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Citations sur Cité 19, tome 2 : Zone Blanche (21)

- Parce qu’un rêve ne vaut rien s’il ne se frotte pas au réel. Loin de la réalité, un rêve n’est qu’un passe-temps puéril, un vulgaire refuge pour opiomanes et autres junkies...
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Faustine marchait d’un pas rapide sur les boulevards. Elle aurait dû se sentir soulagée d’avoir fui à temps, de s’être soustraite aux spectateurs de la lanterne magique qui avaient failli l’écharper.

Pourtant, dans sa confusion, elle devinait qu’ils n’étaient pas les plus dangereux.

Il y avait ce nom : Zapruder. Un nom qui semblait venir d’une autre époque. La sienne, pensait-elle. « ZAPRUDER TE VOIT… » Quel sens avaient ces mots ? Était-elle surveillée, épiée à chaque instant ?

Tandis qu’elle slalomait entre les promeneurs du boulevard des Italiens, une foule de questions se pressait dans son crâne.

Depuis le début, elle trouvait étrange cette ville qui ressemblait trait pour trait au Paris du Second Empire. Une métropole de deux millions d’habitants, une capitale laborieuse et festive, pleine de lumières et de reflets. Les effluves, les postures, les enfants qui la frôlaient avec un cornet rempli de marrons et de dragées, tout lui semblait si réel !

Trop réel ?
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Sylvia m’a trahi.

Sylvia a fait entrer sa propre fille comme cobaye dans Cité 19.

La fille de Sylvia pourrait être le cobaye X 99.
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— Ce n’était pas elle.

Zapruder avait légèrement pâli.

— Comment ?

— La fille dans le couloir du cinquième sous-sol. Ce n’était pas cette gamine.

— Qui, alors ?

— À ton avis ? fit Zapruder en passant son index sur un écran. Elle nous a mis sur une fausse piste… Elle s’est servie de Lucie Van Dinh comme d’un leurre.

— Sylvia ! s’exclama Popescu.

Zapruder reporta les yeux vers le corps inanimé de l’adolescente.

— La gamine ne mentait pas en disant n’être jamais allée au cinquième sous-sol. Sylvia s’est fait passer pour elle. Il lui a suffi d’une perruque et de quelques habits.

— Et le passe ?

— Un double, probablement. Elle s’en sert chaque fois qu’elle monte sur la plateforme 9. Les données que nous avons enregistrées, les connexions, les entrées et sorties, n’étaient pas toutes le fait de Lucie Van Dinh.

— Pour la plupart, il s’agissait de Sylvia…

— Si j’avais su, fit Zapruder en secouant la tête, j’aurais réagi bien plus tôt. Je ne voyais rien de surprenant à ce qu’une ingénieur plateforme modifie les données d’un cobaye. Mais depuis une semaine, les connexions se multipliaient. J’avais prévu d’interroger Van Dinh et Sprenger là-dessus. Ce n’était ni l’un ni l’autre. Mais Sylvia qui veillait sur sa fille.

— Si ce n’était pas la gamine dans le couloir du cinquième sous-sol, comment a-t-elle entendu parler de la Machine ? Comment a-t-elle deviné l’existence du protocole bis ?

— Elle n’en a pas entendu parler, répondit Zapruder. Elle a déduit leur existence…

— Après seulement six mois dans C.I.T.É ?

Popescu baissa les yeux.

— Nous aurions dû la garder, ajouta-t-il.

— Non.

— « Non » ?

Il leva un regard étonné vers son patron. Zapruder continuait d’actionner ses écrans. Popescu comprit qu’il cherchait à localiser Sylvia dans le laboratoire.

— Elle est venue dénoncer sa responsable hiérarchique. Cette petite ambitieuse ne se serait pas arrêtée en si bon chemin… Elle nous aurait dénoncés tôt ou tard.

— Alors pas de regrets à avoir, fit Popescu.

— Des regrets ?

Son patron avait tourné vers lui des yeux hagards. Popescu comprit qu’il pensait à Sylvia. La femme qu’il avait séduite, ensorcelée même.
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— J’ai réalisé leur rêve. Historiens, architectes, photographes ou simples flâneurs… Tous nos cobayes sont amoureux du XIXe siècle.

Réprimant mal son excitation, elle demanda :

— Comment faites-vous, docteur Zapruder ? Comment faites-vous pour détourner les soupçons de la police ? Cinq cent soixante disparitions, cela ne passe pourtant pas inaperçu !

— Il y a quarante mille disparus en France chaque année, observa-t-il d’un ton confiant.

— Mais nos cobayes ont tous en commun une familiarité avec le XIXe siècle… Cela aurait-il échappé aux enquêteurs ?

— Ils ont des raisons suffisantes pour ne pas s’attarder sur ce critère.

« Les flics ferment les yeux », comprit-elle. Un frisson lui courut sur l’échine. L’Œil était encore plus puissant qu’elle ne l’imaginait.
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Voyez-vous, reprit-elle, ce cobaye androgyne est doté de la capacité de mobiliser à son profit les rêveurs des autres plateformes. Même ceux qui ne l’ont jamais croisé dans le simulacre. C’est comme si son imagination prenait le pas sur celle des autres, comme si tout le monde se mettait à rêver le rêve de FX 56.
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La tour passait pour un instrument de mesure météorologique.

Ce qu’elle permettait de mesurer en vérité, c’était la rotation de la Terre.

Les yeux de Zapruder suivaient la trajectoire du pendule.

— J’ai besoin, dit-il, de garder à l’esprit le mouvement du monde. La pulsation du temps.

Elle ne l’avait jamais vu aussi songeur. Elle ressentait comme un privilège le fait de recueillir ses confidences.

La voix de Zapruder prit une sonorité tranchante.

— Eh bien ? Ce code Prisme ?

— Docteur Zapruder, bégaya Lucie. Il y a un traître dans le labo.

— Un traître, fit-il d’un ton morne.

Ses yeux ne suivaient plus le mouvement du pendule, ils fixaient le vide.

— Vous l’avez identifié ?

— J’ai bien peur qu’il ne s’agisse de…

Il attendait. Lucie ne pouvait plus revenir en arrière.

— Votre directrice adjointe.

Elle pencha la tête sur le côté. Zapruder demeurait impassible.

— Désolée.

Elle venait de lui annoncer qu’il était trahi par son plus fidèle lieutenant.

Aussi s’étonna-t-elle de percevoir un léger sourire sur les lèvres de Zapruder.

— Tu as la preuve de ce que tu avances ?

— Eh bien, je…

Le tutoiement l’avait troublée. Elle se dit qu’après tout il avait bien le double de son âge.

Elle plissa les yeux et tâcha de lui exposer clairement les faits.

— Il m’est très vite apparu que Sylvia manifestait… (Elle laissa un temps puis, retrouvant son débit rapide et cristallin :) Un intérêt particulier pour un cobaye de la plateforme dont j’ai la charge.

— La plateforme 9.

Elle acquiesça d’un signe de tête.

— Ce cobaye, une adolescente prénommée Faustine et initialement dotée du code FX 27, s’est révélé un sujet hors norme. Elle a changé d’avatar en cours de protocole. De la jeune fille de dix-sept ans qu’elle est en réalité, nous l’avons vue se métamorphoser en jeune homme.

— Se « métamorphoser » ? fit-il comme si ce mot le dégoûtait.

— Le changement de sexe n’est pas total, se hâta de préciser Lucie. Elle a gardé des caractéristiques féminines. Il s’agit du premier cas d’androgynie apparu en cours de protocole.
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Oui, Sylvia, sa chef exécrée, lui rappelait sa mère.

Une mère à qui Lucie n’avait jamais pardonné de l’avoir fait suer sang et eau, privée de vacances et de loisirs, poussée sans relâche à l’excellence, du jour où elle avait découvert que sa fille était une enfant prodige.

Lucie avait hérité de l’ambition démesurée de madame Van Dinh, mais avec quelques dommages collatéraux : elle ne parlait plus à sa mère depuis qu’elle avait passé son bac à douze ans.
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Pour le concepteur de Cité 19, le rêve n’était pas considéré comme le résidu des émotions de la journée, mais au contraire comme l’antichambre de la réalité. Une rampe de lancement vers l’avenir.

En d’autres termes, les rêves, pour qui savait se pencher dessus, recelaient des promesses innombrables. Pour Zapruder, leur impact sur la réalité, loin de rester une hypothèse invérifiable, était une certitude scientifique.
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Le génie de Zapruder, avait deviné Lucie, était de se pencher non pas sur des rêves individuels, séparés les uns des autres, mais d’explorer les ramifications d’un rêve communautaire. Un rêve en réseau, à l’image de la société, et pouvant virer comme elle au cauchemar.

Lucie, qui assistait à tous les séminaires de protocole, avait très vite soupçonné que la recherche médicale n’était qu’une facette de Cité 19. Peut-être même un simple prétexte. Elle avait perçu que le ton de Zapruder montait en intensité, devenait exalté lorsqu’il évoquait la capacité des cobayes à s’entraîner les uns les autres.

En surveillant la plateforme 9, Lucie avait compris que le simulacre pouvait mettre en évidence les talents particuliers de certains cobayes.
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