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Nous voici plongés dans la grande Histoire et dans la vie d 'artistes, photographes pour la plupart, entre 1933 et 1937 en France et en Espagne, avec un focus sur Gerda Taro, pseudonyme réfléchi d'une des pionnières du reportage photos en temps de guerre. Une "oubliée de l'Histoire" ; la Capa's girl" comme aimait l'appeler Hemingway, et qu'il était temps de réhabiliter.

Cette jeune femme indépendante, militante, féministe, étonnamment moderne et séduisante, élève - et maîtresse, entre autres, de Robert Capa, n'a de cesse que de chercher à prendre LA photo qui symbolisera l'Espoir des républicains espagnols. En vain. Sa vie trop courte ne lui en laisse pas le temps.

L'écriture est légère, précise, fouillant les détails qui crédibilisent les portraits, les situations sans se perdre dans les fils noués des histoires de chacun. Et puis il y a l'auteur. Facétieux. Qui ne peut s'empêcher d'intervenir dans le récit de son narrateur, apportant une précision par ci, un rappel historique par là. Serge Mestre est un grand écrivain. Qu'il est urgent de lire.

Personnalité trop longtemps oubliée, Gerda Taro est racontée au plus près de ses pensées, convictions et engagements interprétés par l'écriture complice de Serge Mestre.
En effet, on sait des choses de Gerda grâce à sa biographie (Imre Schaber) mais pas tout, loin de là, effacée qu'elle a été par le mythe Robert Capa. Serge Mestre la ravive en une femme indépendante, déterminée, libre, engagée pour témoigner.
Sa mort à Brunete à la veille de ses 27 ans nous empêche de la mieux connaître, ailes brisées alors qu'elle avait choisi, en femme libre et rare à cette époque, de prendre son envol à l'écart de « son amoureux » comme le dit si bien Mestre.
Il est à mes yeux intéressant d'associer dans la découverte de Gerda Taro ce livre et, ensuite, l'ouvrage de Pierre-François Moreau « Après Gerda » (voir par ailleurs dans mes livres). Deux oeuvres de fiction qui mettent en perspective la relation tumultueuse de l'indéniable couple Taro - Capa avant et après le drame. Et tant pis si les versions de la prise de la photo la plus iconique de la Guerre d'Espagne, la « Mort d'un soldat républicain » prise par Capa à Cerro Muriano, un village de la région de Cordoue, diffèrent diamétralement dans les deux ouvrages. C'est cette liberté des romanciers qui nous laisse la place de nous rapprocher au plus près des personnages et, ici, de cette magnifique Gerda Taro.