1er octobre 1962, jour de l'arrivée en France de Soraya et de ses deux enfants. Les 140 pages du récit principal emmèneront le lecteur jusque 1966, date à laquelle la famille est relogée dans un Centre de transit. le récit contient de nombreux flash-back : souvenirs du personnage principal depuis son arrivée en France jusqu'à celle de sa femme, souvenirs du couple et de leurs amis en Algérie. Pas ou peu de voix-off si ce n'est certains encarts hors contexte, écrits par Laurent Maffre et présentant le contexte socio-politique ou décrivant le paysage de la Rue de la Garenne à l'époque des faits.

Pour illustrer son histoire, un trait fin et très fouillé. Un style graphique que je rapproche de celui de Simon Hureau. Les cases ont affranchies de contours, le blanc est une composante principale de la construction et introduit tantôt ses angoissantes effluves, tantôt la beauté de l'instant présent. Les descriptions visuelles sont détaillées, minutieuses. Elles rendent compte d'une émotion, d'une étendue (ce terrain vague est imposant, au moins autant que les engins de chantier qui creusent, aplanissent, amassent les monticules de terre et les déverse à la limite du bidonville, comme pour l'enterrer et le cacher à la vue du monde pour reprendre le constat formulé par un des protagonistes de l'histoire). Comme Hureau, le dessin a un cachet rare, ceci est certainement dû à la richesse des détails présents (les motifs d'un vêtement, l'étal d'un bouquiniste sur les Quais de Paris…), ce qui aide à recréer l'ambiance d'époque.
(...)
Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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Demain, Demain raconte la vie d'une famille d'immigrés algériens dans les années 60. Une mère et ses deux enfants viennent rejoindre le père installé en France, employé comme ouvrier du bâtiment. Les espoirs sont grands mais la réalité les noie bien vite.
La famille est installée dans un bidonville, le plus grand de Nanterre, la Folie, plus de 120 hectares de cabanes, d'humidité, de saleté et de misère.
Entre le racisme ambiant et la pauvreté, la famille tente tant bien que mal de s'en sortir...
Une véritable claque, un récit très bien construit et très bien documenté ( l'annexe de la fin, les photos d'époque) et qui donne une véritable idée des problèmes et des enjeux de l'immigration des années 60 en France.
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DEMAIN, DEMAIN, un titre plein de promesses reportées aux calendes grecques, tout comme ce relogement en HLM que la famille Saïfi attend.

Octobre 1962, Soraya et ses deux enfants arrivent à Paris pour rejoindre Kader, déjà installé. Ils ont quitté l'Algérie avec l'espoir d'une vie meilleure à Paris, du travail, de l'argent qui coule à flot, une grande maison...Enfin, c'est ce qu'on dit au pays, ce qu'écrivent à leur famille ceux qui y sont déjà, pour ne pas les inquiéter. Mais la vérité est beaucoup plus dure. La vérité, c'est que la vie pour les maghrébins venus travailler comme ouvriers en France dans le bâtiment ou à l'usine, ça se passe dans des bidonvilles aux portes de Paris. Des cabanes en tôle ondulée (interdiction de construire en dur), pas d'électricité, pas d'eau courante (une fontaine d'eau potable pour tout le monde).

Pour la famille Safiri, ce sera le bidonville de Nanterre, dit La folie. 21 hectares d'insalubrité. Des conditions de vie épouvantables et une liste d'attente interminable pour avoir droit à un logement décent.

De cette tranche de vie de la famille Safiri, on en apprend un peu plus sur le cette période trouble de l'après guerre d'Algérie mais aussi, de façon plus large, sur la vie des immigrés fraîchement débarqués et les difficultés qu'ils rencontrent au quotidien: comment faire des démarches administratives quand on ne parle pas français ou qu'on ne sait pas l'écrire? Comment vit-on le mépris et le racisme au quotidien? Les violences policières? Comment soigner ses enfants quand on vit dans l'insalubrité?

Rien de bien réjouissant dans tout ça, pourtant le ton de l'album n'est pas du tout déprimant. Je ne sais trop d'où ça vient... Difficile de dire qu'il flotte un petit vent de nostalgie dans ces pages...qui pourrait regretter une époque si dure? C'est peut-être la solidarité et l'entraide qui règnent au sein du bidonville qui réchauffent un peu l'atmosphère et la rendent plus légère...

En tout cas, cette lecture s'est avérée fort agréable et instructive (l'album est basé sur le travail de Monique Hervo, qui vécut 12 ans au côté des familles du bidonville) et je la recommande vivement.
Lien : http://lesgridouillis.over-b..
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Une bande dessinée très intéressante et instructive sur les bidonvilles de Nanterre au début des années 60 et le quotidien difficile de ses habitants. On y suit particulièrement Kader, un algérien, rejoint par sa femme et ses enfants, venu aider à la reconstruction de la France après la seconde guerre mondiale.
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Au début des années 1960, bon nombre de Maghrébins arrivent en France pour participer à la reconstruction du pays. Pour eux, venir en France est une magnifique opportunité ! Paris, ses belles rues, ses beaux logements ! Hélas, une bien triste réalité les attend à l'arrivée... Ils sont traités pire que des bêtes, entassés dans des bidonvilles aux portes de Paris, vivant dans l'insalubrité la plus totale. Et gare à ceux qui mettent des murs de béton dans leur "cabane" !! Les Brigades Z veillent au grain et n'hésitent pas à détruire toute tentative d'amélioration de la part des habitants. Les familles ont rejoint les ouvriers, et la vie vire au cauchemar. Les enfants sont malades, les mères se mettent à regretter l'Algérie. Mais impossible de quitter cet enfer. Les démarches auprès de l'administration française pour obtenir un logement en HLM sont sans fin, il faut "attendre" - c'est le maître mot, ressassé - et le maigre salaire gagné par le chef de famille sert tout juste à subvenir aux besoins de la famille...
Une partie de notre Histoire peu mise en avant - et totalement ignorée de moi-même... - dont les déplorables conditions de vie de ces ouvriers maghrébins sont mises en relief par le noir et blanc utilisé par l'auteur. Un témoignage coup de poing, qui paraît même anachronique pour un pays civilisé au XXe siècle et qui plus est "pays des Droits de l'Homme".
La postface qui suit le récit est également très parlante : il s'agit du témoignage d'une française qui a vécut dans ces bidonvilles et qui a défendu les droits de ces immigrés en tentant de faire connaître leur histoire. Photos et paroles de ces habitants sont mentionnés, enfonçant le clou du réalisme de cette histoire.
A découvrir absolument !
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Cette BD est un reportage rétrospectif sur l'un des aspects les moins glorieux des « Trente Glorieuses » : le bidonville de Nanterre, où fut entassée dans des cabanes insalubres, une main-d'oeuvre d'origine algérienne employée dans le BTP. Dans ce campement précaire, dit «La Folie», rue de la Garenne, environ 1500 ouvriers célibataires et 300 familles s'établirent au début des années 60.
Ce reportage a le mérite d'aborder la question de l'immigration d'une manière que les débats politiques empêchent, versant systématiquement dans le registre émotionnel ou sentimental pour des raisons électorales. D'une certaine façon, la condition des immigrés s'est aggravée par rapport aux années 60, en raison du défoulement hystérique et des fantasmes dont cette catégorie de la population est l'objet.
Les différentes facettes du problème sont abordées sans fausse pudeur : cette main-d'oeuvre algérienne est à la fois victime de sa propre bêtise et de son appât du gain ; elle franchit le cap en croyant que la France est une sorte d'Eldorado pour tous, où les richesses sont également réparties ; et l'industrie du BTP, avide d'une main-d'oeuvre corvéable, est la première bénéficiaire de cette duperie. L'ambition familiale traditionnelle fait le jeu de l'industrie moderne, pratiquement sur le modèle de la conscription militaire et sa tactique sous-jacente.
L'accent n'est donc pas tant sur les brutalités policières, occasionnelles, que sur un système économique qui, dans ces années, ne connaît pas encore les ratés qu'il connaîtra dès le début des années 70. On devine que la mesure de « regroupement familial », derrière l'apparence humaniste ou compassionnelle, ne l'est pas seulement, mais aussi une mesure profitable en termes d'encadrement d'une population d'ouvriers pauvres, dont la tendance à se tenir à carreau est redoublée du fait de la charge de famille (et les salaires touchés sont dépensés en France). le cas de figure du regroupement familial est typique de la manière publicitaire dont les politiques libérales endossent les habits de l'humanisme.
La guerre d'Algérie, dont le bilan très lourd (200.000 morts du côté algérien) ne sera connu que plus tard, place bien sûr « La Folie » de Nanterre en état d'ébullition. La manifestation du 17 octobre 1961 est, là encore, évoquée avec pudeur, du point de vue d'ouvriers pauvres qui n'avaient pas grand-chose à gagner à obéir aux ordres du FLN, ne pouvant se payer le luxe d'être « idéalistes ». On voit ici à quel point le sentimentalisme (ici le sentiment nationaliste pro-Algérie) imprime à l'homme le mouvement le plus erratique.
Je fais sans doute un compte-rendu quelque peu « anarchisant » de cette BD, mais il ne me paraît pas inexact de dire que ce reportage dessiné est assez exemplaire du témoignage dont il est difficile de tirer une conclusion idéologique quelconque, au service de tel ou tel parti. Cette quasi-absence de parti pris ou d'engagement est assez rare à l'heure où la lecture de la presse est devenue aussi enthousiasmante que celle du GPS, puisqu'elle consiste à fournir des coordonnées idéologiques ou identitaires au lecteur afin de le conforter.

Lien : http://fanzine.hautetfort.co..
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