(…) Je ne veux pas verser de larmes ;
On pleure, on est aveugle ;
Il vaut mieux voir plus clair
Malgré le souvenir de ton sourire absent.
La lumière du sang n'abolit pas l'amour.
Le soleil des charniers doit mûrir des bourgeons.
Décembre 1945
I
Après-guerre
Mutisme des falaises éblouies
Ocre et sang
Les statues se drapent
Têtes fracassées dans l'abîme des balles
Seul crépite l'air sec
À genoux le chercheur ressuscite les dieux
Dormant encore par miracle
Sous les mottes friables
II caresse la douce poussière
Effleure les fissures
Offre la saveur du vent aux bouches devinées
Aux paumes légères le sol
Cède les courbes des paupières
Les lèvres retenant la parole
Alliance d'univers
Le silence devient langage
Et les vies unifiées
Incandescence de plein été
(…) O, Camarade !
On vise entre les épaules couleur de sable…
Une trace de joie éclaire encor tes lèvres…
De ce sourire éternisé même la guerre
N'a pu priver leur mort courageuse et légère
juin 1944