Citations sur Héros, tome 1 : Le Réveil (13)
Et pour tout te dire, j'ai parfois l'impression qu'il est plus ardu de lutter dans ce monde de cols blancs que dans les sphères occultes!
Rien à faire, une force colossale protégeait l'adversaire, et la vision d'Alex se flouta. Un sang épais coulait sur son front, deux tentacules avaient déjà percé son ventre, rongeant son épiderme pour entrer en lui.
L'abomination avança dans sa direction, conquérante; et ce qui sortait de sa gorge n'était qu'un râle incantatoire, le vestige d'une langue perdue et immonde.
Alex comprit qu'il allait mourir, ou qu'il deviendrait fou s'il continuait de faire face à ce spectacle atroce.
Alors dans un sursaut, il poussa un hurlement à s'en briser les cordes vocales et une lumière irradia de lui, attaquant les lianes de chair, les embrasant, les consumant. La forêt entière tremblait au son de sa colère.
Le rayonnement flamboyant bouleversa les éléments, un vent terrible se leva et la charge énergétique frappa la chose de plein fouet, le repoussant à plusieurs mètres. Dans un même mouvement, les tentacules glissèrent du corps d'Alex, enfin libre.
- [...] Sérieux, Mat, trop mal proportionné! On dirait un dessin de quand t'avais huit ans [...]
- Et ta sœur, elle est mal proportionnée? répliqua Matéo. Il claque carrément, c'est juste que t'as pas d'yeux!
- José, sérieux ! On en a causé dix mille fois : on est en France, on reste sur « Héritier » ! « Legacy » ça fait Marvel, c’est pas du tout l’esprit de Héros ! Pourquoi tu t’entêtes à pas comprendre ?
- Parce que déjà, c’est moche, riposta José. « Héritier », on dirait un nom de vermifuge pour chien ! Et puis merde, il faut penser global, mondialisation ! Avec Legacy, on frappe le marché ricain direct.
- Allez... Merde, d'habitude c'est moi qui dois me bouger !
- Elle habite à perpète... Moi je suis en mob' mais toi, tu feras comment pour rentrer ?
- Mat : je vole. Je serai de retour chez moi avant toi.
- Bâtard, c'est vrai que tu voles...
- Ouais. En vrai, j'ai toujours pas essayé. Ça me fout trop la trouille.
[Son père] lui tendit un exemplaire du numéro 960.
- Eric m'a dit que tu avais prêté le tien à ton copain. Alors je te l'ai racheté pour que tu puisses le lire aujourd'hui. C'est un sacré geste, mon grand, que tu as eu.
Ému, Matéo se rappela que Grand-Père Martin lui avait souvent fait ce genre de surprise quand il rentrait de l'école, lui offrant un inédit ou un numéro spécial lorsqu'il s'était vraiment bien conduit. L'alchimie de cette saga tenait à ça, ces histoires de gestes et ces moments de transmission familiale. Il avait appris d'elle et continuait d'apprendre car, même s'il ne la lisait plus avec le même regard que quand il était plus jeune, il éprouvait toujours un plaisir neuf à se plonger dans ces aventures à la fois passionnantes et angoissantes, découvrant des subtilités qui se révélaient à lui à mesure qu'il grandissait.
– Tu crois pas qu'il y a plus important que cette soirée toute naze? On est à l'aube du Réveil d'une créature divine extraterrestre qui ère probablement sur un autre plan interdimensionnel et toi, tu veux juste danser sur du R'n'B de merde avec des boloss et boire du rhum-orange, tout ça sous le toit d'un membre de la secte millénariste qu'on est censés affronter, alors qu'en plus, une tempête de dingue arrive… ça me rappelle ta lubie pour les yaourts : ton fabuleux sens des priorités.
Lorsque la porte claqua derrière lui, il releva la tête et tomba sur son reflet dans le miroir de l'entrée : la grenouillère squelette, ses cheveux hirsutes... Pour la première fois de sa vie, il admit qu'il pouvait y avoir une différence entre penser avoir du style et en avoir vraiment.
Au-delà du lien d'acier qui se forgeait entre eux, ce qui les sauvait aussi, ils en étaient de plus en plus persuadés, c'était d'avoir inconsciemment toujours su que cette réalité immatérielle et horrible existait. Le fait d'avoir côtoyé ces univers extraordinaires depuis l'enfance, à travers les pages de Héros, expliquait l'étonnante faculté de leurs esprits à en accepter la réalité. Héros était en chacun d'eux. À force de lire ces récits dans lesquels l'homme n était qu'un détail, un obstacle mineur se dressant face à des choses plus anciennes et plus grandes que lui, ils se découvraient capables d'affronter la réalité dans toute son horreur.
Ce moment était pour eux, à jamais : quelques minutes pendant lesquelles il allait demeurer l’unique témoin de la plus grande conquête du monde. Il lui avait tendu ses bras, elle avait gloussé et, d’une démarche fière et maladroite, avait franchi la menue distance qui les séparait l’un de l’autre.