Parmi les beaux ouvrages de Quellin, nous mettons encore au premier rang la Cène qu'on voit à Notre-Dame de Malines. Le repas a lieu dans un portique sans plafond : un entablement soutenu par de hautes colonnes se dessine sur des arbres majestueux et sur l'outremer du ciel. Un double escalier avec des balustrades, qui occupe tout le devant de la toile, conduit vers la plate-forme, où sont assis le Rédempteur et les apôtres. Rempli d'une vive émotion, saint Jean croise ses mains sur sa poitrine, tandis que Jésus consacre le pain emblématique. Judas se lève pour quitter la table et aller trahir son maître, car c'est là un de ces projets qui donnent de l'activité aux lâches. Les têtes nobles et intelligentes des autres disciples n'expriment que des sentiments généreux, comme celles du Christ et de l'apôtre bien aimé.
Une chose singulière , c'est que Diepenbeck ne se fit pas recevoir franc-maître avant 1638. On ne peut expliquer une admission si tardive que d'une manière : avant cette époque, il travaillait uniquement pour Rubens et n'avait pas besoin du diplôme qui autorisait à travailler pour le public. Les jésuites avaient fondé à l'église Saint-Jacques , en 1585, une pieuse confrérie que l'on nommait la Sodalité de la Vierge. Abraham van Diepenbeck s'y affilia et, le 18 juin 1639, fut promu au grade de consultor, espèce de titre honorifique.
Une fois établi dans sa champêtre demeure, tout devint pour Teniers sujet de tableau. Il ne se donna pas la peine de choisir entre les mille accidents de la nature et de la vie rustique. Les premières occupations de l'année comme les dernières, labour, se mailles, coupe des foins, moisson, rentrée des gerbes, travail des batteurs eu grange et des vanneurs, chasses de l'automne, effets de neige, tristes paysages que tourmente une bise âpre et impétueuse, étaient fidèlement retracés par lui. D'un esprit simple et juste, il peignit les hommes, les arbres, les prairies, le ciel, les nuages, les terrains, les costumes, les moeurs, le dedans et le dehors des maisons, comme ils s'offraient à sa vue.
Les personnages de Teniers sont aussi réels que la scène où il les place. Beaucoup d'amateurs, de critiques s'étonnent de les voir si courts et si trapus. Ils se demandent pourquoi l'artiste leur a donné ces lourdes proportions, quelle race humaine lui a fourni de pareils types. Soyez sûrs qu'il n'a pas été les cher cher bien loin, car il tenait au sol de sa patrie comme les vieux chênes de la forêt de Soignes.