"comme si le ciel pleurait les larmes que personne ne versait"
Jamais il n’avait imaginé qu’elle le voyait comme un patient psy. Il se doutait qu’elle le pensait un peu hors norme, mais pas que sa vision globale de lui était celle d’un fou. Qui pourrait un jour comprendre que de ne pas aimer la vie, de ne pas être capable des ‘intégrer n’avait rien d’anormal ? Pourquoi la société, construite de manière totalement artificielle par quelques poignées de gens au pouvoir, devait avoir raison quant à la façon de vivre et que tout ceux qui s’y opposaient devaient être un problème ?
Encore vêtu de la veille, il ajouta quelques habits à tout ce désordre, les écartant ensuite de son chemin du bout du pied pour se rendre sous la douche. En regardant l’état de l’appartement, il se souvint que Michael, son meilleur ami et colocataire, l’avait chargé d’une importante mission qu’il fallait mener à bien au plus vite. Tout devait être réglé pour le lendemain midi : les lieux devaient être rangés et nettoyés pour l’arrivée de Nat, la fille de Michael, petite perle de pur bonheur dans l’insouciance de ses cinq ans.
L’étreinte de Hil, si rare, était tellement vraie, si loin du simple geste social qu’un autre aurait fait… Michael se trouvait pris dans un bain de sérénité. Ils restèrent ainsi dans les bras l’un de l’autre pendant plusieurs minutes, sans parler, sans se regarder, Michael les yeux fermés, ceux de Hil dans le vague.
Madame Heartfield de Beauschene était satisfaite de voir que ses enfants ˗ sauf Hilton, qui ne s’impliquait jamais vraiment ˗ allaient la soutenir pour remettre l’entreprise pharmaceutique sur de bons rails. Elle termina la séance en se levant de table et fit un geste à Max pour que celle-ci soit desservie. Hilton la vit sortir de la pièce sans un regard pour eux, ni au revoir, ni quoi que ce soit. Un vrai soulagement. Il ne supportait pas quand elle faisait semblant. Il la haïssait encore plus dans ces moments-là. Il la détestait à un point qu’il savait malsain, qu’il ne pouvait avouer à personne et qui pourtant l’envahissait totalement. Il lui arrivait de se sentir nauséeux rien qu’en sachant qu’il allait la voir. Et il lui arrivait d’avoir ces images de violence, de violence terrible qui lui traversaient l’esprit sans qu’il ne puisse rien y faire. Il n’en ressentait pas de honte. Peut-être un léger malaise parce qu’il savait que ce n’était pas « normal ». Parce qu’il y prenait plaisir, comme à un fantasme