Aussitôt de retour à Nuremberg, Durer avait ouvert dans la maison paternelle un atelier à lui, et déjà les commandes lui arrivaient, dont plusieurs assez importantes : retables ou panneaux votifs, pour lesquels il se fit sans doute aider, ainsi qu'il était d'usage pour les ouvrages considérables, par ses apprentis, mais où sa marque est fortement imprégnée et sa main reconnaissable en plusieurs endroits.
De lui-même, l'homme ne peut exécuter aucun beau tableau ; mais qu'ayant beaucoup étudié son sujet il s'en soit tout imprégné, l'art ainsi semé en lui germera et portera son fruit, et tout le trésor secret du cœur se manifestera dans une oeuvre et une nouvelle créature. » Le reproche qu'on lui a fait d'avoir rarement senti ce qu'on entend par la beauté des formes (voyez même, dans certaines estampes comme la Grande Fortune, les Quatre Sorcières, la Petite Fortune, la laideur des nus féminins) est justement une preuve de sa sincérité, de son respect de la nature en présence des modèles vulgaires qu'il avait sous les yeux.
Ajoutez enfin à cet amour de la vérité et de la vie une qualité non moins précieuse pour un artiste, et peut-être le plus merveilleux de tous les dons départis à Durer : l'invention, une inépuisable fécondité d'imagination dont on ne se lasse pas d'admirer les trouvailles, toujours pittoresques et séduisantes.
Il a été réservé à certains artistes de donner de la physionomie, des idées et des conceptions du milieu où ils vécurent une image si expressive et si parfaite qu'elle semble comme l'émanation de l'âme de leur temps et de leur pays. Albert Durer est de ceux-là.
Plus ton œuvre sera conforme à la nature meilleur elle sera