AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de karmax211


Maël, ce sont les crayons, les pinceaux. C'est un graphisme singulier, une maîtrise de son art saisissante, interpellante, touchante, hyperréaliste, des couleurs travaillées qui vous enserrent les pupilles, vous subjuguent, vous fascinent, font renaître un monde, une époque, des personnages qui prennent forme et vie et vous invitent à les suivre.

Kris c'est la plume. Les mots d'un authentique écrivain, d'un pur produit des lettres dans ce qu'elles ont de plus abouti. Cet auteur est autant à l'aise dans les dialogues du quotidien, dans le langage oral que dans les didascalies littéraires où il n'hésite pas à faire intervenir Hugo, Gide à travers citations, références et poèmes. Sa langue à lui est de très haute tenue.

Avant de rendre son âme à Dieu, un vieillard raconte une histoire qui l'a marqué.
Nous sommes en Champagne, à Méricourt, dans les premiers mois de la Grande Guerre.
Trois jeunes femmes sont assassinées ; égorgées pour deux d'entre elles, étranglée pour la troisième. le ou les assassins transportent les corps dans les tranchées. Sur chacune d'entre elles est retrouvée une lettre d'adieu écrite par l'assassin et scellée avec la boue des tranchées, cette terre mère que " le grand troupeau " comme l'appelle Giono, arrose de son sang et pour laquelle il consent au sacrifice suprême... sans compter...
Cette terre où la femme a une représentation symbolique prégnante à laquelle ces hommes sommés de vivre l'invivable se raccrochent comme on se raccroche à cet ultime rempart d'humanité qu'elles incarnent. Ces femmes qui sont la survie, la rédemption, le renouveau.
Alors, qu'ils soient eux les victimes expiatoires de la Grande Boucherie, le fatalisme, la contrainte, le patriotisme les y obligent... mais qu'on assassine des femmes, c'est à front renversé assassiner la guerre. L'état-major en a conscience et confie la résolution de l'enquête au lieutenant de gendarmerie Roland Vialatte.
Fin limier, l'homme cultivé, catholique progressiste nous entraîne au coeur de la guerre et du mystère.
À sa suite, nous pénétrons dans les tranchées, au plus près du quotidien de ces hommes desquels on exige l'impossible, l'impensable... et ils nous parlent.
Un roman policier dont l'action se situe dans les tranchées des Poilus, quelle passionnante idée et quel passionnant roman-BD !
Au passage, parmi tout ce que ce magnifique ouvrage peut nous offrir, j'ai appris que contre une remise de peine on envoyait au front des gamins délinquants de 15,16 ou 17 ans ... ça ne vous rappelle rien ?...
-" Remise de peine contre un bon bol d'air dans les tranchées ! Ah, c'est d'la bonne idée venue d'en haut, ça. Puisque les gosses ont le vice précoce, on va les réhabiliter en les envoyant tuer ! C'est ça qui est régénérateur, pour sûr !"

Un extrait pour vous donner la tonalité :

-" Je voulais m'enivrer l'esprit du danger qui rôde, longer l'immense précipice de la mort à mes pieds, le divin absolu d'une vie suspendue au fil des cruels hasards, haletant chacun de ses instants comme une première, une dernière seconde...
Et j'eus droit à une nuit de fête foraine, avec ses manèges d'ombres et ses orgues étouffées, comme le songe d'un sourd qui rêverait en silence."

Les planches sont d'une esthétique qui m'a troublé, Kris est une plume de très haute envolée que j'ai découverte épaté.
La BD est un must dans le genre.
Première complainte d'une série de quatre, j'espère pouvoir lire l'intégrale !...









Commenter  J’apprécie          272



Ont apprécié cette critique (27)voir plus




{* *}