La daphné, avec une teinte analogue au lilas, en rappelle l'odeur, la suavité pénétrante. Près d'elle, l'orchis vanille détachait de l'herbe pâle la sombre pourpre de son épi. Nul parfum plus fidèle. Même au fond d'un herbier, couché et enterré, il donne un souvenir de son âme odorante qui semble aimer encore.
L'incertain de toute chose nous frappait. Tout était doux; on voyait bien peu les glaciers, par un angle étroit à peine; mais leur verdâtre sourcil ne promettait rien de sûr.
Notre berceau, la terre, où naquit notre race, n'est-elle pas aussi un berceau pour renaître?
Des sens grossiers nous font aussi l'âme grossière, pour le plaisir quelconque, sans goût, sans souvenir.
Que de jours charmants j'ai passé au pied de la sainte montagne, entre Rama et Sita, devant les neiges étincelantes, entre les gracieuses cascades et les forêts chargées de fleurs!
La montagne n'est jamais sans vie.
"Nulle part on ne sent plus les libertés de l'âme." J'en eus le sens très vif, lorsque jeune, ignorant, je suivis pour la première fois ces routes sacrées, lorsque, après une longue nuit passée dans les basses vallées, trempé du morfondant brouillard, je vis, deux heures avant l'aurore, les Alpes déjà roses dans le bleu du matin.
Ces lacs, muets confidents du glacier, qui par eux sort de sa nuit, se révèle, furent pour nos aïeux les Celtes un objet de terreur et de culte. Ils semblent pleins de mystère; on y sent un attrait sauvage; qui les vit y pense toujours.
Cette pluie plaisait aux prairies; elles étaient très fleuries. Elle plaisait aux ruisseaux. Il n'était jusqu'au plus petit qui ne jasât, murmurât. Plusieurs, gros, forts et rapides, d'un glouglou puissant, semblaient discorder avec ces lieux modestes et plutôt petits. Ils venaient de haut et de loin, étaient bien visiblement fils d'un monde supérieur.
Monde sombre, qui au premier coup d'oeil semble déshérité, vide, un royaume de la mort. Mais la vie générale y triomphe au contraire. Les deux âmes du globe -- magnétique, électrique -- chaque nuit font fête dans le désert du Pôle. Leur aurore boréale est sa consolation sublime.