Autant avouer tout de suite que j'ignorais tout de la Guyane, jusqu'à sa localisation, et que par conséquent la lecture de cet "
Obia" s'apparentait pour moi à un voyage en terre inconnue. Par chance,
Colin Niel s'est avéré être le guide parfait pour cette aventure littéraire : aussi éloigné de l'auteur opportuniste en quête d'exotisme bon marché susceptible de colorer une énième intrigue policière, que du pseudo-spécialiste se regardant écrire, plus soucieux d'étaler à la vue de tous l'étendue de ses connaissances et transformant ainsi son texte en thèse.
Tout au contraire,
Colin Niel écrit, lui, sur ce coin d'Amazonie française comme un auteur barcelonais le ferait dans la capitale catalane ou un romancier des Appalaches dans son coin d'Amérique : en écrivant sur ce qu'il connait et en faisant de la Guyane un personnage à part entière, avec son histoire, son passé, ses difficultés, sa beauté et sa complexité.
Niel dévoile les différentes facettes de cet autre territoire français un peu comme il le fait avec les personnages de son roman, par touches successives, avec justesse et sincérité.
Et on retrouve la même maîtrise, la même habileté dans la construction de son intrigue, entremêlant passé et présent autour du fleuve Maroni.
Un fleuve qui symbolise la frontière invisible entre Suriname et Guyane, et que n'ont cessé de traverser depuis des décennies les habitants de l'un comme de l'autre.
Les Surinamiens par milliers dans les années 1980 pour fuir la guerre civile et ses massacres, tandis qu'aujourd'hui, les barons de la came qui bénéficient d'une planque idéale dans cet Etat faiblement peuplé refusant l'extradition, envoient leurs mules sur les rives françaises du Maroni, direction l'ouest et l'aéroport de Cayenne la capitale, avec pour objectif la métropole.
Entre meurtres inexpliqués, trafic de drogue, course-poursuite échevelée auxquels se mêlent d'étranges fantômes d'une guérilla pourtant achevée depuis des années,
Colin Niel déploie plusieurs fils narratifs, d'autant plus captivants que l'on pressent qu'ils vont se rejoindre tôt ou tard, et réserve de belles surprises au lecteur. Si le milieu du récit accuse une baisse de rythme assez conséquente, l'auteur enchaîne heureusement sur un retournement de situation totalement bluffant, pour une dernière partie pleine de suspense menée pied au plancher.
Pas de doute, sous la plume de
Colin Niel, la Guyane est définitivement une terre de polar à ne pas manquer !