Départ et non pas
Depart comme l'écrit obstinément la base de Babelio, sans correction possible.
Départ de Tanger, juin 1961. le rapatriement d'une famille vers la France.
Fait par la main de l'auteur, le frontispice est repris en petites unités déconstruites au bas des pages, comme les motifs d'un tapis déchiré…
Autre empreinte remarquable : la lumière de là-bas. Ceux qui ont habité, sont nés dans ces régions du Sud, en gardent sur la peau le souvenir brûlant, qui est impérissable. Cette bonne et belle lumière du pays d'enfance, façonnée d'or et d'ombres, traverse tout le livre. J'ai pensé à Camus, à « L'Envers et l'Endroit », à cette lumière algérienne vécue comme une richesse pour lui.
Et puis… les bruits, un certain trafic, certaines odeurs… tout ça typique, qui ne saurait venir d'ailleurs.
Le sentiment de perte nous accompagne tout au long de la lecture. C'est celui éprouvé par l'enfant que nous étions, quand dans nos jeunes années étions déjà porteurs de nos deuils à venir et des nombreux
départs qui jalonneront la vie.
La figure emblématique du
départ, donnée par le paquebot, symbole omniprésent de la perte et du commencement, avec sa coque énorme et entourée de gouffres, glissant inexorablement vers la séparation… d'avec la famille, d'avec l'enfance, d'avec le pays…mêle au bouillonnement de l'eau les sentiments contradictoires d'excitation et de peine, de curiosité et de peur, d'élan et de retenue…
Tout ceci se mêlant donne au livre une grâce, une sorte de cruelle douceur, de chagrin contenu.
À lire comme un poème.
« Et puis sur quoi, sur qui pleureraient-ils ? Sur eux-mêmes ? Sur le Maroc ? Sur tout ? Et puis quoi encore ! Ce serait bien trop, bien trop peu.
Gouffre au bord duquel ils se tiennent, que le paquebot est censé leur faire franchir mollement. »