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Critique de Patlancien


Nous sommes dans un univers post-apocalyptique survenu après une guerre atomique (le roman a été écrit en 1969). Notre bonne vieille planète est figée dans un hiver nucléaire. Elle est recouverte d'une banquise éternelle et omniprésente. L'humanité a appris à vivre dans ce monde blanc. D'ailleurs les couleurs comme la chaleur sont honnies et devenues blasphématoire. Une seule religion est permise : l'adoration pour la «Glace-Mère ».
Un schéma classique de la littérature de science-fiction qui revient souvent comme un leitmotiv dans les romans du genre. L'originalité se situe dans l'existence de grands voiliers de glace, montés sur de gigantesques patins et qui donnent du piment à cette histoire. On les retrouve amarrés dans le port des huit cités de glace ou glissants sur un immense plateau gelé toutes voiles dehors. Ce sont des goélettes, des brigantins et des schooners et autres bricks. Ils possèdent une valeur inestimable et montrent la richesse d'une cité au nombre de mâts qui composent sa flotte. Ils sont composés d'armatures en bois alors que les forêts ont disparu de la surface de la terre, leurs voiles sont en nylon et leurs coques en fibre de verre alors que l'on ne sait plus fabriquer ni l'un ni l'autre. Les amoureux de la marine à voile vont être servis. Nous sommes en présence d'un véritable Moby Dick de la science-fiction. Comme Achab, les capitaines de notre roman poursuivent des baleines au harpon mais celles-ci sont terrestres et carnivores. Les scènes de chasses sont nettement plus sportives et dangereuses que dans le roman éponyme.

« La baleine, se dressant sur ses nageoires postérieures, agita ses membres de devant. Un hurlement sortit de ses mâchoires ouvertes et son ombre recouvrit entièrement le navire qui sauta en avant, tiré par la corde du harpon, ses patins avant quittant la glace. Puis la corde se libéra. Rorsefne ne l'avait pas fixée convenablement. le navire reprit contact avec la glace dans un bruit sourd.
L'énorme bête retomba à son tour et se mit à avancer rapidement vers le yacht en claquant des mâchoires. Arflane réussit une nouvelle fois à tourner ; Les mâchoires manquèrent la proue, mais le corps monstrueux s'écrasa sur la coque à tribord. le yacht vacilla, manqua de se renverser puis repris son équilibre. »

Les marins que l'on rencontre, des baleiniers pour la plupart ; sont à l'image de cet univers froid. Des êtres rudes, durs à la tâche, couverts de cicatrices, habillés de peaux de phoques ou d'ours, assez grossiers et bon vivants, et qui aiment traînés dans les tavernes à la recherche de filles faciles. Et puis, il y a le capitaine Konrad Arflane le héros de l'histoire. Et les amoureux de loups de mer ne seront pas déçus par le personnage. Il est beau, il est grand et il est fort. Et puis il y a aussi la belle Ulrica Ulsenn mal mariée à Janek Ulsenn et dont notre beau capitaine va tomber éperdument amoureux.

« Elle sourit avec reconnaissance et ses traits s'adoucirent quand elle le regarda en face. Si vous essayez de me réconforter, capitaine je crois que vous allez réussir. Je vous réconforterais encore plus si vous m'en donniez l'occasion. Il n'avait pas voulu dire cela. Il n'avait pas voulu reprendre la main comme il le faisait maintenant ; pourtant, elle ne résista pas et, bien que son expression fût devenue sérieuse et pensive, elle ne parut pas offensée. »

Un triangle amoureux, une prose bien travaillée et poétique à souhait, des paysages à couper le souffle, des personnages fouillés jusqu'au tréfonds de leur âme avec une description très poussée de leur physique, des scènes de combats épiques ; on a tous les ingrédients pour passer un bon moment de lecture.

« Dans la lumière faible et vacillante, son visage apparaissait rouge, couperosé et ravagé par le vent, le soleil et la morsure du froid. C'était presque une tête sans chair dans laquelle les os saillaient comme les membrures d'un navire. Son nez était long et étroit, comme une proue que l'on aurait mise à l'envers, et il avait sous l'oeil droit une profonde cicatrice ainsi qu'une autre sur la joue gauche. Ses cheveux bruns étaient nattés sur sa tête, formant une sorte de pyramide torsadée qui se divisait à son sommet en deux touffes raides semblables aux nageoires d'une baleine ou d'un phoque. Cette étrange coiffure était maintenue en place grâce à de la graisse engrumelée qui dégageait une forte odeur, de même que ses fourrures qui étaient de belle qualité mais tachées par le sang et la graisse des baleines. Sa veste était ouverte jusqu'au cou, découvrant un collier de dents de baleine. Des morceaux d'ivoire plats et ciselés étaient suspendus aux lobes de ses oreilles. »

C'est un roman d'aventure avec un grand A comme on les aime. Michael Moorcock est bien le digne successeur des Jules Verne, Robert Louis Stevenson ou Herman Melville. Comme pour ces illustres prédécesseurs, on retrouve dans son récit les vieilles cartes marines, les sauvages, les monstres marins, les tempêtes, les naufrages, les traîtrises, la Belle à secourir. Si vous voulez vous replonger dans la course au Grand large, je vous invite à embarquer avec moi sur le navire des glaces. A lire et à relire sans aucune modération.
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