" Nombreux sont ceux qui se sont cassé les dents au moment de donner une définition claire et limpide de l’humour.
L’humour, c’est un outil très commode, pour ne pas dire indispensable. On le trouve dans quasiment tous les foyers, même chez les plus modestes. Il se présente sous la forme d’une tige métallique enfichée dans un manche en plastique ou en bois, tige métallique dont l’extrémité s’adapte à la tête d’une vis et permet par conséquent…
Non, pardonnez-moi, petite erreur de trajectoire : c’est la définition du tournevis que je suis en train de donner. Au temps pour moi !
L’humour est l’assemblage harmonieux et délectable de plusieurs ingrédients comestibles, parmi lesquels figurent en bonne place le poulet pattes noires, les tomates de Marmande, des poivrons verts et rouges, des oignons de Roscoff ou d’ailleurs… d’ailleurs… d’ailleurs, je me demande si je ne suis pas en train de faire une nouvelle fois fausse route, car c’est la définition du poulet basquaise que j’ai entrepris de donner, d’une manière assez approximative par dessus le marché, puisque je ne fournissais aucune indication sur les quantités, notamment sur la quantité d’ail, ingrédient indispensable que j’avais du reste oublié de mentionner.
Quel casse-tête, cette affaire d’humour !! Au deuxième temps pour moi, je repars du bon pied.
L’humour est une maladie génétique rare affectant les épithéliums glandulaires de nombreux organes… Cette fois, ma vigilance ne sera pas prise en défaut, je freine à temps, j’étais parti sur la mucoviscidose, c’est totalement hors sujet et pas très réjouissant de surcroît.
Non, l’humour, c’est tout simplement le sport national britannique, qui se joue à onze avec une balle et des battes sur un terrain de forme ovale… Aïe ! C’est pas plutôt le cricket, ça ? « Ah, c’est pas mon jour ! » comme disait Alphonse Allais. « Une nouvelle tentative s’impose », comme aurait dit François Rabelais.
L’humour, c’est le nom vernaculaire d’un champignon basidiomycète très répandu dans les forêts de conifères, et dont la toxine active, appelée « rigolus », disparaît totalement à la cuisson… Non, là encore non !!!... ça, c’est un mix maladroit entre la girolle, le bolet chrysentéron et la golmotte.
Ne nous voilons pas la face : je peine comme un bagnard à définir l’humour. C’est la raison pour laquelle j’ai écrit cette préface et Etienne Moulron le bouquin, et non pas l’inverse.
« Et c’est ainsi que Vialatte est grand », comme disait Allah. "
François ROLLIN
Préface
Etienne Moulron a voulu que deux de ses amis préfacent sa pétulante célébration de l’humour. Pour cet effet de stéréolexie, il a choisi deux professeurs : le Professeur Rollin, humoriste de race, si intelligent, si subtil et moi-même, professeur d’université, qui, lors d’un colloque, n’a pas hésité à se mettre un nez rouge destiné à remplacer opportunément le « o » du mot « incongru », thème fédérateur des communications. Tout l’honneur est pour moi, car, comme aurait dû le prédire Boileau, « J’appelle un chat un chat et Rollin un génie ».
Depuis plusieurs années, Etienne est à l’affût des livres, dessins et spectacles qui déclenchent la danse des zygomatiques. Pour lui, la plus perdue des journées est celle où il n’écrit pas, sur les réseaux sociaux, quelques lignes célébrant l’humour - notamment de résistance -, appelant à la création d’un Musée du comique ou collectant les exemples de résilience souriante chez les handicapés. Le présent traité donne une idée de son activisme tenace et de son charisme d’organisateur. Même les spécialistes du sujet se réjouiront de découvrir des citations, des exemples ou des références qu’ils ne connaissent pas.
Impossible, cela dit, de définir l’humour ! Au mieux, on peut l’infinir, tant ses couleurs sont nombreuses et parfois contradictoires ! Humour vache, humour qui fait un effet bœuf dans un magasin de porcelets, humour gai comme un pinçon sur la fesse d’une rombière, humour bienveillant, refusant les blessanteries, et dont la devise est « Sans coups, faire rire ! »…
J’ose, en conclusion, proposer ce slogan pour une homéopathie lexicale : « Si nous nous faisons du mouron, un seul remède : lisons du Moulron ! ». Par chance, le mot « mouron » a plusieurs sens dans notre langue. Profitons de l’aubaine ! Nourrissons-nous des pages qui suivent ; il y pousse une variété rare de stellaria media, de l’humouron pour les p’tits zoziaux que nous sommes tous, encagés, affamés de bonheur, de liberté et de fraternité.
Christian Moncelet
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