Formidable chronique que ce récit autobiographique du dessinateur catalan
Jaime Martín qui s'ouvre en 1975 avec la mort de Franco et se termine dans les années 2000.
Nous aurons toujours 20 ans trouve le juste équilibre entre le récit initiatique - l'histoire d'un fils d'ouvriers de la banlieue de Barcelone passionné de dessin et de comics qui vit ses plus belles années en découvrant le hard-rock avec d'autres gamins du quartier- et le contexte historique, celui de l'Espagne de la fin du franquisme à la « transition démocratique », le 23 F., l'entrée dans l'OTAN et l'U.E…. Il est rare que le personnage (ici le jeune
Jaime Martín) le narrateur ( un
Jaime Martín quinquagénaire qui porte un regard plein de tendresse sur ses années d'apprentissage dans les années 80), et le lecteur marchent ainsi à l'unisson, tant la dynamique de ce récit initiatique est fédératrice.
Pour ma part, j'ai vibré, même si je n'ai pas le même âge, ni les mêmes passions.
Groucho Marx disait que « Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé."
Jaime Martín et ses amis auront toujours vingt ans, et il le prouve en recréant l'enfance, l'amitié, les premiers pas dans la vie active, l'amour, la paternité, ses passions pour les comics, les fanzines (Caníbal, Bichos , El Víbora ..), les soirées, les concerts de groupes (Ramones, Motorhead…) qui peuvent enfin venir jouer en Espagne et dont l'impact sera énorme sur les jeunes issus des classes ouvrières qui ne se reconnaissent pas du tout dans la Movida …
Et ce n'est pas seulement la génération des années 80 qui revient à la vie, mais celle de la guerre d'Espagne et celle des années 60, puisque le narrateur vivait dans une modeste maison de banlieue avec ses grand-parents (évoqués dans Jamais je n'aurai vingt ans), et ses parents (Les Guerres silencieuses).
Fidèle à son style, un dessin agréable et d'une grande précision, aux couleurs qui évoquent le ciné quinqui si emblématique de l'époque (mention spéciale à la couverture qui semble tout droit sortie d'un film de José Antonio de la Loma!)
Jaime Martín est un magicien qui nous fait voyager sans DeLorean au sein d'une classe ouvrière qui semble avoir disparu de la littérature et du cinéma. Merci.