Venu du Liban, un roman sur l'histoire contemporaine : attaques de l'EI en Irak et fuite des chrétiens syriaques vivant dans une zone désertique entre Kurdistan et Syrie, au milieu des tribus bédouines, sur fond de trafic d'oeuvres archéologiques. Un point de vue intéressant qui se lit vite (mais nécessite quelques connaissances) et une description superbe de l'oasis mais je n'ai pas réussi à m'enthousiasmer complètement : je trouve gênant de lire une fiction sur un thème aussi brûlant d'actualité et le discours sur le monde et les hommes trop désenchanté pour moi, surtout porté par ce personnage peu recommandable.
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Ce roman raconte la courte, mais intense, aventure d'un spécialiste de l'art oriental, égaré pour quelques mois, dans une oasis en Irak au profit d'un général de l'armée, qui souhaite par son entremise, vendre un trésor archéologique.
Il y a quelque chose du rivage des Syrtes, dans la première partie du roman, avec une longue attente, plutôt langoureuse, d'une transaction qui se fait à l'orientale, c'est-à-dire, avec lenteur, avec précaution, avec beaucoup de non-dits. le narrateur s'est fait prendre au charme de la fille du général, mais leur relation reste platonique, malgré une certaine complicité implicite. Au loin, se profile une menace, celle de Daesh, un état islamique qui grandit et qui menace la paix dans toute la région. le général est perçu comme le dernier rempart de l'armée irakienne, mais tout bascule à la moitié du roman, quand celui-ci meurt, Dans un attentat. le trésor a disparu, le commanditaire est mort, et le narrateur va tenter de démêler les fils de ce mystère. La seconde moitié du roman est donc un polar, une longue enquête, quelques années, après les faits, qui tente de reconstituer la trame des évènements.
L'ambiance de l'oasis avant, et après l'attentat, le fait que le narrateur se retrouve en quelque sorte étranger dans ce pays, puisqu'il est libanais, et que cette région d'Irak est une mosaïque de peuples et de cultures, des nomades, des sédentaires chrétiens des sédentaires chammars, des kurdes d'un peu plus loin et cette étrange mosaïque comme un équilibre instable, qui peut se briser d'un instant à l'autre avec l'arrivée des forces de l'EI. C'est ce calme avant la tempête qui fait tout le charme de ce roman. le charme du roman est malgré tout un peu gâché par le côté narcissique du narrateur, qui semble plus tourné vers lui-même, que vers la découverte de ce pays étranger, de ses habitants, de ces moeurs, la deuxième partie du roman est plus intéressante parce que justement à travers cette enquête, le narrateur sort de ce narcissisme et s'intéresse davantage au monde qui l'entoure qu'il tente décrypter c'est ce qui rend la deuxième partie de l'intrigue beaucoup plus Intéressante.
En conclusion le roman est réussi, atypique, avec le mérite de nous faire comprendre cet équilibre fragile entre les peuples dans une région où les communautés se côtoient, sans vraiment se comprendre, dans une région désertique, qui garde les traces de sa splendeur d'autrefois. le narrateur Se prend de temps en temps à évoquer les indices qui montre que ces terres furent autrefois fertile, et qu'il y a eu une sorte d'effondrement agricole. L'effondrement, il est au coeur du thème de ce roman puisque on parle de l'effondrement de l'armée Irakienne devant l'état islamique, l'effondrement de la force qui est censé représenter et soutenir un état et qui en fait n'est qu'un chateau de Paille. Ce qui ressort également à travers l'enquête, c'est la multiplicité des des alliances plus ou moins occultes, des trahisons plus ou moins abouties, des mensonges, à demi révélés. Et curieusement, bien qu'il s'agisse d'une histoire d'effondrement, c'est aussi une histoire finalement assez paisible qui commence, et qui se termine dans la paix d'un domaine de campagne, l'un en Irak, l'autre au Liban, et dans la douceur, finalement des relations humaines que le narrateur aura su établir. il y a quelque chose d'inachevé dans ce roman, parce qu'il reste sans cesse entre deux genres, parce qu'il évoque la contrebande au sein du marché de l'art, mais qui évoque aussi la vie d'un homme qui se passionne pour cet art qui essaye d'en retrouver la trace, et qui, en même temps, un bon moment à failli se compromettre à se faire lui-même trafiquant d'art. C'est aussi l'histoire d'un tournant dans une vie, puisque la mort du général a interrompu une transaction qui aurait pu amener le narrateur du côté obscur. Et finalement il s'est retenu de basculer, il s'est ressaisi, il a repris le cours de sa vie. C'est donc aussi un roman sur l'inluence, des rencontres que l'on peut faire, sur l'aura des grands hommes, Sur la trace, parfois dérisoire qu'ils vont laisser dans l'histoire, alors qu'ils auraient pu se trouver à créer un tournant de l'histoire. C'est probablement un des passages les plus saisissant du roman, quand le narrateur évoque comment tout aurait pu se passer différemment, si le général avait survécu, S'il avait réussi, par le charisme, qu'il avait envers ses hommes, à empêcher l'effondrement de l'Irak et l'invasion par l'état islamique. Que de morts que de souffrance auraient pu être évitées, mais il en fut pas ainsi. Et c'est intéressant de voir à travers cette narration , comment tout peut basculer comment parfois l'effondrement ne tient qu'à un fil.
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