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Critique de Eric75


Austin Mitchelson et Nicolas Utschin (qui ça ? Ah oui, Nicholas Utechin, membre honoraire de la Société Sherlock Holmes de Londres ! Compte tenu du nombre impressionnant de coquilles de cette publication, on hésite entre une coquetterie de l'auteur et une erreur de l'éditeur pour expliquer ce curieux changement de patronyme), nos deux compères holmésiens, récidivent après Menace sur Londres avec ce deuxième et dernier épisode de la série.
Dans « Les oiseaux du meurtre », traduction de « The Hellbirds », il est beaucoup question d'armes secrètes qui s'avèrent être des prototypes d'avions de chasse de la première guerre mondiale. Ces « oiseaux de l'enfer » pourraient donc évoquer les biplans de la LVG (Luftverkehrsgesellschaft) utilisés à des fins militaires. Ces biplans furent les premiers à être dotés de mitrailleuses synchronisées à la vitesse de rotation des hélices, évoquées dans le livre (« hellbirds » sera par la suite le surnom donné aux bombardiers B-29 de la seconde guerre mondiale). Mais comme il est aussi question, dans une moindre mesure, de faucons apprivoisés dressés pour tuer, cette explication plus mystérieuse a été retenue par l'éditeur pour le choix de la couverture, occultant ainsi totalement le sujet du roman.
Nous sommes en décembre 1914, au tout début de la première guerre mondiale, Watson et Holmes atteignent la soixantaine (je parle de leur âge, pas du nombre d'aventures vécues en commun). En effet, nos deux héros sont nés aux alentours de 1854, et il est d'ailleurs expressément dit que Watson a soixante ans (page 8). Or, malgré cet aveu, et c'est là le parti pris le plus cocasse du scénario, les auteurs ne vont pas être gênés outre mesure par le vieillissement de nos deux héros.
Holmes et Watson arriveront encore à nous surprendre de bien des façons. Ils entament des sprints et défoncent des portes en bois massif à coups d'épaule (page 88). Ils défouraillent leurs armes plus vite que des tireurs d'élite du FBI. Ils poursuivent les malfrats à travers Paris au pas de course, en laissant sur place notre vaillante mais totalement inefficace police nationale. Ils crapahutent jusqu'au sommet de la Tour Eiffel sans être essoufflés, en empruntant les escaliers (les ascenseurs n'existant pas encore à cette époque). Ha si – je suis de mauvaise foi – une fois arrivé au deuxième étage, Watson « s'arrête un moment pour reprendre haleine » (page 98). Ils sautent comme des cabris pour sortir des tranchées et se mettent à galoper dans le no man's land pour éviter les obus teutons. Ils traversent à pied et en plein hiver les forêts du Nord de la France sous la neige. En résumé, Holmes et Watson, malgré leur grand âge, tiennent une forme olympique ! Mais le plus désopilant reste à venir : poursuivis, ils parviennent à piquer deux avions de chasse à la barbe des soldats allemands après avoir appris les rudiments du pilotage la veille en trois mots d'explication. Arnold Schwarzenegger et Chuck Norris avaient été un moment pressentis pour jouer Holmes et Watson dans une adaptation (ce dernier point reste à confirmer).
Les références au canon ne sont pour autant pas totalement absentes. le bon Mycroft, dont la longévité dans les sphères du pouvoir dépasserait presque la durée du règne de la reine Victoria, officie toujours de façon souterraine sous le fameux club Diogène, dont on connaît enfin la raison d'être. le rôle féminin sexy est ici tenu par Nina, la fille d'Irène Adler, fougueuse espionne à la plastique irréprochable déjà rencontrée dans le premier roman.
Nous retrouvons l'espion allemand von Bork, arrêté grâce à Holmes dans Son Dernier Coup d'Archet (son dernier exploit du canon), qui s'évade de la Tour de Londres et donne du fil à retordre à son rival.
Nous rencontrons aussi bien entendu quelques personnages réels, à peine moins prestigieux que ceux du premier volet : Herbert Henry Asquith, premier ministre du Royaume Uni, Manfred von Richthofen, aviateur allemand dit « le Baron Rouge » et le Kaiser Guillaume II, empereur d'Allemagne et roi de Prusse. Mais aussi, peu ont dû le remarquer, ils croisent la route du caporal allemand Schicklgruber (page 125), qui deviendra par la suite... Adolf Hitler !
Soulignons une petite astuce de scénario qui fait sourire : von Bork, le génial espion allemand, est « vu par un gendarme » alors qu'il pénètre dans Paris par l'ouest, ce qui met aussitôt Holmes sur sa piste. Un vrai coup de pot, Paris intramuros compte 3 millions d'habitants en 1915.
Relevons pour finir une anecdote étonnante concernant le petit village de Fleurbaix, qui aurait été le théâtre de fraternisations dans les tranchées (en réalité, il s'agit de Frelinghien, situé non loin de là, mais les témoignages ont été souvent tardifs ou autocensurés). Bravo donc à nos deux scénaristes précurseurs qui évoquent une réalité de la guerre 14-18 connue surtout depuis le film Joyeux Noël de Christian Carion, sorti en 2005.
Pour certains, ce roman prend beaucoup trop de libertés avec le canon holmésien (sans parler des libertés prise avec la Grosse Bertha, qui ne fut pas une plantureuse femme canon, mais bien une monstrueuse pièce d'artillerie utilisée par les allemands à partir d'août 1914). Pour ma part, j'ai plutôt apprécié le côté « hollywoodien » du roman, et si le scénario s'écarte quelque peu du chemin tracé par Conan Doyle, il reste je pense compatible avec le canon en jouant les prolongations du Dernier Coup d'Archet, et en confirmant Holmes dans une nouvelle carrière patriotique à la solde du Secret Service Bureau, ancêtre du MI5.
Quant aux invraisemblances notables dues à la grande forme physique de nos deux héros, il est possible que tout ceci ait en effet pu être un tooooout petit peu enjolivé par Watson, ce fourbe, fréquemment accusé par Holmes dans les écrits de Conan Doyle (cf. Les Hêtres Pourpres) « d'embellir les récits de (leurs) aventures ».
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