Cet été, comme l’année précédente et celle d’avant, je sortais chaque jour de chez moi avant le coucher du soleil, mais la vérité est que je n’avais nul lieu à atteindre, nul endroit où marcher.
Chapitre 5
Exposer mes livres au plein soleil pendant les dernières chaleurs de l’été, et brûler les feuilles mortes de mon jardin, un après-midi sans vent au début de l’hiver : telles étaient les occupations les plus agréables de ma vie solitaire. De fait, lorsque je sortais les livres, je contemplais ceux qui étaient restés longtemps empilés sur de hautes étagères, l’époque où je les avais savourés me revenait en mémoire, et c’était l’occasion pour moi de percevoir l’évolution des courants du temps et celle de mes goûts. Le plaisir que j’éprouvais à brûler les feuilles mortes venait du fait que j’en oubliais, ne fût-ce qu’un moment, que je menais une vie de citadin.
Chapitre 9
Il n’est pas rare que le sol des palais de l’équité soit jonché d’excréments d’oiseaux ou de rats, et c’est à l’inverse au fond des vallées du vice que l’on peut cueillir et amasser en abondance les belles fleurs des sentiments humains et les fruits parfumés des larmes.
Chapitre 7
Même ces quartiers nouveaux, qui se forment en des lieux aussi retirés, ne peuvent échapper aux vicissitudes de l’Histoire. Que dire alors de la vie des êtres humains ?
Chapitre 6
D’entre les livres empilés près du mur, il sortit des exemplaires reliés, cinq ou six, les épousseta des deux mains et me les confia :
« Dépôt légal, douzième année de Meiji (*). Quand on lit des revues de cette époque, on a l’impression de vivre plus longtemps, n’est-ce pas ? »
(*) 1879
Chapitre 1
La fin du célèbre Madame Chrysanthème de Pierre Loti décrit bien de tels mouvements du cœur, avec une force qui émeut jusqu’à provoquer chez le lecteur des larmes silencieuses. Même si j’ajoutais à cette « histoire singulière à l’est du fleuve » une touche romanesque, peut-être ne ferais-je que me ridiculiser, pour avoir suivi en vain l’exemple de Loti.
Les pensées qui vous rendent, sans raison, mélancolique sont celles qui se révèlent justes.
Ce que nous regrettons appartient à un passé qui ne reviendra pas, quoi que nous fassions .
J’avais en projet un roman intitulé « La disparition ». J’avais en moi une certaine confiance : je me disais que si je parvenais à le terminer, il ne serait peut-être pas si mauvais que cela.
Le personnage principal du roman avait pour nom Taneda Junpei. Âgé d’une cinquantaine d’années, il était professeur d’anglais dans un collège privé. Sa première femme, qu’il avait aimée, était décédée trois ou quatre ans plus tôt, et il avait épousé Mitsuko en secondes noces.
Depuis l’âge de vingt ans, je me suis abandonné aux divertissements amoureux, et maintenant, parvenu au soir de ma vie, en quelle disposition d’esprit pourrais-je évoquer un rêve aussi fou ? Le destin ne pousse-t-il pas trop loin ses moqueries envers les hommes ?