Nous n'osons plus dire "non" ni exprimer un avis divergent, de crainte d'avoir tort... et de faire des vagues. Nous refoulons le "non" au lieu de chercher à l'expliciter, pour aller de l'avant. Nous coupons court aux discussions, si celles-ci s'enflamment, par un "calmons-nous" de mauvais aloi qui signifie plutôt "taisez-vous". [...] Nous fuyons la crise, alors que celle-ci est souvent porteuse de salutaires remises en question.
Je suis convaincu qu'on ne peut pas vivre sans règles. Et ce n'est pas en m'opposant systématiquement à toutes les règles que je serai créatif ou vivant ! Que de mouvements révolutionnaires ont créé des règles encore plus rigides que celles qu'ils prétendaient dénoncer ! Les casseurs qui noyautent les manifestations pensent être libres parce qu'ils s'attaquent aux règles avec violence, mais ils se trompent de servitude. Ils restent prisonniers de leurs propres schémas.
(La méditation) Elle ne nous demande rien. Elle ouvre un espace où nous sommes autorisés à nous foutre la paix. J'ignore s'il faut méditer tous les jours ou deux fois par semaine. Je sais seulement que la méditation est perdue d'avance si on l'installe dans notre vie comme une nouvelle consigne. Peu importe si vous n'arrivez pas à méditer certains jours. Si parfois, en vous asseyant, il vous arrive de vous lever aussitôt. N'essayez pas de relever un défi ou de tenter de réussir quoi que ce soit.
C'est quand on est le plus à nu, le plus authentique, quand on ne triche plus, que l'on trouve la possibilité de rencontrer les autres pour de bon.
Nous voulons être parfaits parce que nous refusons l'échec, nous le considérons comme une catastrophe, une honte, un point final à notre parcours, qu'il soit professionnel ou sentimental. Nous sommes éduqués à oublier que dans la vraie vie, l'échec est non seulement inévitable, mais surtout indispensable : c'est lui qui nous fait grandir. Si nous n'apprenons pas à échouer, nous échouerons à apprendre.
Méditer, au fond, c'est tout simplement le fait d'être. Le fait de s'arrêter, de s'octroyer une pause, de cesser de courir pour rester présent à soi, pour s'ancrer dans son corps. c'est une école de vie.
Nous sommes conditionnés à toujours "faire" : cuisiner, travailler, aimer, regarder un film, répondre au téléphone. Même quand nous disons "je ne fais rien", en réalité nous faisons plein de choses : nous zappons sur notre télé, nous bavardons dans notre tête, nous passons d'une activité et d'une pensée à l'autre, dans la discontinuité et la peur d'un moment de silence.
Ecouter le chant d'un oiseau n'est pas seulement entendre un son. Mais pour cela, encore faut-il savoir être présent.